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30/10/2017

Elections parlementaires en Islande : un système divisé.

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Island_Thingvellir.jpgLes Islandais étaient amenés à voter pour leurs représentants cet octobre 2017 après avoir voté en 2016, en raison de l’impossibilité de disposer d’une majorité parlementaire stable. Les résultats désormais connus montrent une fragmentation encore plus nette de l’électorat islandais.

Avec 25,2% des voix et 16 députés, le Parti de l’Indépendance (eurosceptique, libéral et conservateur) réalise une contre-performance, perdant 3,8 points et 5 sièges. Bien qu’il demeure le premier parti du pays, le système proportionnel limite son impact et l’oblige surtout à une alliance afin de disposer de 16 sièges supplémentaires, la majorité parlementaire étant à 32 sièges (sur 63).

Avec 16,9% des voix (+ 1 point) et 11 sièges (+1), le Mouvement « Gauche verte » (social-démocrate, eurosceptique, éco-socialiste) maintient et renforce même légèrement ses positions. Le contexte est également favorable à la social-démocratie classique, pro-européenne, l’Alliance sociale-démocrate obtenant 12,1% des voix (+ 6,3 points) et 7 sièges (+4), dans un contexte où l’euroscepticisme reste dominant.

Le Parti du Centre (Miðflokurinn), nouveau venu de centre-droit, sur une ligne là encore eurosceptique mais également populiste, obtient 10,9% et 7 sièges, ce qui est un résultat considérable pour une première candidature aux élections parlementaires. Il semble avoir surtout pris au parti des Pirates, en net recul.

Les Pirates en effet n’obtiennent que 9,2% des voix (- 5,3 points) et 6 sièges (-4). Cette contre-performance est analogue aux autres partis « Pirates » en Europe, qui émergent puis reculent avant de disparaître. C’est un phénomène politique « feu de paille ». En Europe, seul le Mouvement 5 Etoiles italien, qui a émergé sur les thèmes de la démocratie directe via internet, a pu se maintenir à un très haut niveau.

Le Parti du Peuple, qui est à la fois socialiste, populiste et opposé à l’immigration, sur une synthèse originale qui rappelle néanmoins les tentatives de synthèse sociale et nationale, obtient 6,9% (+ 3,4 points) et 4 sièges (+4), perce également. Le Front national islandais (Islenska Þjorðfylkingin) qui avait obtenu seulement 0,16% des voix en 2016 sur une ligne nationaliste, n’était pas candidat.

Le Parti du Progrès (agraire, populiste, eurosceptique) progresse légèrement avec 11,5% des voix (+ 0,6 points) et conserve ses huit sièges. Enfin, le Parti de la Réforme (libéral, pro-européen) s’effondre avec 6,7% des voix (- 3,8 points) et 4 sièges (-3). De même le parti « Futur lumineux », à la fois libéral, social et européen, sombre avec 1,2% des voix (- 6 points) et perd toute représentation nationale. C’est encore davantage le cas avec le parti Aurore (Dögun) qui passe de 1,73% des voix en 2016 à 0,1%.

Les mouvements pro-européens, à l’exception des sociaux-démocrates qui progressent à leur détriment, ont été sévèrement sanctionnés par les électeurs. C’est une ligne nationale, à dominante eurosceptique, qui sort renforcée, avec en outre l’émergence d’un mouvement anti-immigration associant ce refus à des thématiques économiques de gauche. Toutefois le Parti de l’Indépendance en est lui-même victime, alors que la gauche éco-socialiste, eurosceptique, se maintient à un niveau élevé.

L’Union Européenne, que l’Islande a renoncé à rejoindre, n’apparaît plus comme une perspective favorable pour une Islande angoissée qui entend davantage préserver ses intérêts et qui craint pour son identité face aux phénomènes migratoires, alors qu’il n’y a que 300.000 Islandais, soit à peine le nombre d’habitants du Grand Nancy en France.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens).

22/10/2017

Elections en Tchéquie : une droite renforcée, une gauche moribonde, un euroscepticisme en hausse

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Tchéquie,ANO2011,Babis,SPOLes élections législatives tchèques qui se sont déroulées les 20 et 21 octobre 2017 ont permis la victoire d’Andrej Babis, à la tête du mouvement ANO 2011, un candidat milliardaire représentant la droite libérale et qui a fait campagne notamment sur le refus d’accueillir des migrants. Babis, comparé par certains à un Berlusconi tchèque, a obtenu 29,64% des voix (+ 11 points) et 78 sièges (+31). Il n’a certes pas obtenu la majorité absolue, qui est de 101 sièges (sur 200) mais il est en mesure de bâtir une coalition autour de son mouvement.

Le parti civique démocratique (ODS), dirigé par Petr Fiala et connu pour ses positions plutôt eurosceptiques et conservatrices, avec 11,32% des voix (+ 3,6 points) et 25 sièges (+9), pourrait donner une majorité parlementaire à Babis dans le cadre d’une coalition, sachant que ce dernier a indiqué en revanche qu’aucune alliance avec l’extrême-droite, à savoir le Parti de la liberté et de la démocratie directe (SPD) de Tokio Okomura. Dans ce contexte, Babis s’opposera nécessairement au président français Macron et maintiendra certainement le soutien de son pays au groupe dit de Visegrad.

La volonté de renouvellement des électeurs s’est également exprimée par le succès du parti nationaliste SPD, qui obtient 10,64% et 22 sièges pour sa première élection législative, confortant les résultats des élections européennes. L’existence de ce parti, qui ne participera certes pas à une coalition au pouvoir, ne peut qu’encourager Babis à maintenir une ligne dure sur les questions migratoires. Les Pirates tchèques (Pirati), phénomène transnational aux succès en dents de scie, ayant quasiment disparu d’Allemagne après quelques succès mais ayant en revanche réussi en Islande à peser sur la politique nationale, entrent au parlement avec 10,8% des voix (+8,1 points) et 22 sièges.

L’émergence de ces nouveaux partis, en plus du succès de l’ANO de Babis, se fait au détriment des partis traditionnels. Les communistes, qui étaient encore bien représentés, tombent à 7,76% des voix (- 7,15 points) et 15 sièges (-18). Les sociaux-démocrates du CSSD avec 7,27% des voix (- 13,09 points) et 15 sièges (-35) sont littéralement laminés. Ces deux partis de gauche réunis perdent en tout près de 20 points, ce qui est considérable. La peur du laxisme migratoire prêté à la gauche a été déterminante pour expliquer son effondrement électoral.

Mais la droite classique, représentée par les démocrates-chrétiens et le mouvement TOP 09, ne s’en sort guère mieux. Le KDU-CSL (chrétien-démocrate) n’obtient que 5,8% (-0,8 points) et 10 sièges (-4) tandis que TOP 09 obtient 5,31% (-6,7 points) et 7 sièges (-19).

Enfin le mouvement modéré des « Maires et indépendantes », s’appuyant sur son enracinement local, obtient 5,18% des voix et fait rentrer au parlement 6 députés.

Les petites formations politiques sont également victimes du succès d’ANO et autres des formations émergentes. Avec 1,46% des voix (- 1,74), les Verts (Zeleni) perdent tout rôle politique, de même que le Parti des droits civiques, de gauche modérée, qui doit se contenter de 0,36% des voix (- 1,15). Ils subissent tous le rejet de leurs thématiques dans un contexte de forte angoisse identitaire.

Avec l’émergence du SPO, les autres partis de droite radicale, qui étaient nombreux à se présenter, sont marginalisés. Le mouvement Svobodni (« Parti des citoyens libres »), eurosceptique, tombe à 1,56% des voix (- 0,91). En revanche le mouvement Rozumni, eurosceptique, obtient 0,72% (+ 0,45). Enfin le mouvement des Réalistes (Realisti), là encore eurosceptique et anti-immigration, obtient 0,71% des voix.

Les formations encore plus dures, comme l’ultra-radical DSSS (Parti des travailleurs et de la justice sociale) avec 0,2% des voix (- 0,66), l’Ordre de la nation (RN-VU) avec 0,17%, comme le Bloc contre l’islamisation (0,1%) ou comme les Républicains de Miroslav Sladek (SPR-RSCMS) avec 0,19% des voix, sont maintenues à des scores dérisoires, sans parler du Front national tchèque (117 voix en tout) ou de « La nation ensemble » (300 voix). Mais toutes illustrent néanmoins la volonté tchèque de se préserver du globalisme.

25,7% des électeurs thèques ont voté pour des formations nationalistes ou souverainistes opposés à l’Union européenne comme à l’arrivée de migrants, ce qui est considérable. Certains des partis proposant une offre eurosceptique seront certainement associés au nouveau gouvernement autour de la figure d’Andrej Babis (ANO), qui est la seconde plus grande fortune du pays. Ce dernier n’entend pas se faire dicter sa politique par quiconque, et certainement pas par Bruxelles. Babis ne tombera certes pas dans l’euroscepticisme, pas davantage que Viktor Orban en Hongrie n’y a cédé, mais va accroître le pôle de résistance d’Europe médiane. Le succès autrichien de Sebastian Kurz devrait renforcer également ce pôle.

Il serait peut-être que les dirigeants d’Europe occidentale, et par conséquence les responsables de Bruxelles, comprennent que la politique qu’ils proposent est impopulaire et contraire à l’intérêt véritable des Européens. L’unité européenne ne sera possible qu’en trouvant un terrain d’entente, c’est-à-dire en refusant explicitement les « valeurs » du globalisme.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

16/10/2017

Défense et illustration du drapeau européen.

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En 1987, l’alsacien Arsène Heitz, membre de l’équipe de création du drapeau européen, affirmait avoir été inspiré par la couronne mariale. C’est possible. Mais ce n’est pas la seule inspiration qui a abouti à ce résultat. L’organisation Pan Europe prônait un drapeau bleu avec un cercle jaune en son centre et une croix rouge en son sein, unissant le soleil d’Apollon et la croix des croisés.

Le bleu est la couleur de l’Europe, par ses aspirations célestes et par les mers qui l’entourent. C’est la couleur du firmament, c’est la couleur de Zeus venu sur terre conquérir le cœur d’Europe. Les douze étoiles en cercle représentent la concorde entre les douze « dii consentes » olympiens du lectisterne de 217 avant J.C (dédicace romaine aux dieux pour conjurer la menace représentée par Hannibal), six dieux et six déesses à parité, également cités par le poète latin Ennius.

C’est aussi le nombre de travaux héroïques accomplis par Héraclès, et il est certain que l’effort pour unir l’Europe est digne de Prométhée et d’Héraclès réunis. Le nombre 12, qui résulte de 3*4, de la trinité indo-européenne, puis chrétienne, et des quatre éléments, est un symbole de perfection cosmique. Le cercle représente le disque solaire aussi bien que l’harmonie, qui est dans la mythologie grecque fille d’Arès et d’Aphrodite. Cela rappelle la couronne d’Astrée, la déesse de la justice (et des étoiles), qui régnait sur terre du temps de l’âge d’or aux côtés de Cronos/Saturne.

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Jean-Luc Mélenchon s’indigne que le drapeau européen soit arboré à l’assemblée nationale. Il déclare : « C’est la république française, pas la vierge Marie ». Et s’insurge de devoir être « obligé de supporter ça ». Il oublie que les révolutionnaires de 1789 voulaient étendre leur révolution à toute l’Europe, avant le virage chauvin de Valmy (1792) et la terreur.

Il propose que ce drapeau soit remplacé par le drapeau de l’ONU, symbole du mondialisme par excellence. On songera à Asselineau en campagne présidentielle aux côtés du drapeau français et du drapeau onusien. Marine Le Pen avait exigé sur le plateau de TF1 que le drapeau européen soit retiré et avait annoncé, élue présidente, qu’elle le ferait retirer de tous les bâtiments publics.

Mélenchon a donc proposé de faire retirer ce drapeau, et Macron s’y est clairement opposé. Dupont-Aignan rappela que le statut du drapeau européen était mentionné dans le traité que les Français avaient refusé par référendum en 2005. Je doute pourtant qu’un seul électeur ait voté non pour cette raison. Enfin Louis Aliot a soutenu mollement cette proposition en indiquant que « nous sommes dans l’assemblée nationale, c’est normal qu’il n’y ait que le drapeau français ». Le repositionnement pro-européen du FN à 180° de la position antérieure et que Marine Le Pen a officialisé dans son discours de Carpentras, a encore du mal à rentrer dans les esprits.

D’un point de vue juridique et institutionnel, il est indiscutable que la présence du drapeau européen à l’assemblée nationale pose question. Mais il rappelle l’engagement européen des dirigeants et parlementaires français mais aussi le caractère européen du peuple français. C’est un symbole fort, exactement comme la statue de Minerve/Athéna sise devant l’assemblée. Qu’une déesse païenne, symbole même de la religion native européenne, s’y trouve, devrait indigner ce laïcard de gauche.

Le drapeau européen n’a pas à être associé mentalement à la politique des actuels dirigeants de l’Union Européenne, qui sont choisis par les chefs d’état et de gouvernement, qui plus est. Sinon, il faudrait refuser de la même façon le drapeau français sous prétexte qu’il a été instrumentalisé par des gens dont on condamne la politique.

Ce drapeau est innocent de l’exploitation qu’en font des dirigeants incapables par ailleurs de le brandir et encore moins de mourir en son nom. C’est à nous, les vrais européens de sang et d’âme de le reprendre à ceux qui ne sont pas dignes de le brandir. Le drapeau européen bleu aux douze étoiles doit devenir le symbole de la résistance de l’Europe au mondialisme. Au lieu d’y voir le symbole de l’oppression globaliste sur l’Europe, voyons-y le symbole de la liberté demain retrouvée, dans l’unité politique et la réconciliation morale du continent. J’ai rappelé que ce drapeau était lui aussi porteur de la longue mémoire européenne.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

Elections autrichiennes : la barre à droite toute.

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800px-Kurz2017.jpgAvec 31,36% (+ 7,37) des voix et 61 sièges (+14), l’ÖVP de Sebastian Kurz réussit son pari de renforcer sa formation politique et maintient le FPÖ de Hans-Christian Strache à bonne distance. Ce dernier, qui avait atteint parfois jusqu’à 37% des voix dans certains sondages, n’a cessé de reculer depuis l’ascension médiatique du ministre Kurz. Le FPÖ néanmoins obtient dans ce contexte 27,35% des voix (+ 6,85) et 53 sièges, ce qui est le meilleur résultat de son histoire, légèrement supérieur à celui obtenu par Jörg Haider en 2000.

Le SPÖ, à la différence de la SPD allemande voisine, ne s’effondre pas. Il obtient 26,75% des voix et 52 sièges, soit le même résultat qu’en 2013. Son électorat se maintient dans un contexte où les formations écologistes reculent de cinq points en tout.

La formation d’Alexander van der Bellen, président autrichien actuel, élu pour faire barrage au candidat du FPÖ Norbert Hofer, s’effondre avec 3,32% des voix (- 9.1) et perd toute représentation parlementaire (-24 sièges). Les Verts (Grüne) ont été victimes également de la concurrence d’une scission, le mouvement Pilz, du nom de son fondateur, qui obtient 4,13% des voix et 8 sièges.

Avec 4,96% des voix et 9 sièges, la liste NEOS, de centre-droit et en faveur de la construction européenne, maintient son résultat de 2013. Le fort tripartisme autrichien a empêché cette formation d’accroître son audience mais elle a su fidéliser son électorat.

Les autres formations politiques populistes sont réduites à la portion incongrue. La liste FLÖ issue d’une scission du FPÖ menée notamment par Barbara Rosenkranz obtient 0,18% des voix. La liste ultra-anti-européenne EUAUS, qui prône une sortie de l’Autriche de l’UE, 0,01%. Les communistes du KPÖ obtiennent 0,73% des voix (- 0,29), récupérant le vote gauchiste. Enfin la liste représentant les minorités musulmanes, liste pro-Erdogan, à savoir le NBZ, obtient 0,06% des voix soit à peine 2600 électeurs. C’est l’échec également pour la formation populiste GILT, qui n’obtient que 0,92% des voix. Les listes divers (Sonstige) sont donc laminées, perdant près de sept points en tout par rapport à 2013.

Le SPÖ a immédiatement proposé une alliance avec l’ÖVP mais Sebastian Kurz va devoir rapidement faire un choix déterminant. Ou bien il peut imiter Sarkozy, et après avoir tenu une ligne droitière pendant la campagne, faire l’ouverture à gauche une fois au pouvoir. Mais ce serait tactiquement maladroit, surtout en Autriche. Ou bien il peut proposer une coalition avec Strache et le FPÖ, au risque de susciter en Europe occidentale une campagne de dénigrement, et c’est probablement le choix qui sera le sien.

Pour le FPÖ, ce résultat est paradoxal. C’est certes son meilleur score mais il est très en-dessous des espérances que Strache pouvait avoir il y a encore quelques mois. Il a été incapable de freiner l’ascension de Kurz qui a su convaincre d’anciens électeurs ÖVP, tentés par le FPÖ, de retourner au bercail. Les perspectives de devenir chancelier s’évanouissent donc.

Si le FPÖ accepte de rejoindre une coalition autour de l’ÖVP, le risque est fort que le parti connaisse une hémorragie électorale à terme, comme cela avait été le cas en 2000. Mais si le FPÖ reste dans l’opposition, on lui reprochera de ne pas vouloir participer au pouvoir et de ne pas être un parti de gouvernement. Il est donc là encore probable que Strache accepte de rejoindre une coalition, à la condition d’obtenir au moins le ministère de l’intérieur.

Une coalition ÖVP/FPÖ avec Sebastian Kurz comme chancelier, est donc vraisemblable. Elle ne suscitera sans doute pas les cris d’orfraie de la coalition précédente ÖVP/FPÖ de 2000. Strache n’est pas Haider et il a su éviter tout le long de sa carrière à la tête du FPÖ les déclarations provocatrices qui inquiéteraient une partie notable de ses propres électeurs.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

15/10/2017

L’impasse de l’indépendance catalane.

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810px-Flag_of_Catalonia.pngToutes les identités d’Europe doivent être préservées et il n’y a aucune raison en soi que l’identité catalane soit écrasée par l’identité castillane. Elles ont toutes le même droit de perpétuer leur héritage/patrimoine et de le transmettre aux nouvelles générations. La France jacobine a écrasé les identités propres à son territoire en imposant le français, c’est-à-dire en réalité le francilien, la dialecte d’oïl de la région parisienne, siège du centralisme capétien puis républicain. Et de même le régime franquiste en Espagne a violemment réprimé les nationalismes catalan et basque.

Mais depuis les années 70, les provinces d’Espagne, comme la Catalogne, ont bénéficié d’une large autonomie. Ce ne sont pas les Espagnols qui mettent en danger l’identité catalane mais les prétendus indépendantistes catalans eux-mêmes, animés par une idéologie gauchiste qu’on peut retrouver chez Podemos, et qui les amènent à se faire les promoteurs d’une immigration immodérée, créant ainsi la seule menace réelle sur l’identité catalane.

En réalité, la pire chose qui pourrait arriver aux Catalans eux-mêmes serait que ces « indépendantistes » qui nient la parenté de culture entre Castillans et Catalans, et entre Européens en général, arrivent au pouvoir d’un Etat devenu indépendant, où ils distribueront la nationalité catalane à tout le monde, détruisant l’identité catalane qu’ils prétendent défendre.

Le gouvernement espagnol ne veut pas de l’indépendance catalane pour de bonnes et de mauvaises raisons. Sa façon d’affirmer son pouvoir ne paraît pas adéquate. Il aurait suffi de garantir les conditions démocratiques d’un référendum, que les indépendantistes auraient certainement perdu, pour désactiver leur action.

Les régionales ou indépendantistes de droite, notamment en Flandre, qui ont apporté leur soutien à l’indépendance catalane se trompent de combat. Les identitaires catalans font fausse route en acceptant que leurs pires adversaires en Catalogne réalisent cette indépendance à laquelle eux-aussi aspirent. Une responsable de SOM Catalans déclare ainsi qu’il n’y a « rien de commun entre l’Espagne et la Catalogne », ce qui est une absurdité d’un point de vue historique. Cette identitaire catalane revendique également la Catalogne française, mais aussi les Baléares et Valence.

Outre le combat commun pour la Reconquista, il y a le même héritage celte, romain et germanique (gothique), sans parler de l’héritage ibère plus ancien. Ce genre de déni me fait penser à celui des souverainistes français, qui considèrent que la France et les autres nations d’Europe n’ont rien en commun, alors que dans le même temps selon eux « tout le monde » peut devenir français.

Alors que le combat identitaire implique de se placer dans le cadre d’une Europe unie, nous retrouvons là les égarements nationalistes classiques. Faire de la Catalogne un État souverain de plus, quel intérêt ? Pour ne pas avoir à contribuer économiquement au reste de l’Espagne, alors même que la gouvernance catalane pratique l’assistanat généralisé ?

Il est indéniable que les États nationaux classiques sont incapables de protéger les Européens contre le mondialisme, mais si l’État espagnol en est incapable, que dire du futur État catalan ? Le cas de l’Écosse est différent puisque c’est parce qu’elle veut rester en Europe qu’elle envisage de se séparer du Royaume-Uni, mais pour y appliquer la même politique migratoire suicidaire, en pire.

Il ne faut pas un État de plus en Europe, mais un seul Etat pour l’Europe. En ce sens, Catalans et Espagnols resteront les citoyens d’un même ensemble, sans les contentieux historiques désormais ringardisés, qui s’appellera l’Europe. C’est dans l’unité politique du continent que se trouvent la réconciliation et la restauration des identités d’Europe menacées par le globalisme, qu’il soit libéral ou marxiste. Les défenseurs de l’indépendance catalane ont tort. Les partisans d’une Espagne unie aussi. Tous deux nient l’essentiel, la nécessité d’une Europe politique forte et unie qui n’a que faire de querelles de clochers sans intérêt, tant que les identités sont préservées.

C’est par l’Europe que l’identité catalane, comme l’identité castillane d’ailleurs, sera préservée. Il est donc impératif que les catalans identitaires laissent à cette extrême-gauche funeste ce fantasme d’une souveraineté de papier et œuvrent plutôt à l’émergence d’une Europe unie, respectueuse par subsidiarité des identités intra-européennes.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

02/10/2017

Elections parlementaires en Allemagne : le Bundesrat sans majorité.

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cdu-og-image-1200x630.jpgAngela Merkel a gagné mais en version Pyrrhus. Avec 33% des voix (26,8% pour la CDU et 6,2% pour le CSU, sa variante bavaroise), obtenant 246 députés (sur 709), la démocratie chrétienne réalise son plus mauvais score de l’après-guerre. C’est dire si la chancelière est devenue impopulaire en quelques années, et une CDU plus courageuse aurait déjà changé de dirigeante, faisant avec elle ce que cette dernière avait fait avec Helmut Kohl.

Son seul motif de satisfaction est d’avoir amené la SPD, avec laquelle elle formait une grande coalition depuis plusieurs années, au plus bas à son tour. Avec 20,5% des voix et 153 députés, la SPD connaît l’un des résultats les plus médiocres de son histoire. Son candidat, l’ancien président du parlement européen Schulz, restera finalement à la tête du parti, au prix du refus de participer à une nouvelle coalition avec la CDU. Cette dernière doit donc se trouver de nouveaux alliés.

Le grand vainqueur de cette élection, par sa marge de progression (+ 7.9 points), est l’AfD dont la campagne fut menée sur un ton identitaire par le tandem gagnant Gauland/Weidel. Même si l’ancienne dirigeante Frauke Petry, à peine élue, claquait la porte du parti en emmenant son député européen de mari, l’AfD est renforcée, avec ses 12,6% des voix et ses 94, et donc désormais 93, sièges. L’extrême-droite classique est laminée, la NPD ne faisant que 0,4% des voix (- 0.9 points) et les REP étant simplement absents, la plupart de leurs adhérents ayant rejoint l’AfD.

Avec 10,7% des voix et 80 sièges, le FDP (libéraux) revient en fanfare au Bundestag. Son jeune dirigeant dynamique, Christian Lindner, qui revendique le ministère de l’économie, a su dynamiser son parti sur une ligne libérale et identitaire, limitant sans doute la marge de progression de l’AfD. Il est devenu faiseur de roi et allié indispensable de Merkel. Mais il va certainement négocier très chèrement sa place.

Les Verts (Grünen) avec 8.9% (+0.5 points) des voix et 67 sièges (+4) sortent également renforcés de ce scrutin, au détriment des sociaux-démocrates. Merkel souhaiterait sans doute les associer au pouvoir pour bâtir sa nouvelle coalition, mais les options très à gauche du parti rendent l’alliance avec la FDP et même avec la CSU très hypothétique. Si elle échoue à bâtir ce que la presse appelle une coalition « jamaïque », elle devra se tourner à nouveau vers les urnes, ce qui serait inédit en Allemagne depuis 1933.

Mais le regroupement de partis aux options antagonistes est très aléatoire et surtout sans stabilité. La CSU pourrait choisir de passer dans l’opposition afin de redorer son blason. De même la CDU pourrait être tentée en cours de mandature de faire tomber Merkel et de changer de dirigeant. Son résultat médiocre ne peut que les y inciter, surtout si l’AfD continue d’accroître son audience à droite.

La gauche radicale de « Die Linke » avec 69 sièges (+5) et 9.2% (+ 0.6 points) se maintient à un niveau élevé. Exclue depuis toujours du pouvoir, même à gauche, son rôle sera le même que celui de l’AfD, faire de la figuration. L’AfD néanmoins pourrait, en cas de coalition minoritaire CDU-CSU-FDP, peser sur la politique du gouvernement, comme le fait le DFP au Danemark.

Dans tous les cas, Angela Merkel a en même temps gagné et perdu les élections. Le désaveu est cuisant. Otage de ses alliés potentiels (Verts et FDP) auxquels elle devra beaucoup céder, au point d’irriter son propre parti, son destin ne lui appartient plus vraiment. Elle ne pourra pas non plus donner suite aux propositions de Macron de refonder l’Union Européenne, certes sur des bases pas plus satisfaisantes que les actuelles.

De la diabolisation à droite.

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De « Poujadolf » (à propos de Pierre Poujade) à la fascisation du général De Gaulle, accusé d’un « coup d’état permanent » par Mitterrand, la gauche marxiste a depuis les années 20 et 30 comme habitude d’accuser de « fascisme » tous ses adversaires idéologiques. Elle a employé cet argumentaire dès les années 80 pour contrer l’ascension du Front National, que ce même Mitterrand avait sciemment rendu possible par l’accès offert à son dirigeant sur les plateaux de télévision.

Ce qui est plus surprenant, c’est que cette pratique de diabolisation que Leo Strauss avait appelée « reductio ad hitlerum » a désormais essaimé à droite et avec un certain succès. C’est désormais par l’anathème que les différentes figures de droite veulent « débattre ». Ainsi Gérald Darmanin a-t-il annoncé que la victoire prévisible de Laurent Wauquiez à la tête des Républicains allait amener le parti à la « droite extrême ». De même, le nouveau dirigeant d’UKIP Henry Bolton a-t-il accusé son adversaire identitaire Anne-Marie Waters de vouloir transformer le mouvement en « parti nazi britannique ».

Enfin Florian Philippot, à peine démissionnaire du Front National, accuse le FN de « mégretisme » sous prétexte que certaines figures du parti sont issues de l’ancien MNR de Mégret, mais sont revenues au FN bien avant que lui-même n’y mette les pieds. L’accusation est amusante dans le sens où il imite ainsi Jean-Marie Le Pen qui en 1998 dénonçait dans les partisans de Mégret « des extrémistes et même des racistes ». Il accuse le FN de retourner à ses « vieux démons », donnant donc raison aux partisans de la diabolisation à outrance de ce parti pour l’écarter du pouvoir. En somme, il dit ouvertement qu’il a quitté un parti qui avait été réellement le diable.

Frauke Petry, ancienne dirigeante du mouvement populiste AfD en Allemagne, parti qui vient de réussir une percée électorale avec 12,6%, claque la porte à peine élue, au mépris du respect dû aux électeurs qui ont voté pour elle, afin de dénoncer des attitudes extrémistes chez ses anciens compagnons de combat. Auparavant, elle avait elle-même été diabolisée par Bernd Lücke, l’ancien dirigeant plus europhobe qu’identitaire, quand celui-ci avait été poussé vers la porte.

On pourrait imaginer que des gens qui ont été victimes de la diabolisation à outrance épargneraient à leurs propres adversaires au sein de leur camp d’avoir recours à ces mêmes ficelles dialectiques. Il n’en est rien. Il faut toujours trouver plus extrémiste que soi pour plaire aux media. Ce faisant, on ne sera jamais consensuel parce qu’il y aura toujours quelqu’un pour vous montrer du doigt.

Florian Philippot, grand artisan de la dédiabolisation ratée, en a fait d’ailleurs lui-même récemment les frais. Alors qu’il ne cessait de dénoncer le « néo-extrémisme » au sein de son ancien parti, une journaliste évoqua alors les messages douteux d’un de ses compagnons de route, quand d’autres rappelaient le passé à Terre et Peuple, organisation que Louis Aliot (FN) qualifiera d’extrémiste bien sûr, d’une de ses lieutenantes.

Et si le manichéisme en politique n’était qu’une façon de taire les vrais débats ?

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

17/09/2017

Elections parlementaires en Norvège : victoire à la Pyrrhus de la coalition sortante.

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Fremskrittspartiet_parti_du_progres_norvege.pngAlors que l’Europe entière attend avec impatience le résultat des élections parlementaires en Allemagne, les Norvégiens votaient ce 11 septembre 2017. Il s’agissait pour eux de reconduire ou de renforcer la coalition sortante minoritaire composée des conservateurs du Høyre et des populistes du Parti du Progrès (Fremskrittspartiet ou FP) de Siv Jensen. En face d’eux, les Travaillistes (Arbeiderpartiet) cherchaient à proposer une alternative.

Les électeurs ont finalement choisi la continuité politique, même si certains mécontentements se sont exprimés en faveur de partis minoritaires, centristes ou d’extrême-gauche. Les mouvements d’extrême-droite quant à eux sont marginalisés par le FP et ne présentaient aucune liste.

Avec 27,4% des voix, les Travaillistes (AP) restent le premier parti du pays, comme il l’était aux élections précédentes, avec 27,4% des voix. Néanmoins ils reculent de 3,4 points alors qu’ils sont pourtant dans l’opposition depuis plusieurs années. Avec 49 sièges, ils en perdent 6.

Høyre subit l’usure du pouvoir, n’obtenant que 25% des voix (-1,8 points), de même que le FP qui passe de 16,4% à 15,2%. Le désaveu de la coalition sortante est donc très limité et surtout il ne profite pas à la principale force d’opposition. Høyre disposera de 45 députés (-3) et le FP de 27 députés (-2).

Les centristes du Senterpartiet (« Parti du centre ») sont les principaux bénéficiaires de ce recul des grands partis en obtenant 10,3% des voix et (+4,8 points) et 19 sièges (+9). La Gauche Socialiste (Socialistisk Venstreparti) avec 6% des voix (+1,9) et 11 sièges (+4) progresse également au détriment des Travaillistes. Même chose pour la gauche radicale du Parti Rouge (Rødt) qui obtient 2,4% des voix (+1,3) et son premier siège au parlement. Enfin les Verts conservent leur seul siège, et renforcent leur poids électoral avec 3,2% des voix (+0,4).

Libéraux (Venstre) et chrétiens-démocrates (Kristelig Folkeparti) qui avaient soutenu la coalition sortante sans y participer reculent en revanche, avec 4,4% (-0,8) et 8 sièges (-1) pour les premiers et 4,2% (-1,4) et 8 sièges (-2) pour les seconds. Ce recul n’a manifestement pas profité aux partis de la coalition ou aura simplement diminué leur recul.

Avec 72 voix en tout, la coalition sortante est loin des 85 sièges nécessaires pour disposer d’une majorité. Si les deux partis minoritaires précédemment évoqués apportaient leur soutien, cela ferait en revanche 88 sièges. C’est le cas le plus probable.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

27/08/2017

Le Front National pris dans une aporie insoluble. Constat d'une faillite programmée.

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Front National,Marine Le Pen,échecSi le FN a dédiabolisé son discours, en renonçant en réalité à tout ce qui en faisait la sève, l’édulcorant au point de le rendre semblable à celui de tous les autres partis, il n’a pas démocratisé son mode de fonctionnement interne. Le président du parti, qui est toujours un Le Pen, est indéboulonnable et ne cède sa place que quand il le décide. Il est donc décrété candidat naturel du parti ad vitam aeternam, et en ce sens la présidence de « Marine » est conforme à la présidence de « Jean-Marie ».

La campagne de 2017 a révélé un double échec : échec personnel de Marine Le Pen qui n’a pas été élue présidente, même si elle a été élue député, sans groupe, dans la meilleure circonscription de France pour son parti ; échec de la stratégie politique du Front National, avec ses thèmes souverainistes, à l’instar de l’abandon de l’euro. Aux législatives, le FN a dû se contenter d’un petit 13,2%, loin des 27% obtenus aux élections européennes de 2014. Aux présidentielles, le FN a obtenu 21,3% des voix, soit à peine un point de plus que François Fillon, et 33,9% au second tour. Ce dernier résultat, s’il atteint un record, est néanmoins très inférieur à ce que le parti pouvait espérer.

Contrairement à 2002, le second tour a eu lieu d’une manière classique, le moment clé étant le débat entre les deux finalistes. Emmanuel Macron ne se déroba pas à l’affrontement, même si tactiquement il laissa filtrer la fausse information selon laquelle il quitterait le débat si Marine Le Pen l’y poussait. Les « stratèges » de Marine Le Pen tombèrent dans le piège en la poussant à un discours de rupture et de provocation.

Marine Le Pen n’a pas seulement perdu l’élection et le débat. Dans ce débat, elle a révélé son vrai niveau de compétence ou d’incompétence, selon le fameux principe de Peter. Très bonne candidate quand on lui oppose des anathèmes sans fondement, elle devient médiocre lorsqu’elle est amenée à exposer ce qui lui sert de programme. Elle est parue confuse, déconnectée des enjeux, attaquant son adversaire sur le terrain où celui-ci est le plus fort. Épuisée par une campagne mais aussi par des choix stratégiques absurdes, comme sa visite la veille du débat à un collectif africain où elle a promis 15 milliards d’euros par an pour l’Afrique, alors qu’elle ne cessait de vitupérer contre les 9 milliards d’euros versés chaque année à l’Union Européenne, elle n’avait manifestement pas le niveau. Enfin, ses quelques pas de danse à la fin d’une soirée d’échec électoral, créant une désespérance profonde auprès de ses électeurs, sympathisants et militants, ont accentué le désaveu.

On peut se remettre d’une contre-performance électorale mais pas d’un débat de second tour vu par des millions de Français, dont ses électeurs, où elle a révélé son vrai visage. Car nombreux étaient ceux qui depuis de nombreuses années connaissaient la réalité derrière le masque. Les bons résultats électoraux de ces dernières années avaient envoyé un message trompeur.

La stratégie a été mise en cause et à juste titre, mais changer de stratégie n’est pas aussi simple. Le débat sur l’euro a été mis sous le boisseau, même si Florian Philippot y revient sans cesse, mais le parti reste officiellement opposé à la monnaie unique. Le choix est désormais de ne plus en parler et d’axer le propos sur le rétablissement des frontières nationales. C’est inaudible. Les thèmes identitaires, mis en avant par Bay, et les thèmes souverainistes, mis en avant par Philippot, sont irréconciliables.

Une stratégie est également incarnée. Marine Le Pen a tellement mis en avant une ligne souverainiste qu’il lui est impossible d’y renoncer. Si changement de ligne le FN doit adopter, ce qui ne passe pas nécessairement par un changement de nom, relevant d’une logique cosmétique, il faut un changement de dirigeant, de candidat. Or c’est impossible pour les raisons évoquées préalablement. Marine Le Pen est indéboulonnable, et personne ne s’opposera à elle lors du congrès de 2018, mais elle est gravement démonétisée, et même décrédibilisée par le débat du second tour. Même Florian Philippot reconnaissait, selon un propos rapporté par le Canard Enchaîné dont il niera ensuite la réalité, que Marine Le Pen « était décrédibilisée à jamais ».

Robert Ménard, dans une tribune qui lui a valu les foudres de Florian Philippot, a clairement indiqué la nécessité d’un changement stratégique et d’un changement de direction, espérant l’émergence d’une personnalité nouvelle. Si une telle personne devait émerger, néanmoins, cela ne serait pas au Front National. A moins d’une démission surprise de Marine Le Pen, qui créerait automatiquement une scission en deux, le parti est promis à un déclin plus ou moins long. Or le FN empêche l’émergence d’une nouvelle personnalité, en son sein aussi bien qu’en dehors, car il est encore en position de monopole sur des thèmes identitaires que pourtant il réfute.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

« Habebamus papam » ou comment le pape a abandonné l’Europe.

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1280px-Vatican_3.jpgLe pape François (Jorge Bergoglio) a publié un texte ce lundi 21 août en faveur des migrants, texte qui dépasse de loin toutes ses déclarations antérieures en leur faveur. Ainsi rejette-t-il tous les arguments opposés à l’accueil, exigeant qu’aucune considération de sécurité ou d’économie n’entrave leur arrivée. Il invite à donner la nationalité à leurs enfants s’ils naissent sur le sol européen, de leur permettre d’accéder au travail, même s’il y a des millions de chômeurs dans nos pays, et de conserver leur identité dans son intégrité. Cela fait d’ailleurs plusieurs mois qu’il incite les dirigeants italiens à instaurer le « droit du sol », au grand dam des patriotes italiens. Il invite enfin les Européens à accepter le plus large regroupement familial.

En clair, il invite les Européens à se dépouiller et à céder à une charité totale, même si cela devait amener à leur ruine économique et à la disparition de leur identité millénaire, même chrétienne. Ce serait donc la fin de l’Europe et même de la Chrétienté au nom d’un christianisme extrême dans l’esprit, celui-là même qu’on retrouvait dans l’empire romain au IIème siècle de notre ère. Le mot de Nietzsche concernant la charité, l’amour rendu vicieux, a alors tout son sens.

Quelle est donc la stratégie à l’œuvre au Vatican et que le pape François dévoile sans retenue ? L’analyse de l’Église est de considérer que l’Europe est un continent perdu pour le christianisme, en raison de sa dénatalité, de sa profonde déchristianisation, l’évêque Hippolyte Simon s’étant inquiété il y a un peu moins de deux décennies du renouveau du paganisme en Europe, et des flux migratoires qu’elle subit, notamment en provenance de pays musulmans.

Pourtant, l’Europe est la base du christianisme, sans laquelle elle n’aurait été qu’une des nombreuses religions orientales de l’empire romain. Le pape abandonne l’Europe au nom des pauvres du monde entier, s’appuyant désormais sur l’Amérique du sud, sur l’Afrique où l’Église est en concurrence avec l’islam et l’évangélisme protestant, et sur l’Inde et la Chine si ces dernières échouent à s’opposer à son prosélytisme.

D’un point de vue social, le pape a adopté un discours marxiste prenant la défense systématique des pauvres dans le monde entier, sans aucune pensée pour les Européens en souffrance. La raison en est que, tout comme l’islam, le christianisme a choisi de prendre la défense des « damnés de la terre ». Or, selon cette idéologie, les Européens représentent désormais le mal.

Par ailleurs, le fait que le pape François ait à peine pris la défense des chrétiens d’orient, préférant même ramener à Rome des migrants musulmans, montre qu’il considère que, comme ces communautés, l’Europe n’a plus d’avenir. Le pape anticipe donc la fin de l’Europe sans état d’âme, et prépare déjà l’Église à un monde sans Europe et où elle sera la deuxième religion mondiale après l’islam. Il a donc signé de fait un « pacte de soumission ». Mais en abandonnant sa base, de qui elle doit tout, elle choisit la proie pour l’ombre.

Face à cet abandon de l’Europe à un sort funeste, sans avoir le courage d’un Nicolas V appelant à défendre Constantinople, et face au reniement de la civilisation sans laquelle l’Église ne serait rien, les Européens doivent constater que le christianisme organisé ne leur sera d’aucun secours. Même Philippe de Villiers et Ivan Rioufol doivent constater que le pape « veut punir l’Europe », prônant une « théologie mondialiste mortifère pour l’Europe ».

Les églises orthodoxes, à l’instar du patriarche Kirill, même si elles ne sont pas exemptes de dérives potentielles, étant nationales, elles remplissent leur mission de défense de la communauté nationale. L’église arménienne défend et bénit ceux qui vont se battre au Haut-Karabagh. Est-ce à dire qu’il faudrait une église (orthodoxe) d’Europe ? L’État du Vatican, sauvé une première fois par Napoléon III et une seconde fois par Mussolini, n’a plus de sens à partir du moment où l’Église renonce à l’Europe. Il doit donc être restitué aux Romains, aux Italiens, aux Européens.

Au discours du pape et de l’Église, à l’exception de quelques prélats courageux, en dehors de prôner la renaissance de la civilisation européenne, deux choix se défendent et départageront les Européens. Le premier choix est la mise en avant d’un christianisme identitaire de rupture avec l’universalisme, avec une Eglise nationale d’Europe. Le second choix est le retour aux paganismes indigènes de l’Europe, aux religions natives des Européens avant la christianisation. Des Européens de plus en plus nombreux font ce choix, de l’Islande jusqu’à la Russie. Ils observent notamment ce qui se passe en Inde, où les patriotes hindous, désormais au pouvoir par le biais du parti BJP et de Narendra Modi, s’opposent aux religions universelles avec un certain succès.

Demain l’Europe renaissante saura se souvenir de ceux qui auront pris sa défense et de ceux qui auront pris le parti de l’abandonner. Il est sûr en revanche que paganisme et christianisme identitaires auront joué un rôle décisif dans sa renaissance.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

30/07/2017

La religion des Hellènes.

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Que dire de plus de la religion qui a inspiré tant de génies européens, la Grèce étant par bien des aspects la matrice de l’Europe entière, dont elle tire son nom. Les statues d’Alcamène, de Scopas, de Praxitèle, le Parthénon aussi bien que les Jeux Olympiques, tous n’ont dû leur existence qu’à cette religion.

Le dieu suprême et sans égal est Zeus, le *dyeus indo-européen renforcé des pouvoirs d’un dieu de l’orage sans doute sous l’influence crétoise. A l’origine, il a pour épouse ou parèdre la terre-mère, qui est Gê Mêtêr ou Déméter, cette dernière portant bien d’autres noms comme Héra, « la déesse de la belle saison » ou Dionê, « celle de Zeus », et aux temps mycéniens *Diwiya (forme féminine de Zeus). Déméter était surnommée Europê en Béotie, ce qui nous rappelle qu’avant de désigner une princesse phénicienne ou crétoise, l’Europe désignait la terre-mère par excellence et notre continent en particulier.

Ce sont les poètes qui enrichiront ce panthéon de générations antérieures de figures divines, qui recoupent exactement les fonctions des dieux olympiens. Les titans Hypérion et Phébé ne sont qu’une variation d’Hélios et de Séléné, puis d’Apollon et d’Artémis. Prométhée est Héphaïstos, Japet est Arès. Le triplement du dieu céleste, entre Ouranos, Cronos et Zeus est sans doute lié à la mythologie hourrite. Le nom même d’Ouranos (sanscrit Varuna) a sans doute désigné Zeus aux temps archaïques.

Les fils et filles de Zeus composent ce panthéon, et toutes se retrouvent dès l’époque mycénienne. Il y a ainsi Arès, dieu de la guerre, qui à l’époque ancienne était au premier plan. Même s’il a conservé sa place parmi les douze olympiens, Arès a perdu de sa superbe, sauf chez les Spartiates. Il est possible que sa déchéance ait suivi la chute des palais mycéniens.

Il a surtout été concurrencé dans son rôle par d’autres figures divines, comme Athéna, protectrice des acropoles, comme Héraclès, qui accomplit une série d’exploits associés généralement au dieu orageux (Thor par exemple) et qui devaient initialement être attribués à Arès. Un vieux mythe narre également la capture d’Arès par les géants Aloades et sa libération par Hermès. Cela rappelle la déchéance d’Indra en Inde, pris d’effroi face au démon Vritra, et qui ne retrouva ses forces que par l’intervention du dieu du feu Agni. Enfin, lors des premiers jeux olympiques de la période mythique, avant leur recréation par Héraclès en 776 avant J.C selon la tradition, le dieu Apollon triompha ainsi d’Arès à la boxe et d’Hermès à la course de vitesse.

La déesse de l’aurore est présente sous différentes hypostases dans le panthéon grec. Si Eôs (« Aurore ») a un rôle mineur sous sa forme authentique, sous les traits d’Athéna et d’Aphrodite, son rôle est immense. Athéna, en tant que fille de Zeus, incarne la dimension guerrière et intellectuelle de l’Aurore, tandis qu’Aphrodite est l’Aurore sortie des eaux, qui annonce le printemps et réveille l’amour. Son nom est à rapprocher des Apsaras indiennes, nymphes célestes sorties des eaux et qui peuplent le paradis d’Indra. Le rapprochement avec la déesse ouest-sémitique Ashtoreth est fortuit. Si l’Aphrodite Ourania d’Hésiode s’inspire de cette déesse, il existe chez Homère une autre Aphrodite, fille de Zeus et de Dioné.

L’Aurore était à l’origine l’épouse d’Arès et d’ailleurs Athéna et Aphrodite sont parfois qualifiées d’Areia (« d’Arès »). La déesse Eôs elle-même est connue comme l’une des amantes d’Arès, suscitant la jalousie d’Aphrodite.

Héphaïstos est le dieu du feu et de la forge. Son rôle est très limité même si à l’origine il représentait le feu en général. Hestia est une timide déesse du foyer, limitée à son rôle originel, tout comme la Vesta romaine.

Zeus aura de nombreuses autres liaisons, aboutissant à la naissance de nouveaux dieux et de héros, comme Hermès (fils de Maia), le messager des dieux, Apollon et Artémis (enfants de Léto) et les Dioscures (enfants de Léda). Il faut notre rue Léto était une ancienne déesse de la nuit, comme Nyx, et son nom est identique à celui de la déesse indienne de la nuit Ratri. Léda de son côté était une déesse du désir, son équivalente indienne de même étymologie étant Rati. On la retrouve aussi sous les traits de la déesse slave Lada, épouse de Svarog. Léda était aussi la mère d’Hélène dont le nom signifierait « vengeance divine », tout comme les Erinyes, ce qui expliquerait son rôle essentiel dans le déclanchement de la guerre de Troie. Enfin, le nom d’Artémis rappelle celui de l’ours (*arktos) et désigne la déesse de la chasse. On retrouve son équivalente celte sous les traits de la déesse Artio.

Les frères de Zeus, avec qui il a partagé le monde entre ciel, terre et enfers, sont Poséidon et Hadès. Poséidon n’est pas « l’époux de la terre » selon une étymologie populaire mais « le maître des eaux », ce qui en fera ensuite naturellement le dieu de la mer. Hadès signifie « l’invisible » selon une étymologie proposée par les Grecs anciens eux-mêmes. Son nom véritable est devenu tabou, mais il est probable que la forme poétique Aidoneus ait été son théonyme originel.

Le personnage de Minôs, roi de Crète et qui deviendra juge infernal, fait indiscutablement penser à *Manus, le premier homme selon la mythologie indo-européenne (Manu en Inde, Mannus chez les Germains). Il était peut-être le premier dieu infernal aux temps de la Grèce mycénienne. Cerbère qui garde la porte des Enfers est l’héritier direct du chien infernal indo-européen (sanscrit Sarvaras, scandinave Garmr).

Hermès et Pan désignaient à l’origine la même divinité, préposée à l’élevage mais aussi conducteur des morts, dieu messager et dieu guide. Pan est le *Pauson indo-européen (sanscrit Pushan, lituanien Puskaitis, latin Faunus), que les Celtes appelleront Cernunnos et les Slaves Volos. Hermès, dont le nom fait penser au dieu messager scandinave Hermod, ne devait à l’origine qu’être un aspect spécifique de Pan. Tout comme le dieu Terminus à Rome, Hermès était associé aux frontières, voies et limites de propriété.

La religion des Grecs anciens, depuis l’époque mycénienne jusqu’à nos jours, n’a jamais cessé d’inspirer le génie européen. Le christianisme n’a jamais pu effacer de nos mémoires ces grandes figures, qui survécurent au moyen-âge (lire pour s’en convaincre « La survivance des dieux antiques » de Jean Seznec) et inspirèrent la Renaissance. Il suffit de songer aux œuvres de Rabelais, de Ronsard ou des poètes du Parnasse pour constater que l’antique foi, réfugiée dans les arts et la poésie, a survécu. Et de nos jours des Grecs entendent la rétablir, l’Olympe entendant à nouveau des chants en faveur de ses hôtes après des siècles de silence.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

29/07/2017

La religion des Latins.

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Religio Romana,romanitas,Jupiter,Mars,latinsLa religion indigène des peuples italiques, du nom de Vitalie, le pays des troupeaux de veaux (latin vitulus), avant toute influence grecque (directe ou par le biais des Étrusques), se compose de grandes figures divines d’origine indo-européenne, l’Italie étant avec la Lituanie un véritable conservatoire de cette tradition ancestrale.

Le dieu suprême est Dius Pater, que les Romains appelleront par la suite Jupiter (Iuppiter, du vocatif [d]-iu), qui est le « ciel de jour père », l’homologue du grec Zeus Patêr et de l’indien Dyaus Pitar. Jupiter Latiaris était le dieu protecteur de l’ensemble du Latium, tandis que le sanctuaire de Jupiter Feretrius accueillait les dépouilles des ennemis vaincus. Selon la tradition, néanmoins, une divinité était plus ancienne encore que Jupiter, à savoir le dieu Janus, dieu des commencements et des fins, dieu qui ouvre et ferme les portes du ciel, qui sera ensuite repris par les chrétiens sous la forme de Saint Pierre, qui ouvre et ferme les portes du paradis. Janus était une sorte de démiurge et il fut même repris par les Etrusques sous le nom d’Ani. Le Jupiter originel était dieu du ciel mais probablement pas le dieu de l’orage, une fonction (Jupiter Tonans) qu’il se verra ensuite attribuée sous l’influence du Zeus grec et du Tinia étrusque.

Le dieu Mars (de l’indo-européen *Maworts, dieu de l’orage) était en effet le dieu de l’orage, et pas seulement de la guerre, avant que le modèle de l’Arès grec (et du Laran étrusque) ne le contamine. Dans les mythes, ce rôle ancestral transparaît encore. C’est ainsi que lors d’un orage Mars enlèvera son fils Romulus pour en faire un dieu. Mars est le dieu fondateur de Rome, par le biais de ses enfants, les jumeaux divins Romulus et Rémus, enfants qu’il aura de la déesse Ilia, qui deviendra ensuite la vestale Silvia dans le mythe romain classique. Il est accompagné des déesses Nerio et Bellone (« divinité de la guerre ») sur le champ de bataille et semble avoir eu pour épouse Minerve, avant qu’elle ne devienne la version latine de la vierge Athéna, hypostase de l’Aurore guerrière, connue aussi sous les noms d’Aurora et de Mater Matuta (« la mère des matins »). Minerve et Venus sont d’ailleurs deux aspects de l’Aurore, comme Athéna et Aphrodite l’étaient aussi en Grèce.

La déesse Venus, dont le nom signifie « désir » (sanscrit vanas), incarne la dimension amoureuse de la déesse de l’aurore, même si les Romains la doteront aussi de fonctions guerrières. Il est tout à fait possible qu’elle ait été l’épouse de Mars, dans la tradition latine originelle, indépendamment du mythe grec des amours d’Arès et d’Aphrodite. C’est Venus Cloacina (« purificatrice ») qui selon le mythe légitimera le mariage des premiers Romains avec les filles des Sabins. En 416 de notre ère, le poète Rutilius Namatianus dira d’ailleurs de Rome qu’elle a « pour auteurs (…) Venus et Mars, la mère d’Enée et le père de Romulus ».

La déesse Flora, dont le culte était bien supérieur à celui de la Chloris grecque, de même origine indo-européenne, représentait quant à elle les aspects les plus licencieux de la déesse de l’amour. La fête des Floralies était connue pour la légèreté des mœurs de certains Romains à cette occasion.

Avant que les Grecs n’apportent leurs divinités, Apollon, Esculape et Hercule n’étant que des divinités importées en Italie, le dieu Neptune n’était que le dieu des eaux en général et pas spécialement le dieu de la mer, et le dieu Vulcain était non seulement un dieu forgeron mais le dieu du feu dans toutes ses dimensions. La déesse Vesta, analogue à l’Hestia grecque, était à peine représentée.

Jupiter lui-même avait comme épouse Tellus, la déesse de la terre, dont Junon incarnait l’aspect printanier (la « belle saison »). Tellus étant ensuite associée à Gaia, les Latins firent de Cérès, divinité agraire mineure, l’équivalente de Déméter.

Le dieu des morts était Orcus, qui a donné en français les mots « orc » et « ogre », qui désignait à la fois le monde infernal et le dieu qui en avait la garde. Sous l’influence de l’Hadès grec, il devint « le riche », Pluton en grec et Dis Pater (diues pater, le "père riche") en latin. Liber Pater devint Dionysos, Saturne (dieu solaire proche du Savitar indien) devint Cronos, Ops (déesse des céréales) devint Rhéa. La déesse Perséphone, épouse d’Hadès, fut latinisée en Proserpine. Le dieu étrusque Voltumna devint Vertumnus, dieu du printemps et compagnon de Pomone, déesse des arbres fruitiers.

Certes certaines divinités correspondaient parfaitement en raison de leur même origine indo-européenne, comme Cupidon et Erôs, comme Juventas (la jeunesse) et Hébé, comme Lucina (déesse des accouchements) et Ilithye. Mais souvent la comparaison était forcée. D’autres furent sans doute créées de toutes pièces, comme Mercure pour correspondre à Hermès.

Il y avait enfin la cohorte de dieux mineurs, comme le dieu Vaticanus, en charge des premiers cris du nouveau-né, ou comme le dieu Robigus, protecteur du blé contre la rouille. D’autres divinités italiques furent aussi adoptées par les Latins, comme Mefitis, déesse des émanations toxiques.

Les divinités astrales, Sol Indiges (le soleil « indigène ») et Luna bénéficiaient aussi d’un culte latin intense, avant qu’Apollon et qu’Artémis ne ternissent leur éclat. Diane, déesse des clairières, devint même déesse romaine de la chasse.

Enfin survécurent des divinités latines inclassables, comme Dea Dia, qui était sans doute la terre-mère en tant que parèdre de Jupiter, et qui n’aurait pu alors correspondre en Grèce qu’à la déesse mycénienne Diwiya, qui n’avait pas survécu aux âges obscurs, ou encore Silvanus, dieu des forêts, et Salacia, déesse des eaux salées, qui étrangement ne fut pas assimilée à l’Amphitrite grecque. En revanche, Faunus, qui était le Pan latin, fut bien sûr relié naturellement au fils d’Hermès, mais il n’était pas seulement le dieu de l’élevage mais aussi, tout comme le Cernunnos gaulois, dieu des animaux sauvages. Son culte résista donc partiellement à l’hellénisation.

Alors que les Latins et en tout cas les Romains possédaient leur paire de jumeaux divins, Romulus et Remus, la légende de la louve faisant de ces derniers des héros, certes fils de Mars mais pas dieux eux-mêmes, amena les Romains à chercher d’autres jumeaux divins. Ainsi les Dioscures Castor et Pollux furent-ils attirés à Rome et bénéficièrent d’un temple dédié.

La Religio Romana cherche désormais dans une Italie en plein doute identitaire, au sein d’une Europe qui doute elle-même, à ranimer l’antique foi italique, en héritant aussi de la Renaissance et du Romantisme. Le R de romanitas aura encore un avenir, même sur les terres du Vatican, ancien sanctuaire païen. Et Santa Minerva, la sainte du Panthéon devenu église, alors reprendra son casque et sa lance.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

La religion des Scandinaves.

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thors-hammer-mjolnir-car-sticker-hammer-decal.jpgDisposant désormais en Islande, au Danemark et en Norvège d’un statut légal, le polythéisme germano-scandinave sous la forme du mouvement Asatru (« foi envers les dieux Ases ») ou Forn Siðr (« la coutume ancienne ») est de retour. Mais les sources qui nous permettent de le connaître datent toutes de l’époque chrétienne, à l’exception des inscriptions runiques.

Snorri Sturluson, auteur de l’Edda, était lui-même chrétien et on peut penser notamment que le Ragnarök ou « destin des puissances » était une façon pour le poète de donner une belle mort à ses dieux. La satanisation de Loki et le retour de Balder, assimilé au Hvati Krist ("le blanc Christ"), tout comme le christianisme antique avait récupéré la figure d’Apollon, étaient une façon d’évoquer la victoire de la religion nouvelle. Le combat de Thor contre le serpent de Midgard, lors d’une pêche miraculeuse, est alors répété en fin de cycle, se soldant cette fois par la mort des deux adversaires.

La religion scandinave, analogue à sa version germanique continental dans les grands traits, mais connue sous une forme ultérieure de plusieurs siècles, considérablement enrichie, indique un éloignement des dieux des fonctions élémentaires qui étaient les leurs. Vintr (« le vent »), Vörnir (qui serait la forme scandinave d’Ouranos), Fjorgyn (ancien dieu de l’orage), Logi (« le feu »), Aegir (« l’eau ») tout comme Jörd (« la terre »), mère de Thor, sont devenus des géants et ont cessé d’être des dieux (tivar). De la même façon, le Soleil (Sól) et la Lune (Mani), divinités positives, ne font pas partie des dieux, aussi bien Ases que Vanes. De même, la déesse de l’aurore et du printemps, Ostara ou Eostre, est-elle-même marginale. Enfin, le royaume des morts est confié à la cruelle Hel, fille de Loki.

Le dieu suprême des Germains était Tius (proto-germanique *Tiwaz) dont le nom (ainsi que celui de sa parèdre Zisa, sous forme féminine) était analogue au Zeus grec (et à son épouse primitive Dioné). Sous les traits de Tyr, il n’est plus que le dieu de la guerre juste, un dieu qui a sacrifié son bras, tout comme le dieu celtique Nuada, pour maîtriser le loup-dragon Fenrir. La perte de ce bras indique symboliquement la déchéance dans le panthéon d’un dieu fondamental.

Tius/Tyr a été victime en effet de l’ascension du dieu Wotan/Oðinn (proto-germanique *Woðanaz), dont le nom signifie « le furieux » (norrois oðr, « fureur »), assimilé par les Romains au dieu Mercure, mais qui est devenu le dieu suprême et le roi des Ases (Aesir) ou "dieux célestes". A l’origine, il semble toutefois que ce dieu n’ait été que l’un des aspects du dieu de l’orage en tant que dieu de la fureur guerrière, tout comme Rudra était l’aspect furieux d’Indra dans l’Inde védique.

Le dieu le plus populaire des peuples germano-scandinaves était en effet Donar/Þórr (proto-germanique *Þunraz), dieu porteur du marteau de foudre (Mjóllnir), dieu de l’héroïsme individuel et non des armées. Les Romains l’ont interprété comme équivalent de Jupiter ou d’Hercule. En Germanie, l’arbre sacré Irminsul, que fit abattre Charlemagne, était consacré à Donar. Le nom d’Irmin, divinité indépendante à l’origine, est d’ailleurs à rapprocher du celte Eremon mais aussi de l’iranien Airyaman (moyen-perse Ērmān) et de l’indien Aryaman, ce qui en fait un dieu protecteur du peuple.

Les dieux vanes, divinités des désirs terrestres (le mot vane vient de la racine *wen- « désir » comme dans le nom de Venus), vaincus puis associés aux dieux Ases (les divinités du ciel), étaient Freyr, (Dionysos), Freyja (Aphrodite) et les jumeaux Njordhr et Skadi (Artémis), le premier comme dieu de la navigation et la seconde comme déesse de la chasse.

L’épouse d’Odhinn, Frigg, et la déesse de l’amour Freyja, seraient de même étymologie, à rapprocher du sanscrit priya, « chérie ». Frigg est la déesse de l’amour matrimonial alors que Freyja est la déesse de l’amour libre.

Parmi les autres dieux principaux du panthéon germano-scandinave, il y a Heimdall, gardien du pont Bifrost (arc-en-ciel) qui relie Asgard, le royaume des dieux, au monde des hommes (Midgard). Loki, intermédiaire entre Héphaïstos - il bâtira Asgard comme ce dernier a bâti l’Olympe - et Hermès en tant que dieu manipulateur (« trickster »), est une divinité ambiguë, généralement positive, sauf lors de Ragnarök dans lequel il joue un rôle détestable. Il y a aussi Balder, qui est l’Apollon scandinave, et dont la racine est peut-être la même que celle du dieu celte Belenos, *bel- signifiant alors « le fort ». Balder est aussi un dieu qui selon Snorri Sturluson meure et renaît, mais il faut sans doute y voir une interpolation chrétienne. Il y a aussi Hermod, le dieu messager et conducteur des morts, dont le nom est proche, comme les fonctions d’ailleurs, d’Hermès.

D’autres divinités, qu’on retrouve dans le monde gréco-romain, sont davantage allégoriques, comme la déesse Iðunn (latin Juventas, « la jeunesse »), gardienne des pommes d’or de l’éternelle jeunesse, ou le dieu de l’amour Ing (sanscrit Kama, celte Angus). Le dieu forgeron, distinct de Loki, est Völundr (germanique Wieland), qu’il faut peut-être rapprocher du Vulcain latin. En l’absence de dieu de la médecine, Eir est néanmoins la déesse de la santé.

Il y a enfin de multiples déesses dont le rôle nous échappe, comme Gefjon, qui serait peut-être la déesse du foyer (comme la lituanienne Gabija), ou encore Syn, dont le nom pourrait être rapproché de la Thémis grecque et qui serait alors la déesse scandinave de la justice. Le destin lui-même est incarné par trois déesses, les Nornes, variante scandinave des Moires grecques. Ce destin est appelé Wyrd, de même sens et racine que le latin Fortuna.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

La religion des Slaves.

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rodno.JPGLes Slaves n’ont pas laissé de textes sacrés décrivant leur religion ancestrale, qui a été davantage conservée par le folklore et par des compilateurs chrétiens. Ainsi, par rapport aux religions antiques et à la tradition germano-scandinave, leur religion est-elle bien moins connue, tout comme celle des Celtes par ailleurs et pour des raisons analogues.

Il n’y a pas de Jupiter slave. Tout comme chez les Celtes et les Germains, la figure ancestrale du *dyeus *pater (ciel-père) a disparu ou a été relégué au second plan (le dieu Tyr chez les Scandinaves, limité à être un dieu de la guerre). Lugh et Odhinn l’ont remplacé et chez les Slaves, c’est Svarog. Son nom est à rapprocher du mot sanscrit svarga qui signifie « ciel » mais les Slaves le rapprochent davantage d’un dieu forgeron. Svarog pourtant porte d’autres noms, comme Rod, « l’ancêtre », et comme Diy (c’est-à-dire Zeus), ce qui le relie bien au maître de l’Olympe, même s’il ne dispose pas de la fonction de dieu de l’orage, comme en est privé aussi bien Dyaus Pitar en Inde. Svarog est le roi des dieux et le père d’Ogon’, le dieu du feu, appelé généralement par son surnom Svarojitch (« fis de Svarog »). Sous le nom de Sventovit, Svarog est le dieu principal des Polanes, futurs polonais, qui l’honoraient dans son sanctuaire d’Arkona (Rügen).

Le dieu Perun (polonais Piorun), maître de l’orage et dieu de la guerre, est le dieu principal des Ruthènes (ancêtres des Russes et des Ukrainiens) et a relégué Svarog au second plan. C’est lui le roi des autres dieux, le dieu protecteur des princes de la Rus’ de Kiev. Il est souvent accompagné du dieu Volos, dieu des troupeaux mais aussi conducteur des morts et dieu sage. Volos est l’équivalent d’Hermès ou du Cernunnos gaulois. A la différence de son voisin balte Velnias, Volos est un dieu essentiellement positif qui accompagne Perun dans ses aventures. Sous le nom de Saint Basile, il conservera un culte important auprès des populations paysannes. En outre, Volos est le dieu qui protège les prêtres, les volhvy, les druides slaves. Perun quant à lui sera rebaptisé Saint-Elie (Ilya) au moment de la christianisation.

La terre-mère des Slaves est Mat’ Zemlija, également appelée Mokosh’. Le panthéon des Slaves possède en effet d’importantes déesses comme Lada, déesse de l’amour et épouse de Svarog, et surtout comme Zarya, la déesse de l’aurore, dont les aspects guerriers comme l’Athéna grecque dominent. Les Parques slaves sont les Rojanitsy, appelés Siudice chez les Slaves de l’ouest. Il existerait un dieu du vent du nom de Stribog, même si certains analystes pensent que ce n’est qu’un autre nom pour Svarog.

Parmi les dieux slaves, l’un est également très populaire, c’est le dieu du soleil (solntse), qui est appelé Khors quand il désigne l’astre lui-même, nom qui indique une origine iranienne, mais plus généralement Dazbog, « le dieu qui donne », et qui a les traits de l’Apollon grec. Ce dieu était si populaire que les chrétiens en firent en Serbie le nom du diable (« dabog »). La déesse de la lune est Messiatz, qui lorsqu’elle est de sexe masculin (sous l’influence balte) joue le rôle d’un dieu guerrier. Enfin, une déesse de la chasse du nom de Dziewona, honorée uniquement chez les Slaves de l’ouest, rappelle étrangement la Diane romaine.

Le monde slave est divisé en trois univers, que sont Prav (« le monde des dieux » où règne la vérité), Yav (« le monde des hommes ») et Nav (« le monde des morts »), ce dernier ayant pour roi Volos ou l’étrange Vyi. C’est au sein de Prav que se situe le paradis païen (Iriy ou Ирий) réservé aux héros (comme Elysion) et aux vertueux. Les héros sont appelés « bogatyri » (богатыри) ou « guerriers divins ».

La religion slave "ancienne" est en pleine renaissance en ce XXIème, et notamment en Russie et en Pologne. C'est une foi qui entend réconcilier Ukrainiens et Russes aujourd'hui divisés. Elle est la "foi native", en russe la Rodnoverie (родноверие), en polonais la Rodzima Wiara. 2,5% des Russes selon une statistique de 2016 s'en réclament.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

La religion des Lettons.

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Lettonie,paganisme,DievturibaSi les Lituaniens sont restés les derniers païens d’Europe, leurs voisins lettons ont en revanche subi une violente christianisation et germanisation, sans négliger des influences lives (un peuple finno-ougrien qui habitait le nord-ouest de la Lettonie). Le polythéisme letton est donc à la fois proche et distinct du polythéisme lituanien, même si les grandes figures divines sont communes.

Le dieu du ciel est Dievs, que certains groupes païens modernes, comme le mouvement Dievturiba, présentent (à tort) comme un dieu unique dont les autres dieux ne seraient que des aspects spécifiques. La divinité la plus populaire est néanmoins le dieu de l’orage Perkons, associé à la couleur rouge et aux fonctions guerrières.

Saulè (« la » Soleil) et Meness (« le » Lune) sont également des divinités de premier plan et par une étrange inversion, l’Aurore est une divinité masculine chez les Lettons, Auseklis. Les fils de Dievs, les Dieva Deli, sont les jumeaux divins de la mythologie indo-européenne, comme les Asviniai lituaniens et les Asvins indiens, et comme les Dioscures grecs. Ce sont des dieux cavaliers, de même que Castor et Polydeucès, qui guident les voyageurs. Ces deux frères sont nommés en Lettonie Usins et Martins, derrière lesquels il faut sans doute reconnaître une divinité de l’aurore et le dieu de la guerre letton (homologue de Mars). Enfin Jānis, tout comme le Janus romain, est le dieu des commencements mais aussi des portes.

Le dieu Velns (lituanien Velnias), dieu guide aux traits manipulateurs qui rappellent Loki, et dont le nom sera donné au diable lors de la christianisation, s’oppose constamment à Perkons.

La principale innovation des Lettons, c’est l’existence de nombreuses déesses-mères en charge des éléments de la nature, autour de la principale, la terre-mère, Zemes Mate (lituanienne Zemyna), qui dans le paganisme letton tardif n’est plus l’épouse de Dievs. Il y a donc Veja Mate, déesse du vent, Udens Mate, déesse des eaux, Ziedu Mate, déesse des fleurs, mais aussi Velu Mate, la déesse des morts, qui remplace le Pikulis lituanien dans ce rôle. Il y ainsi en tout 27 « mères » (mates) qui assurent la maîtrise des éléments.

Les dieux habitent sur une montagne céleste, le Debeskalns, qui est relié au monde des hommes par l’arbre cosmique (« austras koks » ou « arbre de l’aurore »).

La christianisation, antérieure de près de deux siècles à celle de la Lituanie, a davantage altéré les sources historiques permettant de comprendre la religion indigène lettone, mais les différences mineures avec sa version lituanienne permettent de la reconstituer aisément.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

La religion des Irlandais.

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druidisme,La religion de l’ancienne Irlande est analogue en esprit à la religion gauloise mais avec un demi-millénaire d’évolution, ce qui l’a modifiée de manière significative. Néanmoins en comparant les figures irlandaises, et dans une moindre mesure galloise, avec les noms retrouvés sur les inscriptions gauloises et gallo-romaines, on peut retrouver le panthéon originel des anciens Celtes. L’Irlande, qui a échappé à la conquête romaine mais pas à la christianisation, a ainsi pu sauver la tradition celtique.

Le dieu gaulois Taranis (ou Taranus), devenu le pâle Taran au Pays de Galles et le sombre Taranaich en Ecosse, a quasiment disparu du panthéon irlandais, se limitant au rôle de dieu secondaire sous le nom de Tuireann. Néanmoins certains spécialistes pensent que le Daghda (« bon dieu ») avec sa massue n’est autre que la forme ultérieure de Taranis. En tant que père des dieux, son rôle est évidemment essentiel, aux côtés de son épouse Dana, la terre-mère (racine indo-européenne *dhghom). Les dieux en général sont d’ailleurs appelés « Tuatha De Danann » (tribu de la déesse Dana) aussi bien que « Tuatha Dé » (tribu des dieux).

Lugh, le dieu à la lance, qui selon la tradition est accompagné de deux corbeaux blancs et de deux loups, comme Odin chez les Scandinaves, demeure le grand dieu souverain des Irlandais, comme l’était Lugus en Gaule et Lleu au Pays de Galles. Son nom signifie sans doute « le lumineux » et, bien que les Romains l’aient associé à Mercure, il est sans doute le véritable Jupiter celte, la fonction de dieu de l’orage étant resté dévolu à un dieu spécifique, Taranis donc, qui est l’équivalent du Thor/Donar germanique.

Plusieurs dieux guerriers sont également honorés en Irlande, comme Neit (gaulois Neto), le dieu spécifique de la guerre, et Cumal (gaulois Camulos), mais c’est le dieu héroïque Ogma (gaulois Ogmios), qui est également un dieu de la magie et de l’éloquence, qui jouit d’un rôle prépondérant.

La déesse de l’aurore est également, tout comme l’Athéna grecque, une déesse guerrière, que ce soit sous son nom de Brighid (« celle qui est élevée ») ou sous sa variante Morrigain ou sous sa forme naturelle Eithne. C’est la Brigantia des Gaulois et la Bride des Gallois. Elle fut par la suite remplacée à l’époque chrétienne par « Sainte Brigitte », une figure imaginaire de circonstance.

Autre roi des dieux, car il semble que le pouvoir suprême en Irlande n’ait pas été réservé à un seul dieu, est Nuada (gaulois Nodons), dont la particularité est de posséder un bras en argent, ce qui rappelle le dieu scandinave Tyr (germanique Tius), devenu manchot, et une épée.

Nechtan est le Neptune celte, mais comme le Neptune romain préhellénique, il est avant tout un dieu des eaux, alors que la fonction de dieu des mers est dévolue à Lir et à son fils Manannan. Le dieu forgeron est Goibniu (gallois Govannon, gaulois Gobenios). Le dieu médecin est Diancecht. Le panthéon irlandais correspond donc à une tribu où chacun a un rôle bien précis.

A la différence d’autres polythéismes, le monde des dieux est souterrain (sidh) au même titre que le royaume des enfers dirigé par le dieu Midir (gaulois Meduris). C’est une spécificité irlandaise car chez le Gaulois, les dieux vivaient dans le ciel (dans l’Albiom) et les héros sur une île de pommiers (Avallach Ynis, « Avalon ») qui rappelle le jardin des Hespérides ou Elysion.

Dans le panthéon celte, soleil et lune n’ont qu’un rôle extrêmement marginal. Le dieu Beli (gaulois Belenos) est un dieu solaire assimilable à Apollon et à Balder, mais n’est pas le dieu du soleil, qui en Irlande est Grian (gaulois Grannos). La lune (en gaélique) est Ghealach, au rôle inexistant.

Enfin, deux divinités incarnent l’amour en Irlande. Il y a en premier lieu la déesse Aine, dont le nom est probablement de même étymologie que la déesse romaine Venus, « le désir ». Il y a en second lieu le dieu Oengus (écossais Angus), qui est explicitement un dieu de l’amour et de la jeunesse. Son nom peut provenir de l’indo-européen *kangos, « amour », avec chute de la consonne initiale, racine qu’on retrouve en sanscrit dans le nom du Cupidon indien, le dieu Kama. Son homologue germano-scandinave pourrait être le mystérieux dieu Ing.

L’Irlande païenne a donc conservé l’essentiel des figures divines qu’on retrouve en Gaule et en Bretagne du temps de l’occupation romaine. Mais leur mythologie s’est considérablement enrichie et a engendré une littérature féconde. Des dieux gaulois, dont on ne connaissait que le nom, prennent alors un tout autre relief. Ils n’étaient plus que des épiclèses locales de dieux romains. Jupiter (Taranis), Mercure (Lugus), Mars (Camulos), Minerve (Brigantia) et Apollon (Belenos) s’imposèrent donc, et les druides se reconvertirent en flamines. Ogmios devint l’Hercule gaulois, selon une légende ancienne selon laquelle Héraclès aurait conquis l’occident tandis que Dionysos aurait conquis l’orient.

Mais Lugh, le dieu des druides, a conservé en Eriu, que les Romains appelaient Hibernie et dont la conquête leur semblait inutile, la première place. Et si en Ulster on se dispute entre factions de la même religion nouvelle, l’esprit des Tuatha De Danann pourra ramener la paix, quand un grand roi (Ardri) les honorera à nouveau à Tara et que le draiocht (druidisme) aura été rétabli.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

13:10 Publié dans Analyses, Religion | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : druidisme |

28/07/2017

La religion des Finlandais.

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suome.jpgDepuis 2014, le mouvement Suomenusko (« foi finnoise ») qui incarne la renaissance païenne en Finlande est reconnu comme une religion à part entière. Il est issu du mouvement Ukonusko (« foi en Ukko ») qui avait émergé dans les années 20 et 30 et inspiré notamment certains courants du mouvement patriotique.

La religion des anciens Finnois n’est pas indo-européenne, mais tout comme celle des Estoniens et des Hongrois, elle est ouralienne. Toutefois, cette spécificité mise de côté, elle ne diffère pas spécialement des autres religions européennes, son aspect rustique et forestier étant néanmoins plus marqué. Il a également inspiré J.R.R Tolkien pour créer son panthéon (les dieux Valar qui habitent à Valinor) qui sert de cadre spirituel au Seigneur des Anneaux.

L’univers selon les Finnois se partage en des mondes associés à une divinité principale. Il y a Jumala, le royaume des cieux, dirigé par le dieu Juma, qui est parfois appelé du nom de son royaume, et c’est ainsi que Jumala a même fini par désigner le dieu chrétien. Juma ou Jumala est un dieu éloigné du monde des hommes ; on ne lui connait a priori aucune épouse divine.

Les tâches réelles de chef/roi des dieux sont exercées par le dieu Ukko (estonien Uku) dont les fidèles portent le marteau en médaillon, à l’instar des Scandinaves en l’honneur de Thor. Il n’y a pas d’équivalent d’Odin en revanche chez les Finnois.  Le dieu scandinave Tyr quant à lui serait devenu le dieu de la guerre Turisas des anciens Finnois, mais c’est une hypothèse encore controversée. Ukko est clairement assimilé à Thor, et les Estoniens n’hésiteront pas à appeler leur équivalent Uku du nom de Taara.

En tant que dieu de l’orage, davantage que comme dieu du ciel, Ukko a pour épouse Rauni, qui est une déesse chtonienne. Il est difficile de savoir si la déesse Maaemo, qui est la terre-mère, est aussi Rauni ou s’il s’agit en réalité de l’épouse de Jumala. Ukko a notamment pour enfant Panu, le dieu du feu, surnommé l’épée d’Ukko.

Soleil et lune sont des divinités masculines chez les Finnois, même si l’un comme l’autre ont des filles qui assument avec eux leur rôle céleste. Paiva (le soleil) a ainsi pour fille Paivatar, déesse du jour, de même que Kuu (la lune) a pour fille Kuutar, déesse de la nuit. Enfin Koitto serait le dieu de l’aurore. On le voit, dans ce panthéon, ces trois figures traditionnelles sont toutes masculines. Enfin Tuletar est la déesse des vents, fille de Tulli, le dieu du vent en général.

En dehors du monde céleste (Jumala), il y a le monde des eaux (Ahtola) et le monde des enfers (Tuonela). On retrouve là encore la même trinité que pour les fils de Cronos dans la mythologie grecque, avec Zeus, Poséidon et Hadès. Ahto est le dieu de la mer quand Tuoni est le dieu de la mort. L’un comme l’autre gouverne son royaume, avec épouses et enfants. Ilmarinen, associé à l’air (ilma), serait enfin le dieu forgeron des anciens Finnois et un personnage essentiel du Kalevala, ce recueil moderne des récits anciens.

Le panthéon finnois est également très proche du panthéon estonien voisin, autour du dieu céleste Jumal et du dieu de l’orage Uku. La lune demeure Kuu et le soleil est désormais féminin et porte le nom de Païke, tandis que l’aurore est le dieu Koit et est l’époux de la déesse du crépuscule Hämarik. Le vent est formé par un couple, le dieu Tuueleisa e la déesse Tuule-Em. La terre-mère en Estonie est Maaemä. Tooni, tout comme Tuoni en Finlande, est le gardien des morts, mais il n’existe pas de dieu des eaux. Ce rôle est dévolu à la déesse Veteema, « la mère des eaux », ce qui peut s’expliquer par une influence lettone, ces derniers ayant dévolu à diverses déesses, des mères (« mate »), un rôle spécifique attribué aux vents, aux forêts, aux eaux et même aux morts.

L’existence à côté de différences marginales des mêmes figures divines en atteste l’ancienneté, de même que la proximité entre Finlandais et Estoniens. Ces peuples ont également été influencés par leurs voisins, avec introduction du culte de Thor ou même du Perkons balte (Perkele est un des surnoms d’Ukko en Finlande).

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens).

La religion des Albanais.

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vargmal.pngL’Albanie contemporaine est très divisée sur le plan religieux entre chrétiens (orthodoxes, catholiques et évangélistes) et musulmans (orthodoxes et bektashi) alors que la majorité de la population, surtout parmi les jeunes Albanais, est athée. Mais dans l’antiquité, les Albanais disposaient de leur religion native, influencée par l’environnement grec et latin. Ils furent soumis pendant des siècles à Rome, au point où Merkur (Mercure) et Mart (Mars) sont devenus des divinités albanaises. Avec la Grèce voisine, des emprunts eurent également lieu, comme le culte d’Afërdita (Aphrodite).

La religion indigène des Albanais avant leur christianisation tardive reposait sur un grand dieu du ciel, assimilé au Zeus grec et au Jupiter latin, un dieu qui portait différents noms, comme En (« Zên ») ou Zoti (« Zeus »). Le nom d’En, avec probable chute d’un d ou d’un z à l’initial, semble bien le nom originel du dieu suprême albanais. Zoti a servi par la suite à désigner le nom du dieu chrétien, au même titre que Perëndi.

Perëndi est en effet le dieu principal du panthéon albanais, largement comparable au dieu de l’orage du monde slave Perun, d’où il tire peut-être son nom, même s’il dispose aussi de fonctions guerrières. Son nom a également servi à désigner le Dieu chrétien et le mot « dieu » est en effet perëndi. Il a pour épouse la déesse Prenda ou Premta, qui a donné son nom au vendredi (ë premtë), la déesse de l’amour. En ce sens, Perëndi est davantage comparable au Mars romain qu’à Jupiter, même s’il est un dieu tonnant.

D’autres divinités rappellent les liens anciens entre l’Albanie, la Grèce et Rome. La terre-mère est ainsi Dhe Motë, soit la déesse Déméter elle-même, dont le culte en Grèce viendrait peut-être de l’ancienne Epire, à moins que ce ne soit que l’expression d’une même parenté indo-européenne. Elle est également surnommée Bukura (« la belle »). De même la déesse du foyer est Nana e Votrës, la « mère du foyer ». Le nom de Votrë rappelle bien sur la Vesta romaine, de même fonction. Zana est la déesse de la chasse, et c’est bien sûr la Diane romaine ou son équivalente illyrienne. Enfin Talasi est le dieu de la mer, et ce nom vient directement du grec thalassa.

Comme dans tous les panthéons d’Europe, le soleil et la lune ont un rôle fondamental dans le panthéon. Dielli est le dieu du soleil et son nom a servi paradoxalement à désigner le diable (djall). Hëna est la déesse de la lune, et son nom signifie « la lumineuse ». Leur sœur, la déesse de l’aurore, est appelée Agim. Tout comme chez les Slaves (avec Svarojitch - fils de Svarog), le dieu du feu est surnommé « fils du dieu du ciel », donc dans le cas présent Enji, mais il était probablement appelé Zjarr (« Feu ») aussi bien. Enfin Eri est la personnification du vent et nous rappelle le grec Eole. Pour compléter le tableau, les Miren au nombre de trois sont les Moires grecques, divinités du destin.

Le panthéon albanais nous fournit de nombreuses informations utiles, à savoir que le contact avec la Grèce et Rome a été ancien et durable. Des figures de la mythologie classique sont intégrées de longue date. Le nom des jours, comme dans le reste de l’Europe, est associé aux ancien dieux (lundi : e henë ; mardi : e martë ; mercredi : e mërkurë ; jeudi : e enjte ; vendredi : ë premte ; samedi : e shtunë [Saturne]; dimanche : e diel), romains aussi bien qu’albanais. C’est la preuve de l’ancienneté de leur présence dans les Balkans et sur le territoire qui est désormais le leur. Il est bon de rappeler tous ces faits aux habituels détracteurs du peuple albanais, qui ont tendance à nier à ce grand peuple sa profonde européanité sous des motifs contextuels. Il est bon aussi de rappeler aux Albanais eux-mêmes qu’ils ont une belle foi native, dont ils peuvent être fiers, et qui mérite certainement d’être ranimée, comme tente de le faire le petit mouvement identitaire albanais Vargmal.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)