27/08/2017
Le Front National pris dans une aporie insoluble. Constat d'une faillite programmée.
Si le FN a dédiabolisé son discours, en renonçant en réalité à tout ce qui en faisait la sève, l’édulcorant au point de le rendre semblable à celui de tous les autres partis, il n’a pas démocratisé son mode de fonctionnement interne. Le président du parti, qui est toujours un Le Pen, est indéboulonnable et ne cède sa place que quand il le décide. Il est donc décrété candidat naturel du parti ad vitam aeternam, et en ce sens la présidence de « Marine » est conforme à la présidence de « Jean-Marie ».
La campagne de 2017 a révélé un double échec : échec personnel de Marine Le Pen qui n’a pas été élue présidente, même si elle a été élue député, sans groupe, dans la meilleure circonscription de France pour son parti ; échec de la stratégie politique du Front National, avec ses thèmes souverainistes, à l’instar de l’abandon de l’euro. Aux législatives, le FN a dû se contenter d’un petit 13,2%, loin des 27% obtenus aux élections européennes de 2014. Aux présidentielles, le FN a obtenu 21,3% des voix, soit à peine un point de plus que François Fillon, et 33,9% au second tour. Ce dernier résultat, s’il atteint un record, est néanmoins très inférieur à ce que le parti pouvait espérer.
Contrairement à 2002, le second tour a eu lieu d’une manière classique, le moment clé étant le débat entre les deux finalistes. Emmanuel Macron ne se déroba pas à l’affrontement, même si tactiquement il laissa filtrer la fausse information selon laquelle il quitterait le débat si Marine Le Pen l’y poussait. Les « stratèges » de Marine Le Pen tombèrent dans le piège en la poussant à un discours de rupture et de provocation.
Marine Le Pen n’a pas seulement perdu l’élection et le débat. Dans ce débat, elle a révélé son vrai niveau de compétence ou d’incompétence, selon le fameux principe de Peter. Très bonne candidate quand on lui oppose des anathèmes sans fondement, elle devient médiocre lorsqu’elle est amenée à exposer ce qui lui sert de programme. Elle est parue confuse, déconnectée des enjeux, attaquant son adversaire sur le terrain où celui-ci est le plus fort. Épuisée par une campagne mais aussi par des choix stratégiques absurdes, comme sa visite la veille du débat à un collectif africain où elle a promis 15 milliards d’euros par an pour l’Afrique, alors qu’elle ne cessait de vitupérer contre les 9 milliards d’euros versés chaque année à l’Union Européenne, elle n’avait manifestement pas le niveau. Enfin, ses quelques pas de danse à la fin d’une soirée d’échec électoral, créant une désespérance profonde auprès de ses électeurs, sympathisants et militants, ont accentué le désaveu.
On peut se remettre d’une contre-performance électorale mais pas d’un débat de second tour vu par des millions de Français, dont ses électeurs, où elle a révélé son vrai visage. Car nombreux étaient ceux qui depuis de nombreuses années connaissaient la réalité derrière le masque. Les bons résultats électoraux de ces dernières années avaient envoyé un message trompeur.
La stratégie a été mise en cause et à juste titre, mais changer de stratégie n’est pas aussi simple. Le débat sur l’euro a été mis sous le boisseau, même si Florian Philippot y revient sans cesse, mais le parti reste officiellement opposé à la monnaie unique. Le choix est désormais de ne plus en parler et d’axer le propos sur le rétablissement des frontières nationales. C’est inaudible. Les thèmes identitaires, mis en avant par Bay, et les thèmes souverainistes, mis en avant par Philippot, sont irréconciliables.
Une stratégie est également incarnée. Marine Le Pen a tellement mis en avant une ligne souverainiste qu’il lui est impossible d’y renoncer. Si changement de ligne le FN doit adopter, ce qui ne passe pas nécessairement par un changement de nom, relevant d’une logique cosmétique, il faut un changement de dirigeant, de candidat. Or c’est impossible pour les raisons évoquées préalablement. Marine Le Pen est indéboulonnable, et personne ne s’opposera à elle lors du congrès de 2018, mais elle est gravement démonétisée, et même décrédibilisée par le débat du second tour. Même Florian Philippot reconnaissait, selon un propos rapporté par le Canard Enchaîné dont il niera ensuite la réalité, que Marine Le Pen « était décrédibilisée à jamais ».
Robert Ménard, dans une tribune qui lui a valu les foudres de Florian Philippot, a clairement indiqué la nécessité d’un changement stratégique et d’un changement de direction, espérant l’émergence d’une personnalité nouvelle. Si une telle personne devait émerger, néanmoins, cela ne serait pas au Front National. A moins d’une démission surprise de Marine Le Pen, qui créerait automatiquement une scission en deux, le parti est promis à un déclin plus ou moins long. Or le FN empêche l’émergence d’une nouvelle personnalité, en son sein aussi bien qu’en dehors, car il est encore en position de monopole sur des thèmes identitaires que pourtant il réfute.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
15:23 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : front national, marine le pen, échec |
10/05/2017
L’échec de Marine Le Pen.
Quelques données chiffrées.
Avec 21,3% des voix au premier tour (7,7 millions d’électeurs) et 33,9% des voix au second tour (10,6 millions d’électeurs), le Front National réalise son meilleur score à une élection présidentielle, tant en pourcentage qu’en nombre de votants. Mais il ne progresse au premier tour que de 3,4% en cinq ans, alors que le contexte n’avait jamais été aussi favorable, et surtout en pourcentage il régresse par rapport aux élections européennes (24,9% en 2014), régionales (27,8% en 2015) et départementales (25,3% en 2015).
A la mi-mars 2017, Marine Le Pen atteignait le score le plus élevé dans un sondage OpinionWay avec 28% des voix et en début mars elle atteignait 28,5% des voix selon l’IFOP. A partir de début avril, sa cote diminue avec en moyenne 23,5% des voix, puis tombe même à 22% en moyenne mi-avril (OpinionWay et Ipsos), soit légèrement plus que le score qu’elle obtiendra finalement.
Au second tour, la première semaine met Marine Le Pen en moyenne à plus de 40% des voix, mais en seconde semaine, même avant le débat du second tour elle tombe à 38% puis à 37% au dernier sondage. Le ralliement surprise de Nicolas Dupont-Aignan ne semble pas avoir apporté de plus value. Pire, 30% seulement des électeurs de Debout la France voteront Marine Le Pen.
Un premier tour raté.
Marine Le Pen pouvait espérer à l’issue de la campagne du premier tour, qui aurait dû lui être favorable, réaliser un score élevé, sortant en tête. Elle fut finalement devancée de près de 4 points par Emmanuel Macron. Et était même talonnée par François Fillon avec 20% des voix, malgré le scandale associé à sa personne. Elle aurait été sans doute éliminée si la campagne avait duré deux semaines de plus. Sauvée in extremis par le suffrage universel direct, elle partait néanmoins pour le second tour avec un handicap.
Les raisons de cet échec sont multiples. Elle a brouillé son message en cherchant à recevoir un adoubement anti-raciste, prenant son électorat à contre courant. Tout comme son père en 2007, elle a mené une campagne de second tour au premier tour, se montrant incapable de rassembler son camp et offrant notamment un espace à François Fillon et à Nicolas Dupont-Aignan. Etouffant son propre parti, à l’exception de son lieutenant Florian Philippot et de son directeur de campagne David Rachline, omniprésents sur les plateaux de télévision et offrant une ligne très édulcorée, elle n’a pas su rassembler le plus largement possible.
Elle aura aussi troublé certains électeurs par son discours conciliant avec l’islam, par sa mise sous le boisseau du thème de l’immigration, par sa campagne fortement engagée en faveur des DOM-TOM et même de l’Afrique, réussissant l’exploit de parler du développement du continent africain à Vladimir Poutine.
Certes, elle progresse de manière importante dans les DOM, surtout au premier tour, même dans des bastions de gauche. Elle dépasse les 10% en Martinique et en Guadeloupe. Elle dépasse les 25% en Guyane. Enfin, en Corse, dans une région qui vit mal l’immigration, elle progresse considérablement. Mais ses électeurs corses retourneront auprès des nationalistes corses aux élections plus locales, et les élections législatives ont aussi une dimension locale. Le vote FN reste un vote contre l’immigration, n’en déplaise aux nationaux-souverainistes qui imaginent à tort qu’il s’agirait d’un vote contre l’Union Européenne.
Un second tour en demi-teinte qui finit en mise à mort.
La première semaine fut très favorable à Marine Le Pen. L’affaire Whirlpool parvint même à la doper. Certes la marge de sécurité d’Emmanuel Macron restait importante mais ce dernier était bousculé. Mais la deuxième semaine de campagne n’a pas réussi à prendre. La veille du débat, elle négociait avec une organisation africaine inconnue proposant de verser 0,7% du PIB de la France soit 15 milliards d’€ par an pour aider l’Afrique. Quand on sait qu’elle n’a pas cessé de dénoncer les quelques milliards que la France donnait à l’Union Européenne, c’était risible.
Le débat du second tour face à Emmanuel Macron fut désastreux. Inutilement agressive, réduisant son intervention à des attaques ad hominem ou contre le programme de son adversaire, sans jamais détailler le sien, cherchant à gagner sur le terrain de l’adversaire sur lequel elle fut écrasée (sur les retraites, sur l’euro), elle ne réussit à mordre que sur le thème de l’islam, qu’elle abandonna très vite, se limitant à des critiques contre l’UOIF. Enfin, les dix dernières minutes finirent au jardin d’enfants, Marine Le Pen s’adonnant à de grands gestes provocateurs et à nommer des personnalités de gauche et de droite pendant qu’Emmanuel Macron tenait son discours.
Perdant alors toute présidentialité, elle sabotait de fait ses chances de faire un score très honorable. Décourageant ses partisans, sans réussir à récupérer les voix des électeurs de Mélenchon et à peine ceux de Fillon, elle finit à moins de 34%. Cela laissera des traces.
Même si elle gagne 3 millions de voix entre les deux tours, voix d'électeurs qu’il ne faut en aucune manière considérer comme acquis, son score de second tour reste faible. Certes meilleur que les 18% de Jean-Marie Le Pen de 2002 mais avec un candidat FN qui était face à la droite et dans un contexte de diabolisation extrême, son score n’est pas fantastique, et surtout elle est loin des 40% qui auraient pu être considérés comme un résultat satisfaisant. Elle a voulu présenter son échec en victoire, une façon de ne pas faire son auto-critique, et de maintenir avant les législatives un sentiment positif. Les électeurs ont-ils été dupes et l’annonce d’une refonte du parti sera-t-elle suffisante pour les rassurer ? Rien n’est moins sûr.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
21:27 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marine le pen, front national, emmanuel macron, échec |
18/09/2016
Pourquoi Marine Le Pen va-t-elle perdre les élections présidentielles
1. L’état du parti.
Il ne suffit pas de s’auto-désigner « parti de gouvernement » pour en posséder les caractéristiques principales. Une tête sans corps n’est pas en mesure de devenir crédible aux yeux du plus grand nombre. Le FN n’aurait qu’environ 42.000 adhérents et très peu d’intellectuels en son sein. La direction du parti se résume à une poignée de personnalités, dont la nièce et le compagnon de la présidente en exercice. Seule autre figure du parti, l’énarque Florian Philippot, qui est très loin de faire le consensus. Difficile dans ces conditions de pouvoir envisager de gouverner. Quant aux candidats aux législatives, malgré la volonté de Jean-Lin Lacapelle d’organiser leur casting, les notables se font rares. Difficile également d’espérer gagner les élections législatives par le biais de candidats sans aucune implantation locale, et même d’obtenir 60 députés.
Envisager une victoire aux élections présidentielles, qui serait alors nécessairement suivie d’une absence totale de majorité à l’assemblée, présente un intérêt politique limité. La France est un régime mixte, semi-présidentiel et semi-parlementaire. Le choix du FN, sous Jean-Marie Le Pen et sous Marine Le Pen, de tout envisager sous le seul angle de cette élection, « mère des batailles », en négligeant les législatives, perdure donc.
2. Les choix stratégiques du nouveau FN.
L’objectif de Marine Le Pen est de dépasser les 50,1% aux élections présidentielles à l’issue du second tour. Prenant pour argent comptant les sondages favorables qui l’y placent dans tous les cas, avec entre 25% et 32% des voix au premier tour, mais à huit mois de l’élection, elle se positionne dès maintenant en candidate du second tour. Elle agit ainsi comme Lionel Jospin en 2002 qui s’imaginait en duel face à Jacques Chirac bien avant que l’élection n’ait lieu. On se souvient de la sévère déconvenue qui suivit et de cette humiliation qui l’amena à la retraite politique. Ce faisant, elle ne cherche pas à rassembler son camp, qu’elle estime acquis.
Sa démarche est donc d’augmenter son capital sympathie dans tous les milieux politiques, en faisant concession sur concession sur le fond du discours, et notamment en engageant une stratégie de communication ciblant les banlieues et les immigrés. Elle imagine ainsi regrouper sous son nom partisans d’une inversion des flux migratoires et partisans d’une vision multiculturaliste de la France. C’est négliger le fait que les électeurs issus des banlieues votent massivement pour le PS, qui tient le discours qu’ils veulent entendre, et qui verse depuis des années de précieuses subventions.
En prenant le risque de s’adresser à des nouveaux électorats aux thématiques incompatibles avec celles des électeurs traditionnels du FN, elle lâche la proie pour l’ombre. Elle n’y gagnera aucun nouvel électeur mais perdra une partie du vote identitaire dont elle bénéficie, ce dernier se tournant alors vers Sarkozy, malgré la déception post-2007, ou vers le vote blanc ou l’abstention.
Sa démarche « Banlieues Patriotes » rappelle la stratégie d’Alain Soral auprès de Jean-Marie Le Pen en 2007 et ce n’est pas un hasard si elle a choisi l’ancien soralien David Rachline comme directeur de campagne pour les élections présidentielles. On se souviendra que c’est en 2007 que Jean-Marie Le Pen fit le plus mauvais score de sa carrière.
3. Marine Le Pen n’est pas un Bruno Mégret au féminin.
Beaucoup d’analystes considèrent que la stratégie de Marine Le Pen est proche de celle engagée par Bruno Mégret au sein du FN avant son départ en 1998. C’est une erreur pour deux raisons.
La première est que Marine Le Pen choisit, sous l’influence de Florian Philippot, une ligne « ni droite ni gauche », qui s’inspire peut-être aussi du slogan que Samuel Maréchal, son ancien beau-frère, dont elle disait en 1998 admirer la ligne politique, avait introduit, alors que Bruno Mégret a toujours choisi l’ouverture à droite. Pour lui, il s’agissait pour le FN de représenter 30% des voix et de rallier ensuite autour de lui les autres droites. C’est une stratégie à la Weimar dans laquelle l’élection législative jouait un rôle essentiel.
La seconde était que sa démarche consistait à conserver un fond radical, sans aucun renoncement majeur, mais de travailler sur la forme, en rejetant les thématiques diabolisantes et les comportements destinés à effrayer les électeurs. Sa rupture avec Jean-Marie Le Pen était de méthode. Or Marine Le Pen choisit au contraire, au nom d’une forme adoucie, d’amener son parti à un fond adouci, perdant alors son côté protestataire qui fit le succès de son parti.
4. Pourtant Marine Le Pen ne s’effondrera pas.
Il est probable qu’elle ne réalisera pas le score que lui annoncent les instituts de sondage pour toutes les raisons évoquées plus haut. Mais elle ne s’effondrera pas non plus. Car ils sont nombreux ceux qui ont intérêt à ce que le FN continue d’exister à un haut niveau. En effet, le vote protestataire doit bien pouvoir s’exprimer dans les urnes, car sinon il s’exprimera d’une autre manière, non contrôlée, et le FN bénéficie depuis longtemps de ses faveurs, grâce notamment aux fameux dérapages de Jean-Marie Le Pen.
A chaque fois d’ailleurs que Marine Le Pen veut s’en distancer, au point d’avoir exclu le président-fondateur il y a un an, elle y est ramenée par les media. Et le moindre dérapage léger est mis en exergue, comme pour se rassurer d’avoir toujours le « diable de la république » en face de soi. Ceux-ci lui prêtent donc un programme caché (crypto-programme) apparenté à une forme d’épuration ethnique dont seraient les victimes les populations issues des flux migratoires extra-européens.
En conséquence, les électeurs animés par un souci identitaire, et qui ne sont pas séduits par ses diatribes contre l’euro et contre l’UE, continueront pour une bonne part de voter pour elle par défaut. Il est difficile d’imaginer qu’elle puisse tomber en-dessous de 20% des voix.
Quant au second tour, il sera dévastateur, même si par le plus grand des miracles elle était opposée à François Hollande. Et en supposant qu’elle puisse gagner malgré tout, car la politologie n’est pas une science exacte, elle n’aura jamais une majorité à l’assemblée et ne pourra donc pas gouverner. Bien plus qu’avec Sarkozy après son élection de 2007, elle décevra et son parti ne paraît pas armé pour être en capacité de résister à cette déception qui suivra.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
19:26 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : marine le pen, front national |
28/05/2016
Robert Ménard confronté à la stratégie du Front National
Lors des assises de refondation de la droite organisées à l’initiative de Robert Ménard, le maire de Béziers, réunies sous le slogan « Oz’ la droite », sa déclaration introductive a mis le feu aux poudres. Il a déclaré ainsi ne pas vouloir servir de « marchepied au FN ». Conséquence immédiate, Marion Le Pen a réagi en organisant son départ et en le faisant publiquement savoir. Elle a ajouté que Ménard devait son élection au FN, ce qui est une simplification abusive. Un maire élu dépend avant tout du choix des électeurs et pas des appareils politiques, même si une candidature FN « parasite » aux municipales aurait sans doute nettement compliqué son élection.
Cette petite crise est significative du décalage complet entre la démarche de cette droite élargie, qualifiée d’ailleurs de « droite identitaire » par Le Monde, et celle du Front National. Alors que Marine Le Pen considère que l’opposition est entre « européistes » et « patriotes », cette sphère identitaire au sens large considère que les débats sur la nationalité, l’immigration et le multiculturalisme sont beaucoup plus importants que des débats de nature économique ou sociale. Le libéralisme affiché par Robert Ménard est néanmoins aussi diviseur que l’étatisme forcené qu’il prête non sans raison à Florian Philippot.
Si Robert Ménard a raison de souhaiter que pédale douce soit mise sur les thèmes du rejet de l’UE et de l’euro, ce en quoi j’estime qu’il a pleinement raison, son libéralisme économique, que Philippot a associé malicieusement à celui d’Alain Juppé, n’est pas davantage rassembleur. Car si l’objectif est d’unir l’aile droite des Républicains avec le FN, pour retrouver ces fameux 30% et plus encore de Bruno Mégret en 1998, c’est sur les seules questions identitaires que la jonction pourra se faire.
A l’opposition entre « européistes » et « patriotes » de Marine Le Pen, il faudrait opposer l’opposition entre « européens » et « aneuropéens », qui est beaucoup plus pertinente, car ce que l’on peut reprocher à l’Union Européenne c’est de ne pas être assez européenne, mais sûrement pas de l’être trop. Du point de vue de l’identité, une Europe homogène a beaucoup plus de sens qu’une France hétérogène unie par un « patriotisme » de papier à l’américaine, indifférent aux origines ethniques et confessionnelles de chacun. En outre, il est difficile d’être le patriote d’une patrie qui n’est pas la sienne, alors qu’on a refusé d’être patriote de sa propre patrie, puisqu’on l’a quittée. Pour paraphraser quelque peu Danton, on n’emporte pas le patriotisme à la semelle de ses souliers.
Outre cette divergence majeure entre le camp « Ménard » au sens large et le camp « Marine », il y a une autre différence, c’est le refus du « ni droite ni gauche ». Or Marine Le Pen a fait le choix, en bon disciple de son ancien beau-frère Samuel Maréchal, de cette seconde ligne. Elle ne croit pas au rassemblement des droites. Dans ces conditions, organiser malgré elle un tel rassemblement reste un vœu pieux.
Ce courant entre les Républicains et le Front National représente environ 2 à 3% des voix, le score de Mégret en 2002 et celui de Villiers en 2007. Il faudrait imaginer un affaiblissement très net du FN pour que ce courant soit en position d’émerger et rien ne l’indique pour le moment. C’est en outre une position très inconfortable que Robert Ménard et bien d’autres avec lui subissent. D’un côté, on leur reproche d’être trop proches d’un FN qui reste diabolisé, comme le FPÖ en Autriche. Cela explique pourquoi Eric Zemmour ou même Philippe de Villiers étaient absents à Béziers. D’un autre côté, le FN leur reproche de vouloir la jouer solo.
Marion Le Pen a ainsi déclaré aujourd’hui qu’elle ne voyait pas l’utilité d’une candidature alternative, qui n’aurait comme seule conséquence que d’empêcher Marine Le Pen d’être au second tour, et qu’une telle candidature ne ferait que servir les intérêts de LR. « Hors du FN, point de salut ». Difficile dans ces conditions de faire entendre une musicalité différente. La culture du compromis démocratique, propre surtout à des assemblées élues à la proportionnelle, n’est pas encore celle du FN.
C’est pourquoi, pris entre deux positions inconciliables, Robert Ménard et ses amis ont peu de chance de pouvoir se faire entendre, et de toute façon le FN, en position de monopole électoral, ne voudra pas les écouter. Si la stratégie du FN est incompatible selon Robert Ménard avec la volonté de victoire en 2017, une victoire hypothétique à laquelle personne sérieusement ne croit, à chacun alors d’en tirer les leçons.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
23:05 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robert ménard, oz la droite, front national, marion le pen |
16/05/2016
Quel avenir pour le Front National ? (2ème partie)
Marion vs Florian. Florian vs Marine.
En 2017, il ne fait quasiment aucun doute que Marine Le Pen sera au second tour des élections présidentielles, peut-être même en tête de tous les candidats. Peu imaginent de même sa victoire, même face à François Hollande. Les élections régionales ont servi de démonstration de force. Après un premier tour où les deux Le Pen dominaient nettement leur région respective, leur défaite au second tour fut nette. Or si, dans les régions qui lui sont le plus favorables, il n’atteint que 40 à 42% des voix face à un seul adversaire, qui peut croire que Marine Le Pen atteindra plus de 50% des voix au second tour de la présidentielle.
Si le plafond de verre a donc été relevé, essentiellement parce que la situation de la France est de plus en plus catastrophique, il existe toujours. Et il n’est pas sûr que la ligne actuelle, plus rassurante pour les électeurs des partis adverses, permette de conserver le socle électoral déjà acquis. La « France apaisée » aurait pu être le slogan d’un François Mitterrand. Mais il est difficile de penser que le FN puisse jouer la même partition que lui, tout en espérant le vote d’électeurs principalement motivés par les questions migratoires et identitaires.
Par ailleurs la ligne anti-€ et anti-UE, qui permet au FN d’éviter de rentrer dans des débats sur l’identité française et européenne, où il serait alors obligé d’assumer une identité européenne à laquelle il prétend en même temps ne pas croire, n’est pas électoralement rentable. Et elle ferme bien des portes sans en ouvrir de nouvelles. Certes Marine Le Pen s’est dite récemment « européenne », une concession étonnante, mais l’idée même d’une Europe politique, serait-elle identitaire, semble lui faire horreur.
Au sein du FN, comme avant 1998, deux courants s’opposent. Il y a un courant « marioniste », qui a reçu le soutien de plusieurs figures identitaires, et qui se positionne en faveur d’une France plus européenne, plus libérale, plus catholique aussi, un courant ouvert aux alliances à droite. En face on trouve un courant « social-républicain » autour de Florian Philippot. Ce courant se veut plus social, étatiste, parfois sur une ligne qu’on retrouvera même chez un François Hollande, mais surtout anti-européenne et farouchement eurosceptique.
L’euroscepticisme souverainiste, qu’on retrouve aussi en mode extrême chez Asselineau, refuse l’idée européenne au nom de prétendues trop grandes différences entre les Européens, interdisant de penser à toute unité du continent, mais nie dans le même temps des différences bien plus majeures existant pourtant entre « Français de souche » (c'est-à-dire Européens) et « Français issus des flux migratoires post-coloniaux ».
Au niveau électoral et même au niveau des sympathisants et adhérents, la ligne « marioniste » est très majoritaire. En revanche, au niveau de l’appareil politique, et de plus en plus, c’est la ligne « philippotiste » qui s’impose, et chaque départ, chaque exclusion, la renforce davantage encore. Or le FN n’est pas un parti au fonctionnement interne démocratique, et tenir l’appareil est donc essentiel. La nomination des responsables départementaux, la composition du bureau politique, le choix des candidats, tout cela relève de la direction et notamment de la présidente.
Or, à chaque fois que Marine Le Pen a dû choisir entre sa nièce et son lieutenant, c’est ce dernier qui l’a emporté, car il y a une convergence idéologique évidente entre la dirigeante et son « fidèle » vassal, un même logiciel politique. Marine Le Pen ne se sent pas en effet « de droite » et c’est ce qu’elle a ainsi répondu à un Robert Ménard par exemple. Si « Marion » estime le catholicisme, « Marine » a très peu d’empathie à l’égard de cette religion, comme à l’égard du paganisme par ailleurs, qu’elle méprise par ignorance.
Marion Maréchal-Le Pen est donc progressivement marginalisée au sein d’un parti où elle est pourtant très populaire. Privée de soutiens, à part dans sa région d’élection, elle est confrontée à une hostilité croissante d’un appareil politique envahi par les partisans de Philippot, tous standardisés sur un même modèle idéologique et même anthropologique.
On comprend bien que Florian Philippot souhaite au plus tôt l’écarter pour se retrouver en situation de monopole et pour préserver son avenir politique. Le post-marinisme est déjà lancé. Lorsque Marine Le Pen cédera sa place, de sa propre volonté ou par la contrainte, il veut être le seul héritier possible. « Marion » est donc un obstacle à son ascension personnelle.
Marion Maréchal Le Pen aura donc tôt ou tard à faire un choix douloureux, soit la rupture et une aventure solitaire qui a peu de chance de succès, soit la soumission et le silence et donc une disparition politique en douceur, soit enfin une retraite politique précoce pour se consacrer à sa vie professionnelle et familiale, résultante probable de la seconde position.
Une fois « Marion » écartée, Marine Le Pen et Florian Philippot se retrouveront face à face. Une tentation « mégretiste » chez son lieutenant sera sans doute irrésistible. Il faut se méfier de ceux qui proclament haut et fort leur fidélité inébranlable et en font même un principe.
Mais l’histoire n’est pas un éternel recommencement et il est probable que ces petits jeux auront déjà lassé les joueurs que sont les électeurs. Après 2017 et cet échec programmé, il n’est pas sûr que le FN continue dans cette voie ascensionnelle qui est pour le moment la sienne. Surtout, le reniement identitaire de ce parti selon la ligne Philippot, le souverainisme dominant alors sans partage le parti, en décalage total d’avec les aspirations profondes des électeurs du FN, pourrait avoir comme conséquence l’émergence d’une force identitaire nationale et/ou européenne. Les chapelles identitaires qui se rangent par défaut derrière le FN feraient donc probablement un faux calcul à court terme.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
17:18 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : front national, europe, philippot, marion maréchal le pen, marine le pen |
Quel avenir pour le Front National ? (1ère partie)
Dédiabolisation ou dédramatisation. Provocation stérile ou soumission systémique.
La ligne de Marine Le Pen depuis son arrivée à la tête du FN en 2011, encouragée par son lieutenant Florian Philippot, repose sur la dédiabolisation. Il ne s’agit pas seulement de taire certaines positions qui pourraient être considérées comme trop radicales ni de cesser de se prêter aux jeux des clins d’œil à des mouvances marginalisantes. C’était la ligne « Mégret », selon le principe de « la main de fer dans un gant de velours ». Aucune déclaration malvenue sur la seconde guerre mondiale mais aucune concession sur les questions d’identité.
La dédiabolisation mariniste consiste au contraire à affirmer haut et fort son ralliement aux thèmes dominants du système en place, et à limiter son ton révolutionnaire aux questions d’économie, ne prônant la rupture qu’avec l’Union Européenne, sans vouloir la réformer dans un sens plus opportun, mais pas avec le multiculturalisme ambiant. Cela a amené la mairie FN d’Hénin-Beaumont à récemment autoriser la construction d’une mosquée au motif que s’y opposer serait illégal.
C’est donc concrètement la recherche d’un adoubement par les autorités politiques et par les vecteurs médiatiques.
Une stratégie potentiellement beaucoup plus efficiente aurait été plutôt la dédramatisation, en expliquant que les mesures (auparavant) préconisées étaient de bon sens, qu’elles seraient salvatrices, et qu’elles étaient bien moins terribles que le résultat d’un pourrissement sociétal bien plus accentué. Toute une dialectique forgée jadis par ce qui a été appelé la « Nouvelle Droite » était prête à l’emploi pour retourner le discours de l’adversaire contre lui-même.
La dédiabolisation aurait dû amener le FN, devenu conformiste, à s’effondrer car « un FN gentil, ça n’intéresse personne ». En outre, comme parti de gouvernement, le FN n’est pas crédible. Ce n’est pas un parti de masse. Les élites y sont rares, les intellectuels inexistants, les rares ayant essayé de s’implanter au sein de ce parti ayant dû plier bagage. Sur de nombreux thèmes, en dehors de ses sujets de prédilection, le FN est faible, malgré la création de collectifs spécialisés.
Pour le moment, le FN de Marine Le Pen a eu une chance incroyable, c’est que sa stratégie a échoué. Normalement, pour tout autre parti, l’échec de sa ligne aurait dû avoir comme conséquence son effondrement électoral. Cela n’a pas été le cas du FN, à qui ses électeurs prêtent un crypto-programme remigrationniste, malgré les déclarations des plus hauts responsables du parti dans le sens au mieux d’une assimilation a minima, vœu pieux ne coûtant pas bien cher, et sans remettre en question les naturalisations complaisantes réalisées par les gouvernements précédents et par l’actuel.
Mais il y aura bien un moment où les électeurs se rendront compte que leur espérance sera déçue, que la vision qu’ils ont de ce parti est celle que ses adversaires en donnent. Quand le FN sera semblable aux autres partis, et que la diabolisation aura cessé, il apparaîtra tel qu’il est et ne tardera pas alors à péricliter. Son salut n’aura alors été que de courte durée. Heureusement pour lui le PS a tout intérêt à maintenir une ligne de démarcation entre le FN et les partis dits « républicains » bien qu’ils ne le soient pas plus que lui.
C’est très différent par exemple d’un parti comme le FPÖ. Celui-ci est bien implanté dans la société civile et la diabolisation n’a plus de prises sur lui. Son candidat aux présidentielles Norbert Hofer est même en passe de s’imposer. Et le dirigeant Hans-Christian Strache est à 34% dans les sondages en cas d’élections législatives anticipées. Or ils n’ont rien renié de ce qu’ils sont. Ils ont tu les provocations dialectiques qu’un Haider pouvait tenir jadis. Mais n’ont pas évolué d’un iota sur les fondamentaux.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
16:48 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : avenir, front national, marine le pen, dédiabolisation |
14/02/2016
De l’impasse souverainiste au défilé des Européens ? (1/2)
La lecture du dernier ouvrage de Bruno Mégret, ancien haut responsable du Front National dans les années 90, ouvrage intitulé « Le temps du phénix », évoque sous la forme d’un récit l’arrivée hypothétique en 2017 d’un nouveau président élu sur une ligne « nationale » et la politique que ce dernier mènerait pendant cinq ans pour changer les choses. Au final, le bilan serait maigre alors même qu’il aurait fait preuve d’une force de conviction exceptionnelle, d’une fine stratégie et de beaucoup d’audace. Mais ce serait un programme correct pour « Les Républicains » si ceux-ci avaient un chef digne de ce nom à leur tête.
Beaucoup de citoyens d’obédience « souverainiste » imaginent de la même façon l’arrivée du Front National au pouvoir. C’est pourtant une illusion, pas seulement parce qu’il est hautement improbable que le FN gagne un jour les élections présidentielles, encore moins en conservant sa ligne actuelle et sa façon de se gouverner lui-même, et dans la foulée les élections législatives. La cinquième république, calibrée idéalement en apparence pour le seul De Gaulle, ce qui n’a pas empêché le grand homme d’être contraint à une sortie bien peu glorieuse, est verrouillée de telle manière qu’aucun parti révolutionnaire et/ou alternatif qui remettrait en cause le « socle des valeurs » admis par le régime en place ne pourra jamais arriver au pouvoir. C’est la même chose en Allemagne où la « loi fondamentale » est destinée à empêcher que l’histoire ne se répète et qu’un doctrinaire plébéien accède au pouvoir.
S’entêter comme le font les souverainistes et nationalistes eurosceptiques à chercher une solution politique nationale, qui plus est démocratique, est déraisonnable, mais penser à une solution continentale serait franchir un Rubicon mental qui leur semble indépassable.
Voyons donc les conditions requises pour que le FN réussisse hypothétiquement à accéder au pouvoir et surtout à vraiment changer les choses.
En premier lieu, il faudrait que son parti gonfle considérablement, attire et conserve des autorités morales, intellectuels ou hauts fonctionnaires, en dehors de l’énarque en chef qui sert à sa dirigeante de second. Or ce dernier « coupe » toute tête qui dépasse afin de conserver son emprise sur le parti. Il faudrait aussi que le FN soit dirigé par une personnalité remarquable, qui dispose à la fois des qualités du fondateur et de la modernité de l’héritière. Deux conditions non réunies aujourd’hui.
Ensuite, il faudrait que ce parti obtienne au premier tour un score quasiment de plus de 40%. On a vu qu’aux régionales même un tel score n’était pas suffisant face à une grande coalition de tous contre le FN. Or rien n’indique que le jeu de propagande de 2002, même atténué, ne reprenne pas en 2017 (par exemple). Et enfin il devrait arriver à dépasser la barre de 50% sur une ligne non centriste, alors que le second tour implique de mettre de l’eau dans son vin et de proposer un consensus acceptable. Or le succès du FN tient justement à sa ligne hétérodoxe et aux persécutions dont il est victime par le système politico-médiatique pour cette raison.
Rappelons en outre que la ligne anti-UE et anti-€ est anxiogène pour de nombreux électeurs, une ligne que Marine Le Pen ne veut pas remettre en question, pensant y voir la seule façon de se distinguer de la droite classique, sachant qu’elle ne veut pas mettre trop en avant le thème migratoire, surtout sur une ligne « ethniciste » qu’attendent pourtant ses électeurs, car il est diabolisant.
Mais allons au bout de l’équation. Le FN devra donc, sans alliés et sans coalition, gagner les présidentielles et les législatives qui suivent. Car toute coalition impliquera compromission et donc des renoncements sur des éléments clé du projet qu’on prête à ce parti. Mais cela ne suffira pas. Le Sénat sera verrouillé et il faudra alors au moins sept ans de victoires locales ininterrompues pour s’en emparer. Actuellement, le FN ne dispose que de deux sénateurs et un seul député stricto sensu, en plus d’un apparenté. Qui peut imaginer un parti impuissant pendant cinq ans à cause du Sénat gagner toutes les élections intermédiaires, municipales et départementales.
Or, sans le Sénat de son côté, impossible de se débarrasser du Conseil Constitutionnel, de modifier les traités internationaux, d’amender la constitution en supprimant des principes délétères repris ensuite dans la DUDH de 1948.
Moralité ? Même si le FN gagnait toutes les élections nationales, présidentielles et législatives, et cette hypothèse paraît invraisemblable en l’état, il ne pourrait rien changer à la situation de la France et serait balayé aux élections suivantes. En rester à cette stratégie en liant l’avenir à ce seul parti, à la personnalité qui en est à sa tête et à ce seul cadre politique, serait suicidaire. Cette ligne du FN est d’ailleurs la même à DLF, où Nicolas Dupont-Aignan n’envisage que l’élection présidentielle, la « mère des batailles » comme disait Jean-Marie Le Pen.
Et il ne faudrait pas oublier les pressions internationales, diplomatiques et surtout économiques, tant de la part de l’Union Européenne, même si elle est assez impuissante, que de nos partenaires européens. Même l’abandon de l’euro et la rupture avec l’UE n’auraient pas lieu. D’ailleurs, dans son ouvrage, le président version Bruno Mégret conserve l’euro et maintient l’adhésion à l’Union Européenne, même s’il tente avec plus ou moins de succès de la réformer.
Le souverainisme ne propose donc qu’une impasse politique, au nom de postulats de principe qu’il refuse de remettre en question, et notamment le rejet de l’idée européenne, s’entêtant à imaginer un président idéal libéré des entraves d’institutions dont les souverainistes souhaitent la pérennité voire le renforcement au détriment de l’actuelle Union Européenne, pourtant impuissante.
Nous verrons dans une seconde partie qu’il existe un défilé des Européens, un passage étroit et arpenté, qui pourrait permettre aux Français et aux autres Européens, au prix d’une certaine audace, de s’en sortir et d’assurer au niveau continental le relèvement civilisationnel de l’Europe entière.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
17:31 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : souverainisme, front national, marine le pen, impasse |
13/12/2015
Régionales 2015: Défaite des Républicains, échec du Front National.
Ce dimanche, je suis donc allé faire mon devoir citoyen. L’affiche du candidat de droite était à moitié déchirée, la tête du candidat du Front National recouverte de peinture noire et celle du candidat socialiste, qui s’est maintenu contre l’avis de l’appareil PS, affublée d’une moustache hitlérienne et du mot « collabo ». C’est dire si l’hystérie « antifasciste » qui a occupé tout l’appareil politico-médiatique depuis une semaine est forte. Cette manipulation collective téléguidée depuis Solférino fait insulte à notre démocratie.
Au final, elle a été payante. Le Front National échoue à s’emparer d’une seule région et en pourcentage, même s’il progresse en nombre de voix, il ne progresse guère, même en duel. Marine Le Pen est battue dans un rapport 42/58 par Xavier Bertrand (LR) tout comme Marion Maréchal Le Pen (44/56 face à Christian Estrosi). Et même en triangulaire, Florian Philippot échoue face à la droite (47/36 en faveur de Philippe Richert). Enfin, en Languedoc-Roussillon-Midi, Louis Aliot n’obtient que 34% des voix environ, la droite ayant même renforcé sa troisième place (21.5% environ contre 18% au premier tour). Aucun vote utile en sa faveur n’a finalement eu lieu.
La droite est également punie pour avoir joué la stratégie du PS. Si elle gagne bien les trois régions au détriment du FN grâce au désistement du PS, ce qui en fait aussi son otage, elle en aurait laissé filer au moins deux autres. Le PS aurait ainsi gagné cinq régions, alors que les sondages à l’origine ne lui en promettaient que trois, et ce grâce au maintien d’un FN fort, notamment dans le Centre et en Franche-Comté/Bourgogne. Toutefois, les résultats à cette heure sont encore très serrés. La Normandie serait finalement gagnée par la droite par une avance de seulement 0.3% des voix (Hervé Morin).
Les Franciliens auront en revanche su se préserver d’un retour du PS, Valérie Pécresse ayant de justesse (44 contre 42%) battu Claude Bartolone, dont les propos europhobes (« anti-blancs ») ont été ainsi sanctionnés. En effet, le candidat FN perd quatre points (de 18.2 à 14.2%) en faveur de la droite. Le vote utile n’a visiblement fonctionné qu’en Ile de France.
La droite « la plus bête du monde » en la personne de Nathalie Koscziusko-Morizet a même réussi à considérer les résultats de ce soir comme une « grande victoire » alors que c’est une défaite puisque la gauche s’en sort finalement très bien, alors que son bilan gouvernemental est catastrophique et que tous les signaux sont au rouge. Quant aux malheureuses victimes des crimes islamistes, elles sont oubliées. Aucune leçon n’aura été apprise et la sanction du premier tour aura été vite oubliée.
Au final, le Front National, même s’il augmente nettement le nombre de ses voix et surtout le nombre de ses conseillers régionaux, a échoué. La progression de la participation a globalement joué contre lui. Cette mobilisation plus ou moins artificielle au nom d’une « république » fantasmée et gravement dénaturée lui aura été fatale. Même si Marine Le Pen a réussi à relever le niveau du plafond de verre de plus de dix points, sa dédiabolisation a montré ses limites. Elle porte malgré elle une tunique de Nessus dont elle est incapable de se débarrasser malgré les nombreuses concessions de forme mais aussi de fond qu’elle a acceptées. Cela donne en partie raison à son père, même si les provocations rhétoriques ne sauraient constituer une alternative crédible non plus.
On voit mal comment, alors que son parti est incapable de gagner un second tour dans deux des régions qui lui sont le plus favorables, elle serait capable de gagner les présidentielles en 2017, même en ayant 30% des voix au premier tour. La leçon est donc amère, même si officiellement les dirigeants du parti estiment que ces résultats sont une victoire. Le fait de n’avoir emporté aucune région pose question quant à la définition qu’ils donnent du mot « victoire ». En politique, les symboles comptent davantage que des données statistiques. C’est l’échec d’une stratégie (le « tout national ») et d’une ligne (la dénonciation de l’UMPS). Marion Maréchal-Le Pen réussit toutefois mieux que sa tante (45% chez elle contre 42% chez la seconde).
Plusieurs leçons à son sujet peuvent être tirées :
- d’abord que la diabolisation médiatique de ce parti, malgré ses nouvelles personnalités et son nouveau discours, est encore efficace. Son programme anxiogène en matière économique et inutilement europhobe n’a certes pas contribué à améliorer son image.
- ensuite que le cadre national est verrouillé et qu’il est absurde de s’entêter à ne voir de salut politique que dans ce seul cadre. Le cadre européen serait davantage prometteur pour un mouvement adoptant alors une ligne plus identitaire et « remigrationniste », puisque c’est ainsi qu’il est de toute façon perçu par ses électeurs naturels, malgré ses dénégations et ses appels inaudibles à bénéficier aussi du soutien électoral de « banlieues patriotes » composées de « compatriotes musulmans ».
- enfin qu’il n’y a pas et il n’y aura pas de solution nationale et que 2017 n’est pas un véritable enjeu électoral. La solution ne peut être qu’européenne. Le problème est que pour le moment, en l’absence d’un parti identitaire européen, renforcé et médiatisé, il n’y a simplement aucune solution sur le terrain. Mais au moins l’espoir de l’émergence d’un tel parti et de son succès éventuel existe-t-il encore.
Dans une France où la droite au sens large est très majoritaire, la gauche continue de dominer électoralement et fait mieux que de limiter la casse. Ces élections régionales ont par ailleurs montré que dans le cadre actuel, et malgré des évènements dramatiques, le système se défend bien. Au prix des règles élémentaires de la démocratie. Que le FN après tout ait été à la tête de plusieurs régions, par la volonté des électeurs, où il aurait pu montrer sa compétence ou son incompétence, n’était pas scandaleux. Et le fait que les listes du PS aient eu le droit de se retirer, ce qui est contraire aux principes mêmes de ces élections régionales, est proprement scandaleux. Nous noterons que le candidat du PS dans l’Est, Jean-Pierre Masseret, a eu raison de se maintenir contre la décision de Cambadélis (PS) puisque la région n’a pas été gagnée par le FN et que la gauche y sera donc représentée, ce qui ne sera le cas ni dans le Nord, ni en Provence.
Thomas Ferrier (PSUNE/LBTF)
Addendum: Les nationalistes corses (menés par Gilles Simeoni), clairement identitaires dans l'âme, remportent le second tour avec 35.4% des voix contre 28.5% pour le PS, 27.1% pour la droite et 9.1% pour le FN. Néanmoins ils ne disposeront que de 24 sièges et devront donc trouver des alliés.
22:31 Publié dans Analyses, Elections en Europe | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : régionales 2015, front national, les républicains, parti socialiste, diabolisation |
07/12/2015
Analyse rapide des résultats du 1er tour des Elections Régionales 2015
A 90% du dépouillement, en l’absence notamment des résultats de l’Ile de France et des Antilles, le résultat officiel du ministère de l’intérieur indique le Front National comme premier parti du pays, et grand vainqueur des élections, avec 28.94% des voix. On peut pronostiquer un FN légèrement au-dessus de 28% lorsque les résultats seront complets, en sachant que l’Ile de France lui est moins favorable.
Il échoue donc à obtenir le cap symbolique des 30% des voix même s’il connaît une progression de près de trois points par rapport à son résultat des élections départementales. Ce résultat attendu par les sondages confirme néanmoins sa progression constante. Surtout, en Provence et dans le Nord, il obtient un niveau exceptionnel, avec 41.2% pour Marine Le Pen dans le Nord et 41.26% pour sa nièce Marion dans le Sud-Est. Florian Philippot passe en tête dans l’Est avec 36.06% des voix. Enfin Louis Aliot obtient 32.65% des voix dans le Sud-Ouest, loin devant le candidat de droite Dominique Reynié (18.63%). Dans deux autres régions (Centre et Bourgogne-Franche-Comté), le FN est également nettement en tête (30.5% dans le Centre, à cinq points devant la droite ; 31.5% en Bourgogne-FC, à sept points devant la droite).
En revanche, l’extrême-droite anti-FN connaît des résultats extrêmement médiocres, avec 0.62% en PACA pour la liste Ligue du Sud (Bompard) qui a immédiatement annoncé son soutien à Marion Maréchal Le Pen pour le second tour, et 0.35% pour la liste Martinez dans le sud-ouest. Le PDF de Carl Lang, conscient de sa faiblesse, n’avait pas osé candidater contre la présidente du FN dans le Nord.
La droite parlementaire, qui espérait beaucoup de ces élections régionales, échoue donc à incarner l’alternative principale. Avec 26.8% des voix (résultat provisoire), il est devancé par le Front National. Le PS résiste en Bretagne et en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente et devrait conserver ces deux régions. Il est second en Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées et devrait s’y imposer logiquement, sauf si les électeurs de droite votent utile en faveur du candidat FN. La droite est première en Auvergne/Rhône-Alpes devant le FN, mais aussi en Normandie (devançant le FN de seulement 0.2 points), dans les Pays de la Loire et en Ile de France. C’est assez peu au final. Ses chances de succès au second tour sont néanmoins réelles dans ces régions.
Avec 23% des voix, le PS résiste à la montée en puissance des droites. Les autres gauches sont affaiblies (3.7% pour EELV, 1.64% pour le PCF, 2.76% pour une coalition EELV/Front de gauche, 2.38% pour le Front de Gauche), représentant en tout néanmoins 10.5% des voix.
Debout La France, la liste de Nicolas Dupont-Aignan obtient 3.84% des voix en France (sans les résultats de l’Ile de France où son président dépasserait les 6%), dans un contexte de fort vote Front National, ce qui est donc un résultat assez correct. Le parti ultra-souverainiste UPR obtiendrait 1% des voix environ. Enfin la liste Lutte Ouvrière obtiendrait 1.55% des voix, ce qui est le score habituel de ce parti depuis plusieurs années, même si cette fois il était sans concurrence, le Nouveau Parti Anticapitaliste étant absent. L’extrême-gauche stricto sensu est donc renvoyée à la marginalité qu’elle représente réellement en France.
La droite est divisée quant à la stratégie à tenir. L’UDI et le centre-droit poussent pour un désistement de la droite en faveur de la gauche là où elle est troisième, donc essentiellement dans le sud-ouest. Les Républicains maintiennent au contraire une ligne de défiance réciproque (PS = FN) et Nicolas Sarkozy s’oppose à ce que son parti se retire, même troisième, ou fusionne avec la gauche. C’est aussi ce qu’a répété Bruno Lemaire (LR). Le PS est donc prêt à un aberrant ultime sacrifice, se sabordant là où il est troisième, même lorsque la gauche réunie est en voix supérieur à la droite, ainsi en Provence ou dans le Nord. A cette heure, on ne sait pas quelle sera la stratégie du PS dans l’Est, son candidat refusant de se retirer, ce qui pourrait offrir à Florian Philippot la région. Il n’est pas dit en outre que l’électorat de gauche apprécie ce jeu tactique et se mobilise pour une droite accusée de complaisance avec les idées dites « d’extrême-droite ». Ce sacrifice peut donc être parfaitement vain, en plus d’être choquant d’un point de vue démocratique et irrespectueux des électeurs de gauche qui seront ainsi privés de toute représentation (toutes tendances confondues) au Conseil Régional pendant cinq ans.
Sur le papier, si le PS se retire, le FN pourrait n’obtenir aucune région. Mais c’est théorique. Dans le sud-ouest, les électeurs de droite vont-ils barrer la route au PS en votant Aliot ? Et les électeurs de gauche vont-ils se déplacer dans le Nord ou la Provence pour barrer la route au FN en élisant une droite qu’ils abhorrent au moins autant ?
Enfin, Debout la France va être confronté à un grave dilemme. En Ile de France, doit-il s’allier au second tour à la droite « républicaine » ou au FN ? En Pays de la Loire, sa candidate a déjà annoncé son soutien au FN. Et dans l’Est, où son candidat fait 4.78% des voix, que se passera-t-il, alors que le candidat FN est le plus souverainiste qui puisse exister ? Si Dupont-Aignan hésite, il devrait alors rester en dehors du Conseil Régional dans sa région. L’heure des choix pour lui a commencé. Son avenir politique en dépendra.
Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)
00:35 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : elections régionales 2015, front national, les républicains, parti socialiste, debout la france |
06/09/2015
Compléments à propos du FN.
Dans le dernier billet sur le FN, on a expliqué pourquoi ce dernier ne serait jamais dédiabolisé, ce qui aura pour effet à la fois de le maintenir à un haut niveau, à l'abri des critiques sur l'incohérence de son programme et en situation de recueillir les votes de contestation, et en même temps de fixer une limite à ce haut niveau, avec pour conséquence d'interdire son accès au pouvoir.
A peine Marine Le Pen avait-elle fait prononcer l'exclusion de son père, dans une stratégie de dédiabolisation bien accueillie au dehors, que les assauts contre son parti ont redoublé de la part du monde politiquement correct et des partis dits de gouvernement. Ils se sont même montrés plus violents qu'ils ne l'avaient jamais été.
C'est d'abord Jean-Christophe Cambadélis qui a annoncé que le FN, s'il arrivait au pouvoir, expulserait hors de nos frontières quatre millions de français musulmans. Or, même du temps de Jean-Marie Le Pen, aucune proposition de ce genre n'a jamais été formulée. De plus on se demande où Cambadélis est allé chercher le chiffre de quatre millions. Estime-t-il qu'il y a autant de partisans du djihad en France?
Ensuite l'invitation de Marion Maréchal-Le Pen à l'école d'été de la Sainte Baume, dans le cadre d'une opération de formation organisée par le diocèse de Fréjus-Toulon, a suscité des réactions indignées de la part de la classe médiatique et politique, jusqu'au président "républicain" du Sénat, Gérard Larcher. Il faut reconnaître que la hiérarchie de l'Eglise a soutenu cette initiative, en la replaçant dans le cadre du débat. Peut-être est-ce la raison de la fureur des opposants au Front. En même temps, pourquoi un représentant de la droite a-t-il cru bon de se mêler aux voix de gauche? C'est la preuve qu'une certaine droite est toujours menée par le PS, on peut même dire fraternellement. C'est aussi la preuve que l'esprit centriste n'est pas contenu à l'intérieur des structures du Modem, voire de l'UDI. Les ténors "républicains" que sont Juppé et Larcher sont bien au centre. Contrairement à leur électorat, bien sûr.
Pour finir, les médias ont donné la parole à Marine Le Pen sur la "submersion migratoire", profitant de son passage à Brachay où elle tenait son discours de rentrée. C'est ainsi qu'elle a été interrogée sur le sujet au journal de 20 heures de TF1. Le thème était généralement mis de côté ces derniers temps. Il fallait montrer que le FN restait lui-même.
Ainsi le FN est-il, d'un côté, encouragé à se normaliser et, de l'autre, accablé d'autant plus qu'il cherchera à le faire. Il est soumis à un système de régulation qui le maintient dans son rôle de nuire à la droite. Du moins est-ce ce qui est attendu.
Pierre EISNER (PSUNE/LBTF)
14:03 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Présidentielles 2022 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : front national, marine le pen, parti socialiste, dédiabolisation |
31/05/2014
Faut-il dédiaboliser le Front National ?
Depuis 2011 et l’accession à la tête du FN de Marine Le Pen, celle-ci est la promotrice d’une démarche de dédiabolisation, rompant avec la dialectique paternelle, afin de mettre fin au « cordon sanitaire » dont souffre sa formation politique, et accéder ainsi à des responsabilités. A la différence de la « dédiabolisation » version Mégret, qui était une stratégie, Marine Le Pen entreprend ce processus parce qu’elle ne veut pas être porteuse d’un message idéologique qu’elle ne partage pas. Sa volonté de « troquer » la lutte contre l’immigration, sous-entendue « extra-européenne », pour un souverainisme pur et dur doublé d’un « patriotisme » institutionnel, n’est pas non plus tactique. Cela relève au contraire d’une forme de sincérité, sans doute liée à une certaine incurie.
Néanmoins, cette « dédiabolisation » a atteint une limite, à savoir que ni la « gauche » ni la droite n’entendent mettre fin à cet ostracisme, accusant ce parti de tous les maux, et notamment de représenter une idéologie extrémiste, raciste et/ou fasciste. Même si l’UMP a choisi d’abandonner le front dit « républicain » pour un « ni PS, ni FN », ce qui le différencie de l’anti-fascisme incantatoire du PS, il maintient une solide distance de sécurité.
En vérité, ce que l’UMP et le PS condamnent, ce n’est pas le programme du FN mais un crypto-programme imaginaire qui ne s’y trouve pas, un « programme » qui en revanche reçoit l’approbation de millions d’électeurs à qui on a expliqué que le FN n’était pas un parti « comme les autres ». Dédiaboliser le FN c’est le prendre au sérieux tel qu’il est. C’est analyser sans passion, avec objectivité, son programme. Ce n’est pas lui prêter des intentions malveillantes.
Quel serait l’avantage pour l’UMP de procéder à une dédiabolisation aboutie ? Il ôterait au FN l’essentiel de ce qui fait son succès, sa dimension « sulfureuse ». Si le FN a réussi à obtenir 25% des voix aux élections européennes de 2014, c’est d’abord parce que ses électeurs se servent de ce vote pour envoyer un signal d’alarme et de colère aux autres partis. C’est parce qu’ils pensent sincèrement, puisque les media l’ont affirmé, que le FN est une alternative au système en place et qu’il souhaiterait entreprendre une politique de reflux migratoire. Le FN n’est donc pas un objet politique comme les autres puisqu’il sert de fantasme aussi bien à ses adversaires qu’à ses partisans.
A partir du moment où le FN serait traité comme les autres, les électeurs le verraient sous son vrai jour et se rendraient bien compte que ce parti n’est pas crédible tant du point de vue du programme économique que des qualités intrinsèques des individus à sa tête. En fait, la dédiabolisation du FN signifierait la mort à court ou moyen terme de ce parti. Il ne vit que grâce à ses adversaires. On comprend bien pourquoi l’UMP aurait intérêt à cette rupture, car elle lui permettrait de ne plus reculer devant la « gauche » et d’avoir à droite une réserve de voix pour le second tour. En outre, alors que la question de l’immigration a été tabouisée, sa dénonciation ayant été laissée à l’usage exclusif du FN, la dédiabolisation permettrait à la droite de reprendre à son compte ce thème.
Pour le PS, on comprend bien pourquoi cette dédiabolisation serait funeste. Elle ferait tomber le rôle de diviseur de la droite que Mitterrand a accordé au FN. La disparition du FN en outre ne supprimerait pas les causes de ce vote, qui cherchera à s’exprimer ailleurs. Cela pourrait offrir une opportunité pour l’émergence d’un courant politique réellement alternatif au système en place sur les questions d’identité et d’Europe, un courant de défense des Français et Européens de souche, par exemple, qui s’opposerait frontalement à la « gauche » mondialiste, sans être complice des victoires de cette même « gauche » par des attaques contre la droite, comme le fait le FN de Marine Le Pen.
C’est bien la peur d’un tel courant qui rend pour le PS un parti comme le FN précieux. Cela lui permet de stériliser dans le débat toutes les questions d’identité et d’immigration, et de maintenir de 15 à 25% des électeurs dans une voie politique de garage. En laissant le « monopole du réel » au FN, la droite, de peur d’être diabolisée à son tour, fait le succès de ce parti.
Un Front National réellement dédiabolisé, cela n’intéresse aucun électeur. Identique aux autres partis, dont il partage fondamentalement les travers, mais sans la compétence réelle de gouvernement, il perdrait tout crédit. C’est pourquoi la stratégie de Marine Le Pen est une erreur majeure du point de vue de son parti. Elle a eu la chance que droite et « gauche » maintiennent ce blocage et cette injustice a été le carburant de ses victoires électorales. Quand un électeur veut sanctionner les ténors de la droite ou de la « gauche » au pouvoir, quand il veut manifester sa colère contre une immigration de moins en moins maîtrisée, il vote FN. Il est alors sûr de voir la mine déconfite des dirigeants du PS et de l’UMP et, à défaut que son message soit entendu, il aura au moins eu le sentiment de l’avoir transmis.
Il n’est pas vrai que le Front National bénéficie d’un « vote de conviction » parce que ses électeurs ne votent pas pour le programme du FN mais pour ce qu’ils croient y trouver et qui en vérité n’y est pas. 88% de ses électeurs ont voté pour le FN principalement en raison de leur opposition à l’immigration, pas à cause de l’€uro ni de la volonté de ce parti de faire quitter l’Union Européenne. Or, « Marine » a interprété ce résultat comme un rejet de l’Europe et dans son discours de victoire n’a pas évoqué une seule seconde la problématique migratoire. Le souverainisme assumé représente moins de 5% de l’électorat. Si les électeurs du FN le jugeaient tel qu’il est, et non tel qu’ils croient le voir, par la faute des media et des autres partis politiques, le FN aurait réellement fait moins de 5%, mais cela aurait laissé le champ libre à des formations réellement identitaires.
Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)
20:42 Publié dans Analyses, Anti-mythes, Billets, Elections en Europe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : front national, ump, dédiabolisation, identitaires, euroscepticisme |
02/02/2014
Y aura-t-il une vague eurosceptique en mai 2014 ? 2/2
Une vague eurosceptique ?
Deux types de mouvements nationalistes et/ou eurosceptiques semblent émerger, selon que l’on se trouve en Europe occidentale ou en Europe centrale.
En Europe centrale, deux mouvements se distinguent, à savoir l’Aube Dorée, mouvement néo-fasciste au discours surtout centré sur le problème de l’immigration non-européenne, et le Jobbik, parti national-radical de type « hungariste », favorable à la Turquie et à l’islam au nom d’une définition eurasienne fausse de la magyarité, dans un pays où l’immigration est très réduite. Ces partis, au cœur matriciel judéophobe, connaissent un certain succès, dépassant les 13% dans les sondages. L’Aube Dorée a certes été très fragilisée par l’arrestation et la mise en examen de ses principaux ténors, ce qui n’empêchera pas la progression électorale de ce mouvement, vue la situation de la Grèce.
Mais dans le reste de l’Europe centrale, les mouvements nationalistes, qui parfois se sont retrouvés au second tour d’élections présidentielles, sont en très net recul. Le « mouvement national » polonais, en pleine reconstruction, sera très loin des scores passés de la Ligue des Familles ou de Samoobrona. En Roumanie, le PRM (« Grande Roumanie ») est en pleine déliquescence, de même qu’Ataka en Bulgarie, le Parti National Slovaque (SNS) comme son homologue slovène ou le HSP croate. Quant à l’allié traditionnel du FN en Serbie, le Parti Radical Serbe (SRS), certes d’un pays qui n’est pas encore membre de l’Union Européenne, il sombre littéralement sondage après sondage.
En revanche, en Europe occidentale, les sondages indiquent une nette progression des mouvements eurosceptiques, toutes tendances confondues, et ce autour de deux coalitions en gestation. Autour du FN de Marine Le Pen et du PVV de Geert Wilders, désormais alliés, s’organise une coalition hétéroclite de mouvements, comme Plataforma y Espana (extension espagnole du mouvement catalan) ou la Ligue du Nord, deux mouvements qui n’auront probablement aucun élu en mai 2014, mais surtout des poids lourds de la mouvance « nationale », à savoir le FPÖ de Strache, premier parti du pays selon certains sondages (autour de 25%), le Vlaams Belang belge et les Sverigedemokraterna, crédités de plus de 10% de voix dans les sondages suédois.
Une deuxième coalition, souverainiste davantage que nationaliste, repose sur la tendance UKiP de Nigel Farage, en tête dans la dénonciation de l’Union Européenne, non sans un succès indéniable, puisqu’il parvient à peser sur les Tories de David Cameron, et pourrait obtenir 20% des voix au Royaume-Uni, faisant disparaître un British National Party qui avait pourtant obtenu près de 6% des voix en 2009. Sur cette ligne, modérée sur la question migratoire, se retrouvent le DFP danois, anciennement dirigé par Pja Kjarsgaard, qui lui aussi pourrait atteindre 20% des voix, mais aussi le Perussuomalaiset finlandais de Timo Soini (16/18%).
La première a peu de chances de créer son propre groupe parlementaire à Strasbourg car il faudrait 25 députés, ce qu’ils auront, mais issus de sept pays de l’UE, ce qu’ils n’auront pas. Malgré ses prétentions, Marine Le Pen ne devrait pas parvenir à créer le dit groupe. Dans ce cadre, Wilders pourrait être tenté de rejoindre la seconde coalition une fois les élections passées. Car le second groupe ne devrait avoir aucun mal à conserver celui dont il dispose déjà.
Mais tout ça part d’un principe un peu douteux, à savoir la confiance qu’on peut avoir envers les sondages. Il est assez ironique de constater que le nouveau FN s’appuie sur des sondages, alors même qu’il avait eu dans le passé comme habitude d’en dénoncer le caractère artificiel et partisan, tant que ceux-ci lui étaient défavorables. Cela amène Marine Le Pen à se vanter de représenter le futur premier parti du pays, si les sondages où le FN est à 23% sont confirmés dans les urnes. Elle oublie que la participation est déterminante dans le résultat des partis. Si son électorat, dont elle attise l’euroscepticisme en permanence, reste chez lui au lieu de manifester son soutien en mai 2014, non seulement elle ne fera pas ses 23% mais le FN pourrait n’obtenir qu’un médiocre 12 ou 13%. Il est en effet paradoxal de dénoncer l’Union Européenne mais de bénéficier de ses institutions, lorsqu’on n’arrive pas à se faire élire député national. Pourquoi un électorat anti-UE irait-il se déplacer dans des élections pour élire le parlement de cette même UE ?
Cette vague eurosceptique, indéniable, pourrait ainsi voir son impact considérablement limité par un électorat qui ne se mobiliserait pas pour une élection dont l’intérêt ne lui sauterait pas nécessairement aux yeux. Même si le gouvernement français est à juste titre extrêmement impopulaire, il n’est pas dit que cela se manifestera dans des élections atypiques où de toute façon PS et UMP font classiquement de mauvais scores. La méthode Coué marche parfois mais il faut faire attention aussi de ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué.
En outre, même si cette poussée électorale avait lieu, dans la plupart des grands pays européens, avec par exemple l’arrivée de députés allemands de l’AfD, et un FN et un UKiP en tête, les groupes eurosceptiques, même s’ils surmontaient leurs divisions historiques, auraient un poids fort limité et seraient incapables de peser. En effet, en refusant de toute façon toute alliance avec les rares mouvements nationalistes d’Europe centrale en mesure de faire rentrer des députés, et même en les acceptant d’ailleurs, ce qui est impensable pour un Geert Wilders, ils seraient trop faibles. Les mouvements nationaux en Europe Centrale ont quasiment disparu, alors même qu’en Espagne, en Irlande ou au Portugal, ils continuent d’être inexistants. Pour qu’il y ait une vague eurosceptique, il faudrait qu’elle soit le fait de partis concertés, présents sur tout le continent, et dans une coalition explicite et revendiquée.
Ainsi peut-on penser que cette « vague eurosceptique » sera très modeste, loin d’un tsunami, même si le nombre de députés eurosceptiques n’aura jamais été aussi important. Cela ne changera rien à la situation du continent, qui continuera de mourir de sa division et non d’une fédéralisation imaginaire, mais cela amènera peut-être au niveau national à quelques modifications à la marge. En effet, un FN devenu premier parti du pays, obligerait peut-être le gouvernement à une légère réorientation mais gênerait davantage la droite parlementaire que la « gauche » mondialiste. Cela reste très hypothétique. Il sera au contraire facile de relativiser un résultat avec un taux de participation qui sera de toute façon faible, donc jugé non représentatif, et le vote de 15 à 25% d’électeurs ne servira une fois de plus à rien.
Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)
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Y aura-t-il une vague eurosceptique en mai 2014 ? 1/2
Pourquoi l’Union Européenne est impopulaire.
Tous les sondages en Europe annoncent une forte poussée des mouvements eurosceptiques ou europhobes aux élections européennes de 2014. L’Union Européenne est en train de payer son incapacité à parler d’une seule voix et à se placer au service véritable et exclusif des Européens, des indigènes/autochtones du continent européen. Car en vérité, nous n’avons pas bâti l’Europe politique, qui reste à construire. En l’absence de toute transparence démocratique, limitée dans ses pouvoirs d’action par des traités contraignants qui ont maintenu le véritable pouvoir au niveau de chaque état-« nation », état de plus en plus autoritaire au fur et à mesure qu’il devient de moins en moins « national » d’ailleurs, l’Union Européenne ne peut qu’être contestée. Et en outre, elle se refuse à accuser les véritables responsables de son impopularité, les gouvernements des Etats.
L’Union Européenne sert à faire le sale « boulot » pour les gouvernements, qui souhaitent la même politique libérale et atlantiste, mais n’ont pas le courage de l’assumer directement devant le peuple. Qui peut croire ainsi que le PS actuel est « socialiste » et « démocrate » ? Mais il ne l’est pas non parce que la « méchante Union Européenne » l’obligerait à renier son identité, mais parce que l’Union Européenne est à l’image des chefs de gouvernement et de partis. Quel est le pouvoir du président du PPE ou de l’ADSE sur les partis membres ? Strictement aucun. Gustavo Barroso, le président de la Commission, est redevable d’un pouvoir qu’il ne tient que des chefs d’état et de gouvernement, et pas du véritable pouvoir que confère le suffrage universel. Il est la courroie de transmission de Paris et de Berlin… mais aussi de Washington.
L’Union Européenne n’ayant pas de réel pouvoir et n’étant pas dirigée par de véritables européistes, elle est accusée de tous les maux sans avoir les moyens de se défendre efficacement contre une propagande europhobe aussi mensongère que la propagande « euro »-mondialiste à laquelle la dernière prétend s’opposer.
En attaquant l’Union Européenne, « nain politique » par la faute des Etats, on exonère ainsi facilement de toutes responsabilités le gouvernement en place. En accusant l’€ de la ruine économique du continent, alors que l’€ n’a pas empêché le relèvement irlandais, et n’est la cause ni de l’effondrement économique de l’Islande ni de la politique d’extrême rigueur budgétaire appliquée à Londres, on se sert de la monnaie unique comme d’un bouc émissaire afin de ne pas aborder les sujets qui fâchent.
Le nouveau Front National a ainsi troqué le thème de la lutte contre l’immigration, sous-entendue extra-européenne, pour la lutte contre l’Union Européenne. Ce faisant, il trahit ses électeurs qui votaient ou votent pour lui pour la seule raison qu’ils croient que ce parti va résoudre cette question. Le néo-chevènementisme symbolisé par le ralliement opportun de Florian Philippot, mais qui n’est pas nouveau, ne fait que matérialiser l’acceptation d’une définition universaliste et néo-colonialiste de la France. Le mouvement UKiP, qui n’a pas un mot contre l’immigration issue du Commonwealth, s’en prend quant à lui aux travailleurs européens, Polonais, Roumains et Bulgares, comme si c’était eux qui étaient le problème. Cette démagogie europhobe, qui trahit en réalité un ralliement total à l’idéologie mondialiste, celle d’une définition « multiculturelle » de l’identité « nationale » des Etats européens, est évidemment insupportable mais contre elle l’Union Européenne ne fait rien. Elle préfère à l’instar d’une Viviane Reding exciter les colères justifiées des Européens contre une immigration non désirée en exigeant davantage encore d’ouverture des frontières, quand le peuple souhaite le contraire.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, l’Union Européenne est, souvent à juste titre mais parfois fort injustement aussi, impopulaire. C’est donc logique qu’elle suscite en réaction une montée de mouvements hostiles à l’UE, même si pour des raisons malhonnêtes intellectuellement et en trahissant les intérêts de leurs propres électeurs. Le ralliement du FN à l’idéologie souverainiste sera sans doute sa perte mais pour le moment, dans le contexte actuel, ce n’est pas le cas.
15:04 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Institutions européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : union européenne, euroscepticisme, mondialisme, front national |
27/10/2013
Guillaume Faye et la gouvernance "française" (1)
Le politiste engagé Guillaume FAYE, partisan de l'Europe comme nation, comme le rappelle l'intitulé d'un de ses anciens ouvrages, "Nouveau discours à la nation européenne", a accepté notre invitation à évoquer sa conception du monde à partir des questions thématiques que nous lui avons posées. Chaque jour, Le Blog Thomas FERRIER publiera ses réponses. Vous pouvez également retrouver ses analyses sur son propre blog, www.gfaye.com . Je précise à toutes fins utiles que les propos de Guillaume Faye ne réflètent pas nécessairement les positions de notre blog.
Nous ouvrons le bal par le thème de la politique française et notamment de la présidence "Hollande".
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LBTF: Juste quelques mots sur ce que vous inspire l’actualité politique du moment : affaire Cahuzac, bilan de François Hollande, « mariage pour tous », baisse programmée des allocations familiales, taxation future et probable des Smartphones et plus généralement de tout appareil connecté, laxisme judiciaire, affaire du « mur des cons », affaire du RER de Grigny, émeutes à Trappes, Colombes, Stockholm, agression islamique d’un militaire à Londres, Paris, situation de guerre civile à Marseille, affaire Méric, affaire Vikernes, affaire syrienne (faut-il intervenir ou pas ? Intérêt ou pas pour l’Europe ?)…
Guillaume FAYE: Pour tous ces commentaires politiques, vous voyez mon blog, J’ai Tout Compris ou gfaye.com Le gouvernement socialiste mène sa politique catastrophique dans la plus parfaite inconscience. C’est l’idéologie qui dirige, mêlée aux calculs politiciens classiques, à l’improvisation, etc. L’affaire Cahuzac est très amusante et reflète les terrifiantes contradictions de la gauche et de ce pays : voilà donc un ministre chargé de taxer et d’assommer fiscalement ses concitoyens qui, lui-même, fraude le fisc qu’il estime (d’ailleurs à juste titre) confiscatoire et racketteur. C’est l’arroseur arrosé, le gendarme-voleur. L’État le savait et l’a protégé en vain. La commission parlementaire d’enquête, entièrement truquée par le PS, a essayé de limiter les dégâts.
Mariage pour tous ? Ça fait plus de dix ans que j’avais dit que ça arriverait inéluctablement. C’est un symptôme, il faut s’attaquer aux causes. Sur l’insécurité et la criminalité (dues au mélange détonnant d’immigration incontrôlée et de laxisme judiciaire) nous allons monter vers des niveaux stratosphériques. Comme je l’ai souvent dit, nous nous dirigeons (pas seulement en France) vers soit une rupture, aux conséquences révolutionnaires, soit une mort tiède (Warmtod, concept éthologique lorenzien) , un effondrement mou. Il ne faut pas exclure , sous des formes imprévisibles, la révolte populaire massive des Européens de souche. Un phénomène viral, épidémique, transpolitique, qui ne toucherait pas que la France mais pourra se répandre comme une nuée ardente, au ras du sol, dans l’Union européenne. L’Histoire est ouverte, l’avenir est détectable mais non pas prévisible, l’impensable peut se produire. Mais l’Histoire, quand elle déchaine ses vagues, « n’épargne pas le sang », comme disait Jules César.
LBTF: En règle générale, comment voyez-vous le fonctionnement de l’actuelle présidence ?
Guillaume FAYE: François Hollande n’est pas à la hauteur d’un chef d’État, encore moins que ses prédécesseurs. Le dernier homme à la hauteur fut Pompidou. Pourquoi cette situation ? La cause est sociologique. Les élites, les vraies, se détournent de la carrière politique. Elles se destinent à la carrière économique (y compris à l’étranger). Les élus, le personnel des cabinets ministériels, les ministres sont d’un niveau plutôt en dessous de la moyenne requise par la fonction. Le plus étonnant, c’est au gouvernement, dont les membres (surtout les femmes) sont nommées au regard de critères (y compris la ”diversité”) qui n’ont rien à voir avec la compétence. Mme Duflot, Mme Taubira, Mme Touraine, Mme Filipetti, Mme Belkacem etc. sont des militantes, des idéologues, mais toutes atteintes par le principe de Peter : dépassement du niveau de compétence (c’était la même chose avec Rama Yade, un vrai gag ambulant). Ce n’est pas nouveau : un Kouchner aux Affaires étrangères était aussi inapte qu’un Douste-Blazy ou aujourd’hui que le prétentieux Fabius (rien à voir avec Hubert Védrine). Bref, pas de pros ou trop peu. La sphère politicienne souffre globalement d’un manque de niveau. Autant que d’une absence de vision, d’intuition et de bon sens.
Second élément, très grave aussi : la pollution de la classe politique, droite et gauche, par les briques idéologiques de la vulgate mortifère que nous connaissons bien., notamment sur la question de la préservation de l’identité ethnique européenne. En rupture avec les sentiments intuitifs d’un peuple de souche, invisible et sans droit à la parole.
LBTF: Par son côté « inamovible », par l’autisme dont semble faire preuve le Président de la République vis-à-vis d’un mécontentement croissant, illustré par une côte de popularité au plus bas, ne peut-on pas y voir là une certaine dérive monarchique, spécifique à la France, a contrario par exemple des Etats-Unis, où il existe, gravé dans le marbre constitutionnel et juridique, une procédure pouvant destituer le Président de ses fonctions (impeachment).
Guillaume FAYE: Le problème n’est pas tant constitutionnel que relevant du ”peuple français” lui-même, qui est très pusillanime. On mérite ceux qu’on élit. La France est une république monarchique, la Grande Bretagne, une monarchie républicaine. Cela dit, deux rois de France sur trois n’étaient pas à la hauteur, pas plus qu’un Princeps Augustus romain ( on traduit faussement pas ”Empereur”) sur deux. Le problème réside plus dans la solidité de la société civile et de la congruence du corps social autour de la Nation. Aux USA, la destitution est exceptionnelle. En France, elle est remplacée par la cohabitation : le Chef de l’État, le PR, rendu impuissant par une majorité parlementaire hostile. Si, après l’élection de M. Hollande, l’électorat avait élu une majorité non-socialiste au Palais Bourbon, M. Hollande n’aurait pas pu appliquer son programme. Il aurait passé ses journées à l’Élysée, à tourner en rond.
Guillaume FAYE: Les réponses à ces questions sont largement exprimées dans mon blog J’ai Tout Compris. Le FN recueille des voix non-politiques, protestataires. Sa critique des actuelles institutions européennes est exacte, mais la vision de l’Europe qu’il en tire est erronée. D’ailleurs, (contradiction) le FN a prospéré sur les élections européennes tout en étant anti-européiste. Passons. Le vote FN est essentiellement motivé par les problèmes d’immigration massive, d’islamisation et d’insécurité, toutes choses liées. Les positions du FN sur l’économie et le social sont erratiques et irréalistes. Le FN occupe une position symbolique dans la dramaturgie politique française mais pas encore gouvernementale. Il y a une forme de jacquerie dans le vote FN.
Concernant la question européenne, le FN rejette en bloc l’UE et l’Euro, parfois pour de bonnes raisons critiques. Cependant, les solutions du FN sont techniquement inappropriées. Sortir de l’€uro, c’est 40% d’inflation pour le Franc de retour et la fonte des neiges pour toutes les épargnes. La cata. Il vaut mieux modifier la structure du navire Europe en construction que de le couler. Encore une fois, l’idée européenne est la bonne mais les institutions européennes doivent être corrigées, comme l’idéologie qui les anime. La question centrale est d’ailleurs l’idéologie : une France souverainiste sans UE avec l’idéologie actuelle, il n’y aurait aucune différence. Le poison, ce n’est pas l’UE ou Bruxelles, c’est la mentalité générale qui nous corrompt. Elle est présente au cœur de toutes les élites de chacun de nos pays. Le problème, ce n’est pas l’UE, pas Bruxelles, pas le souverainisme, c’est l’idéologie dominante : le renoncement à l’identité ethnique et culturelle. L’ennemi, ce n’est pas l’ « Europe », c’est une pathologie mentale. Et, si une révolution surgit, une révolte, elle ne pourra être qu’européenne, c’est à dire épidémique – avec la Russie en arrière cour, derrière le décor.
Concernant Aymeric Chauprade et sa remarque que vous citez, je dirais que le problème migratoire a atteint un point de non-retour en Europe. Exactement comme un processus thérapeutique qui doit passer des médicaments à l’intervention chirurgicale. Pour résoudre ce problème, il faudra instaurer des protocoles douloureux. Inverser la tendance, repasser le film à l’envers, effectivement, C’est un processus révolutionnaire, qui relèvera d’une polémologie lourde. Je n’en dirai pas plus.
13:30 Publié dans Analyses, Entretiens, Guillaume Faye | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : guillaume faye, politique française, europe, françois hollande, front national |
13/10/2013
Diaboliser ou dédiaboliser le FN ? PS vs UMP 2.0
De Libération accusant le FN d’être « 100% extrême-droite » et Marine Le Pen d’être une faf (« fasciste ») à des élus socialistes partis en croisade contre ce parti (Désir, Carlotti qualifiant le FN de « fasciste », Mandon évoquant « un parti national-fasciste » donc mussolinien, Assouline… etc), la « gauche » a décidé d’axer son plan de communication dans sa lutte contre un « fascisme » imaginaire, dans un anti-fascisme de bazar, une attitude que Lionel Jospin avait fustigée il y a quelques années, révélant qu’il n’avait jamais été autre chose qu’une stratégie.
Le FN avait survécu aux années 70 en restant un groupuscule alliant néo-fascistes et nationaux conservateurs. Avec François Mitterrand aux affaires, ex-volontaire national du mouvement du colonel de La Rocque, et qui avait défilé dans les années 30 contre « l’invasion métèque » aux côtés de camelots du roi, le FN allait se voir propulser en haut des écrans. Pour le président « socialiste », qui connaissait bien l’extrême-droite, et connaissait parfaitement aussi sa profonde médiocrité, il s’agissait de conserver le pouvoir en divisant la droite. Il ne s’agissait pas de favoriser un PFN ou une « nouvelle droite » prêts à s’allier avec armes et bagages avec la droite classique, mais de mettre en avant un provocateur né du nom de Jean-Marie Le Pen.
Et pour que ce Front National ne puisse pas être tenté de jouer la carte d’une « droite plurielle », Mitterrand a aussi inventé SOS-Racisme, officine du PS chargée de mettre en plan la fameuse diabolisation, face à laquelle la droite, RPR comme UMP, se retrouvera démunie, de peur d’assumer un discours plus ferme. Sans le talent rhétorique de Le Pen, malgré tout, et de ses lieutenants, le FN n’aurait été qu’un feu de paille. Avec les 11% obtenus aux élections européennes de 1984, puis le gain d’une trentaine de sièges de députés en 1986, grâce à l’introduction du scrutin proportionnel sous Mitterrand, le FN s’installe durablement dans le paysage politique national.
En 1987, le dérapage de Le Pen concernant le fameux « détail » donne un formidable élan à l’opération de diabolisation, qui n’avait pas encore pris corps. Désormais, Le Pen est devenu un paria au sein de la vie politique. Mais il commence vite à découvrir les avantages de la diabolisation, qui lui permet d’incarner un vote anti-système. Il n’y a pas que des désavantages à jouer le rôle du diable, d’autant plus qu’il est désormais convaincu que le « détail » va définitivement contrarier le destin national qu’il imaginait pouvoir jouer. Pour le PS, la diabolisation permet non seulement d’empêcher toute alliance droite/FN mais aussi d’accuser la droite de « faire le jeu du FN », alors même qu’elle tente de donner tous les gages possibles pour s’en distancer.
A la fin des années 80, la droite pense avoir trouvé la parade, en durcissant le ton sur la question migratoire. Chirac et « le bruit et les odeurs », Giscard dénonçant en 1991 l’immigration-invasion et prônant le droit du sang, vont tenter d’affaiblir ce FN si infréquentable. Pour que cette stratégie fonctionne, ce qui ne sera le cas qu’un bref instant pendant la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007, il faut des actes et non des paroles. Or les actes ne viendront pas. Au contraire, la droite se place toujours à la remorque de la « gauche » et ne revient jamais sur les décisions politiques prises par ses adversaires lorsqu’ils ont été au pouvoir. Tétanisés par une peur qui les paralyse, la peur d’être associée à « la bête », le RPR, l’UDF puis l’UMP n’ont jamais su mettre en œuvre une politique qui puisse faire reculer son adversaire à sa droite. Au contraire, le centre-droit à la Chirac et à la Juppé, fort peu éloigné sur les questions sociétales de la « gauche », a tout fait pour établir un cordon sanitaire entre lui et le FN. Et aujourd’hui encore Fillon est vigoureusement critiqué pour avoir laissé entendre pouvoir préférer un candidat FN à un candidat PS, alors que Copé a rappelé la règle du jeu, le refus de toute alliance sous aucun prétexte avec le FN, et l’exclusion de tout candidat ou militant qui enverrait un signal politique en ce sens.
Le plan ourdi par Mitterrand a fonctionné mieux qu’il ne pouvait l’imaginer puisque, même s’il est mort depuis dix-sept ans, sa stratégie lui a survécu au point d’être réactivée par un François Hollande au plus bas des sondages. Car la campagne médiatique que mène le PS contre le FN ne doit pas nous tromper. Elle permet de faire monter le FN qui se pose en victime d’attaques injustes, Marine Le Pen faisant son possible pour épurer son parti de tous les nationalistes, offrant sa tribune à des anciens du PS, de l’UMP ou du MoDem propulsés candidats à peine leur adhésion validée. Lorsqu’un sondage annonce un FN à 24% aux élections européennes, ce qui ne doit pas surprendre vu l’état du pays depuis l’élection d’Hollande, on devine un jeu dangereux mené par le PS. On devine qu’Hollande, pour être réélu en 2017, doit par tous les moyens éviter une candidature Sarkozy et surtout faire monter une Marine Le Pen, afin que cette dernière se retrouve au second tour face à lui et lui assure ainsi une réélection dans un fauteuil, au prix de faire imploser la droite classique et d’offrir à « Marine » un bon 40%.
De fait, une alliance objective a eu lieu entre le PS et le FN, même s’ils s’affrontent durement sur un plan médiatique. Mais en 2012, les dirigeants du FN ont appelé en interne au vote Hollande. Et la campagne médiatique contre eux sert remarquablement leurs intérêts, faisant de Marine Le Pen l’opposante en chef au gouvernement, alors que la droite classique est meurtrie par des querelles d’ego et par une totale incohérence stratégique. Fillon prône dans son programme le rétablissement du droit du sang alors que dans le même temps il dénonce à Valeurs Actuelles une campagne trop droitière de Sarkozy en 2012. Copé évoque un enfant à qui on aurait volé un pain au chocolat pendant le ramadan, pour ensuite expliquer à quel point les idées du FN le répugnent. Les électeurs de l’UMP, dont une majorité est favorable à des alliances locales avec le FN, n’y comprennent plus rien.
Si le PS a inventé la diabolisation du FN pour nuire gravement à la droite, cette dernière aurait dû contre-attaquer par une politique de dédiabolisation, traitant le FN comme n’importe quel autre parti de droite et en se calquant sur l’attitude du PS vis-à-vis du Front de Gauche. Le problème c’est que l’UMP imagine avoir besoin des centristes, par exemple ceux de l’UDI, pour gagner les élections, et craint donc de les perdre en marquant le curseur trop à droite, et sait aussi avoir besoin d’un bon report des électeurs du FN au second tour. Cette position instable, qui oblige les leaders de l’UMP à adopter des attitudes contradictoires, est vouée à l’échec. Patrick Buisson avait bien compris quelle stratégie il était nécessaire d’adopter, ce qu’a fait Nicolas Sarkozy avec succès en 2007. Il n’y en a pas d’autre.
Si Nicolas Sarkozy a perdu les élections en 2012, c’est entre autres choses parce qu’il n’a pas su maintenir de manière déterminée cette ligne, s’affublant comme directrice de campagne de la centriste Kosciuszko-Morizet, au discours très conformiste. Lorsqu’il a compris qu’il était nécessaire à nouveau de durcir le ton, il était trop tard, surtout que la déception des électeurs avait été à la hauteur de l’espoir que Sarkozy avait suscité en 2007. Sa crédibilité sur les questions « identitaires » était émoussée. Sarkozy avait réussi à faire quasiment disparaître le FN de la scène politique nationale, tombant même à 4,3% des voix aux législatives de 2007, mais son incapacité à mener la politique qu’il avait promise, ses compromissions avec la « gauche » bobo, préférant choisir ses ministres chez ses adversaires que dans son propre camp, son ralliement objectif à l’idéologie mondialiste et à son arrogance financière, l’ont amené au désastre. Le FN, après être tombé de la roche tarpéienne, a réussi à remonter le capitole et désormais pourrait être devenu le premier parti du pays.
Sarkozy aura été le fossoyeur de la droite nationale mais aussi celui qui aura permis sa résurrection, comme si l’UMP avait été le bûcher d’où a pu renaître ce sombre phénix. Mais la leçon n’a pas été apprise par ceux qui s’envisagent comme ses successeurs, Fillon en tête.
Pour parer les coups de la « gauche », qui accuse l’UMP de collusions avec le FN, la droite devrait s’affirmer et prôner officiellement la fin de la diabolisation et l’ouverture à droite. Il convient de traiter le FN comme un parti comme les autres, ce qui ne signifie pas le ménager sur ses propositions les plus mauvaises, comme son rejet de la construction européenne et de l’€uro, mais être prêt au cas par cas à des alliances avec lui. En faisant tomber le mur entre les deux formations, la stratégie de la « gauche » sera vaincue et la droite pourra envisager un avenir. Dans le même temps, les électeurs seront contraints de voir le FN tel qu’il est et non pas tel que ses adversaires et les media le présentent. Le capital de sympathie dont jouit ce parti parce que les Français l’imaginent autrement qu’il n’est en vérité s’effondrera.
Il ne faut pas oublier que, contrairement à ce qu’affirme le PS, qui accuse le chômage et la précarité d’être la cause du vote FN, la raison principale et quasi unique pour laquelle de plus en plus de Français votent FN est la question de l’immigration extra-européenne et de l’insécurité qu’elle génère. Or, sur ces questions qui bâtissent son socle électoral, le FN de « Marine » est en train de virer sa cutille et au nom d’une vision universelle de la France, associée à un nationalisme europhobe, renoncer à son opposition à cette immigration là. Le FN accepte de fait l’idéologie de la diversité qu’il a prétendu fustiger depuis de nombreuses années, mais les électeurs ne s’en rendent pas compte puisque la « gauche » et les media affirment que le FN est un parti raciste.
En faisant sauter le verrou de la diabolisation, les électeurs du FN verront que « leur » parti est comme les autres, qu’il n’est qu’une variante de chevènementisme, et que la solution ne s’y trouve pas. Et même s’ils ne se tournent pas vers la droite classique, qui n’est pas plus lucide que le FN sur cette question essentielle qui tourmente les électeurs, ils pourront contribuer à l’émergence d’une véritable alternative politique au système en place.
Dédiaboliser le FN, c’est redonner à la démocratie toute sa place, en condamnant les anathèmes et en arrêtant de persécuter toute personne qui à un moment ou à un autre croit trouver dans le FN une solution à nos problèmes. Les réactions suite aux propos d’Alain Delon ou de Jean Roucas sont scandaleuses. Un citoyen doit avoir le droit de choisir librement quel parti il veut soutenir, sans être inquiété dans sa vie professionnelle comme dans sa vie personnelle. Ces réactions indignes que relaie la presse à chaque ralliement font d’ailleurs le jeu du FN.
Lorsque le FN aura été traité comme les autres partis, lorsqu’affirmer son soutien à ce parti n’aura aucune conséquence, il apparaîtra sous son vrai jour. Non pas comme un parti d’extrême-droite. Mais pas plus comme une alternative au fameux « UMPS ». Il apparaîtra comme un parti qui n’a pas compris les causes de l’effondrement de notre civilisation et en conséquence n’y apporte pas les bonnes solutions. C’est parce que le FN a l’image d’un parti « pas comme les autres » qu’il devient populaire. Si le FN apparaît comme le parti du système qu’il est, une fois l’image de radicalité qui lui est associée par les media évaporée, il s’effondrera car la dédiabolisation aboutie, que souhaite pourtant Marine Le Pen, c’est la mort du FN.
14:06 Publié dans Analyses, Elections en Europe, Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : front national, diabolisation, dédiabolisation, ump, démocratie, europe |
23/06/2013
Le « tous contre un » passe de justesse
Le second tour de l’élection partielle de la troisième circonscription du Lot et Garonne se déroulait ce dimanche, opposant à la désagréable surprise du PS, grand vaincu du premier tour, le candidat UMP Jean-Louis Costes, que Jérôme Cahuzac aurait décrit aujourd’hui au journal Le Monde comme un homme « détesté du plus grand nombre », au candidat FN Etienne Bousquet-Cassagne, fils d’un notable de droite de la région.
Alors que le PS avait appelé à un Front Républicain, dans une circonscription classiquement située au centre-gauche, afin de barrer la route à un potentiel troisième député pour le FN, la participation a augmenté mais avec un vote blanc important, près de 8% des bulletins. Il s’agit de toute évidence d’électeurs de gauche refusant de choisir entre la droite et l’extrême-droite.
Avec 53,76% des voix contre 46,24% pour son adversaire, le candidat UMP s’impose. Il a pu récupérer une partie des électeurs ayant porté leur vote sur des candidats divers droite et des électeurs du PS qui ont suivi les consignes officielles du parti. Néanmoins, le score du FN est impressionnant, dans une circonscription où il était notoirement plutôt modeste. Il a progressé entre les deux tours de plus de 7095 voix, quand l’UMP progressait de 8762 voix, disposant déjà d’une petite avance.
Dans ce cadre, il paraît évident que la droite a assuré la victoire de son candidat naturel, le report des voix en faveur du candidat FN étant principalement et de toute évidence de gauche. L’électorat populaire, par delà les consignes des partis nationaux, se reconnaît davantage dans le discours populiste du néo-FN, avec en arrière fond un ras le bol non seulement envers la corruption des élus (Cahuzac), la déception provoquée par Hollande mais aussi contre une allogénisation qui, sans être comparable à celle de la région parisienne, agace de plus en plus.
Si une victoire du candidat FN était hautement improbable compte tenu du mode de scrutin en vigueur et de la cartographie électorale de ce département, le score du FN reste très élevé et surtout c’est sa marge de progression qui est impressionnante. Il est ainsi passé de 26% à un peu plus de 46% des voix entre les deux tours. On avait de la même façon constaté dans l’Oise une progression au moins aussi impressionnante. C’est certes insuffisant pour s’imposer, même si cette barre symbolique des 50% n’est pas infranchissable. A Marseille, dans la circonscription de Sylvie Andrieux, condamnée mais non encore démissionnaire, le candidat FN, Stéphane Ravier, semblerait capable de s’imposer si une partielle avait lieu. Il n’avait perdu que de très peu en 2012. Dénoncer la corruption serait certainement un slogan de campagne efficace.
Alors que la cote de popularité du président en exercice, après une légère accalmie, repart à la baisse, et que la rentrée s’annonce difficile avec la question des retraites qui va revenir sur la table, ce résultat est un avertissement lourd pour l’actuelle majorité mais aussi pour son opposition. Arnaud Montebourg, qui s’en prend au président de la commission Barroso, qu’il accuse de favoriser la montée du FN par des déclarations publiques inopportunes, ne s’y est pas trompé. Sa déclaration ne suffira pas à détourner l’électorat populaire de cette impasse politique qu’est le vote FN, dont l’europhobie exacerbée est plus que déraisonnable.
Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)
21:14 Publié dans Analyses, Elections en Europe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : élection partielle, lot et garonne, front national, ump, jean-louis costes |
23/12/2012
François Hollande en Algérie : une faute morale et politique
Le discours contesté d’un président.
Annoncée depuis plusieurs semaines par les media de France et de Navarre, la visite du président français en Algérie, pour le cinquantenaire de l’indépendance du pays était attendue. Accusé de vouloir pratiquer la repentance systématique, Hollande avait prévenu par avance qu’il n’allait pas à Alger pour présenter des excuses ou pour faire acte de contrition.
Cependant, Hollande n’a pas pu et n’a pas su rompre avec la Françafrique, tout comme son prédecesseur Nicolas Sarkozy. Là où ce dernier évoquait « une Afrique qui n’est pas encore rentrée dans l’histoire », François Hollande parle de la nécessité de maintenir le lien entre la France et l’Algérie, ne prenant pas acte du fait que justement ce pays est devenu indépendant et que ce lien était cette colonisation de 132 ans qu’il fustige par ailleurs comme une période d’insupportable oppression subie par le peuple algérien.
Pour dénoncer cette colonisation, il a recours à la figure de Clémenceau, qu’il n’a pas comprise, puisque ce dernier refusait la colonisation non seulement au nom du droit des peuples à la liberté mais surtout au nom des intérêts français, car il avait compris que l’Algérie française deviendrait rapidement un boulet financier et qu’il y avait mieux à faire avec l’argent des contribuables, par exemple reprendre les provinces perdues et construire des routes et des hôpitaux en France. Il évoque aussi la France libre, présentant Alger comme la capitale d’une France résistante alors que c’était Londres avec Charles De Gaulle. La France de Giraud ce n’était pourtant pas la France de De Gaulle.
Par ailleurs, François Hollande a légitimé par sa présence un gouvernement algérien que beaucoup d’Algériens, et en premier lieu le Mouvement pour l’Autonomie de la Kabylie, considèrent comme illégitime. Il est ainsi intervenu dans les affaires d’un pays souverain pour soutenir implicitement le régime de Bouteflika en place. Et il l’a fait au nom des intérêts économiques du mondialisme financier, agissant en VIP d’une oligarchie planétaire qui tient la France et l’Europe sous coupe réglée.
Enfin, alors que l’assimilation est un échec de plusieurs décennies, il encourage la jeunesse algérienne à rejoindre la France et lance des signaux lourds envers les Algériens et descendants d’Algériens déjà présents en France en grand nombre, une façon de vouloir s’attacher à nouveau leur vote, alors que le « mariage pour tous » trouble les communautés musulmanes installées dans notre pays. Une fois de plus, le président n’est pas au service des intérêts de son peuple, qui essaie par tous les moyens de lui faire savoir que la France déborde et n’en peut plus.
En disciple de son ancien rival Sarkozy, Hollande nous ressort cette idée folle d’ « union méditerranéenne » qu’il met exactement sur le même plan que l’Union Européenne, trahissant ainsi un afrotropisme que je dénonçais déjà lorsqu’il était encore dans l’opposition. Ce faisant, il nie la pleine européanité du peuple français, réactive l’idée que notre avenir se jouerait en Méditerranée, négligeant l’échec retentissant de l’empire romain à vouloir réunir des gens issus de civilisations différentes.
Comment s’étonner de toute façon du néo-colonialisme de François Hollande quand on sait que son mentor en ce domaine est l’islamotrope Benjamin Stora, qui a osé déclarer récemment que « ce n’est pas un déplacement classique, l’Algérie, c’est une question de politique intérieure » ? Pourtant, le général De Gaulle avait œuvré pour bien faire comprendre aux Français que l’Algérie n’était pas et n’avait jamais été la France.
Une opposition qui n’a rien compris.
Suite à ce discours où le président en exercice condamne la colonisation tout en pratiquant implicitement un néo-colonialisme insupportable, la droite et surtout l’extrême-droite ont eu à cœur de le dénoncer, mais en reproduisant la même mythologie contre-nature que leur adversaire. Il ne faut pas oublier que le propre père de François Hollande était un partisan déclaré de l’Algérie française, tout comme celui de Ségolène Royal.
Louis Aliot et Marine Le Pen ne retiennent du discours présidentiel qu’une forme de repentance, de reconnaissance du FLN, et l’oubli volontaire du sort des pieds noirs et des harkis. Ils perpétuent ainsi la ligne néo-colonialiste de Jean-Marie Le Pen, combattant pour que l’Algérie reste française, même s’il fallait faire contre tout bon sens de neuf millions d’algériens, qui sont aujourd’hui trente millions, des français.
Gérard Longuet (UMP) vante le bilan colonial prétendûment positif de la France en Algérie. Pourtant Daniel Lefeuvre a démontré que le bilan économique de la colonisation fut calamiteux pour la France. Ce n’est pas pour rien que Bismarck avait encouragé le gouvernement français à coloniser l’Afrique. Il explique par ailleurs qu’il n’est pas bon pour la jeunesse française d’origine immigrée d’avoir en tête une France qui se serait mal comportée vis-à-vis de leur pays d’origine.
Aucun ne semble pourtant avoir conscience que le bilan réel de la colonisation n’a jamais été réellement tiré et surtout assumé complètement. Nous savons aujourd’hui qu’en matière économique, la colonisation a ruiné la France et que le décollage de notre pays n’a été possible qu’une fois le boulet lourdé. Nous savons en outre que ce n’est pas par manque d’universalisme que la France a colonisé, mais bien par un universalisme maladif et perverti, avec cette idée nauséabonde selon laquelle la France devait « civiliser les barbares ». La France a agi en Algérie comme les Romains ont agi en Gaule, à la différence près que Gaulois et Romains étaient issus de deux civilisations très proches. Elle a cru sérieusement pouvoir transformer en européens une population arabo-musulmane qui souhaitait simplement demeurer elle-même et être respectée dans son identité. Elle s’est trompée.
Ni le PS ni le FN n’ont compris l’erreur de base qui était de vouloir s’imposer chez autrui et de vouloir imposer à autrui ce qu’on croit bon pour lui. La colonisation était illégitime dès le point de départ et indéfendable quel que soit le bilan comptable, et encore davantage lorsqu’on constate que même économiquement elle ne se justifiait pas.
C’est Bernard Lugan qui tire le bon constat de cette affaire coloniale, à savoir que la colonisation « est devenue une véritable tunique de Nessus, qui fait peser sur les générations européennes à venir une hypothèque d’autant plus lourde qu’elles ne l’ont pas signée et dont elles demanderont un jour pourquoi elles sont condamnées à en honorer les traites. » Et il ajoute, non sans lucidité, que « les populations originaires de notre ancien empire et vivant en France, comptent plus de six millions de personnes, naturalisés compris, soit quatre fois plus qu’il n’y eut de colons ». Pour lui, ce simple fait doit être considéré comme le bilan colonial véritable.
Pour une décolonisation accomplie et assumée.
Finir la décolonisation, c’est restaurer la situation d’avant que le colonisateur ne se soit implanté dans ces colonies désormais émancipées. C’est prendre acte qu’il n’y avait aucun destin commun entre la France, et par l’extension l’Europe, avec l’Algérie, et par extension l’Afrique. La France est un pays européen et doit le rester. Il est en ce sens totalement scandaleux que François Hollande ait osé mettre la relation franco-algérienne sur le même plan que la relation franco-allemande. Allemands et Français ont un destin commun, celui de faire partie d’une Europe politique. Allemands et Français ont un héritage civilisationnel commun immense, que nous n’avons pas avec l’Afrique du nord, arabo-berbère et musulmane.
Mais pour finir cette décolonisation, pour rompre définitivement avec la Françafrique, qui nous rattache à un continent qui a repris à juste titre sa liberté mais à qui nous ne devons rien et qui ne nous doit rien non plus, il existe aujourd’hui des obstacles que nous n’avions pas après 1962, du temps du général De Gaulle au pouvoir.
Le premier obstacle c’est cette oligarchie mondialiste dont la branche française veut absolument nous rattacher systématiquement à l’Algérie. Les intérêts économiques dont Hollande a été le promoteur ne sont pas ceux des Français ni des Européens, bien au contraire. Développer l’Algérie au détriment d’une France qui a cinq millions de chômeurs n’est pas la politique que devrait mener un président de la république. Aliéner les intérêts du peuple à ceux d’autres pays ou de lobbies économiques n’est pas acceptable.
Le second obstacle, ce liant entre la France et l’Algérie qui n’existait guère en 1962, c’est l’immigration algérienne, passée et présente, en France. C’est cette immigration que Valéry Giscard d’Estaing voulait réduire au minimum en 1978, mais que François Mitterrand s’est empressé de vouloir régulariser et naturaliser dès 1981. De la sorte, a été réintroduit le boulet colonial dont De Gaulle nous avait libérés.
Décoloniser, c’est redonner à la France son destin européen, son identité européenne. Notre avenir est sur le continent européen et certainement pas en Afrique. Le PSUNE entend donc mettre fin à ce lien colonial que les dirigeants français n’ont pas pu ou pas voulu rompre. Cela signifie qu’il va falloir écarter du jeu ces acteurs de liaison que sont l’oligarchie financière d’une part et le communautarisme nord-africain d’autre part. Tout ce qui peut freiner l’union de l’Europe dans laquelle la France a toute sa part doit être mis de côté.
Respecter le peuple algérien, c’est cesser de vouloir lui imposer de cohabiter avec la France. Respecter le peuple français, c’est cesser de vouloir lui imposer de cohabiter au prix fort avec une ancienne colonie qui a souhaité avec raison s’émanciper de son joug. Nous n’avons pas de destin commun, nous n’avons pas non plus d’amitié privilégiée avec ce pays. L’Europe demain traitera l’Algérie comme un pays comme les autres, sans inimitié particulière mais sans traitement de faveur non plus. Avec respect certes.
Coupons le cordon colonial. Libérons nous de nos anciennes colonies une bonne fois pour toutes et cessons de vouloir nous lier à eux, que ce soit en allant chez eux ou en les faisant venir chez nous. Et bâtissons enfin l’Europe politique !
Thomas FERRIER (LBTF/PSUNE)
19:17 Publié dans Analyses, Anti-mythes, Editoriaux, Histoire, Mes coups de gueule, Programme du Parti des Européens | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : algérie française, indépendance, françois hollande, colonialisme, colonisation, front national, gérard longuet |
07/01/2012
Jeanne d’Arc ou le fétiche nationaliste
Dominique de Villepin se fait poète pour chanter la geste johannique, alors que Nicolas Sarkozy vient de lui rendre hommage comme symbole de la France, suivi par Jean-Marie Le Pen qui la fête depuis maintenant près de trente ans chaque premier mai. Pour les 600 ans d’anniversaire de sa naissance, la droite encense la pucelle de Domrémy. Elle est un odieux symbole ultra-nationaliste selon Eva Joly, toujours mal à l’aise vis-à-vis de l’histoire nationale, et qui devrait s’intéresser aussi au saint patron de la Norvège, le roi Olaf, honni à juste titre par les Asatruar (néo-païens scandinaves) pour avoir voulu imposer de force la religion chrétienne à ses compatriotes.
A la différence de l’actuel président français, je ne me réveille pas européiste le matin pour me faire nationaliste le soir. Je suis européiste du soir au matin, au lever et au coucher. Croire, comme doivent le penser ses conseillers issus de l’extrême-droite, que la récupération du mythe johannique amènerait les électeurs nationaux à voter UMP au premier ou au second tour des élections présidentielles, est d’une naïveté confondante. Si MLP capitalise malheureusement, de plus en plus, les voix populaires, c’est parce que l’immigration n’est pas maîtrisée et que l’insécurité explose. Les paroles comptent moins que les actes, et Nicolas Sarkozy a certes beaucoup parlé mais n’a guère agi. Qu’il explique aux français ce qui l’a enchaîné serait la seule façon de se justifier. Mais cela l’obligerait à remettre en question tout le cadre constitutionnel français et institutionnel européen.
Aussi Jeanne d’Arc n’est-elle pas une figure semi-historique qui m’intéresse beaucoup, à vrai dire. Je n’oublie pas qu’à la cour du roi d’Angleterre on parlait français, que Richard Cœur de Lion, qui était suzerain dans tout l’ouest de la France, parlait donc la même langue que son complice des croisades et ennemi mortel Philippe Auguste. L’image d’une Jeanne libératrice de la France est elle aussi lorraine, d’Epinal pour être précis. Et d’ailleurs, ce ne sont pas des « anglais » qui l’ont mise à mort, même s’ils ont intrigué en ce sens, mais des « français ». Ici l’usage des guillemets est indispensable, car ces notions n’étaient pas si popularisées à l’époque, et le mythe de Jeanne prend tout son sens au XIXème siècle.
En fait, lorsqu’on connaît bien les mythologies indo-européennes, on repère immédiatement derrière Marianne et Jeanne des figures bien connues. Symbole de la république, Marianne n’est que Cérès, la fameuse semeuse de la pièce de 1 Franc, et son nom, certes issu de Marie, devrait au contraire être rapproché du mot « mère ». C’est Déméter qui nourrit et protège le peuple, et qui est la mère de tous les citoyens. La déesse Raison mise en avant par les hébertistes n’était-elle pas Minerve/Athéna. Et Jeanne la pucelle rappelle la version guerrière de la déesse indo-européenne de l’aurore. C’est Artémis la déesse vierge, chasseresse et sauvage, l’amazone par excellence. C’est surtout Athéna Parthenos, c'est-à-dire « Pucelle », avec son casque, sa lance et son bouclier, déesse de la guerre galvanisant les guerriers. C’est la Morrigan celte accompagnée de ses corbeaux, ou la Valkyrie envoyée sur le champ de bataille par Odhinn.
Jeanne n’est donc de fait qu’un énième avatar de la déesse Athéna, et de ses homologues modernes, à l’instar de Britannia et de Germania. C’est ainsi que Jeanne est Francia, de même que Francus, tout comme Enée, aurait amené en Gaule la statue de la déesse, le fameux Palladion de Troie, selon une version médiévale tardive de l’origine de la nation, reprise par Ronsard. A l’époque des nationalismes d’Europe du XIXème siècle, la nation devient une sorte de déité païenne à laquelle il faut rendre un culte. Jeanne n’est donc en aucune manière un symbole catholique, les « anglais » de l’époque étant d’ailleurs autant catholiques que les « français » et on pourrait en faire une sorte de prêtresse guerrière païenne ayant entendu sous un chêne le dieu Taranis en personne lui demander de défendre les Gaulois contre l’envahisseur (grand-)breton.
Mais le symbole de Jeanne aujourd’hui est nécessairement europhobe, et c’est en ce sens qu’il est exploité par le Front National. Elle est celle qui a chassé des frères européens, dont les élites parlaient français, de notre sol, au service d’un souverain qui ne valait pas plus qu'un autre. C’est de cette guerre de cent ans que naît d’ailleurs l’animosité entre anglais et français, et que l’Angleterre commence à se détourner du continent pour devenir la thalassocratie qu’on connaît.
Notre symbole c’est Europa, qui est à la fois mère et guerrière, en tant que Déméter nourricière fécondée par le génie créateur de Zeus apparu sous forme taurine, et en même temps Athéna, guerrière en armes, incarnation de la suprême sagesse, protectrice des fils d’Arès que nous sommes, nous Européens, gardienne souveraine de la démocratie, qui fait de notre continent la terre de la liberté par excellence, conformément à notre nature, comme l’avait bien compris le premier européiste, Hippocrate. Et le 9 mai de chaque année, nous défilerons pour elle et pour personne d’autre.
Nicolas Sarkozy a commis une erreur majeure en voulant se jouer plus nationaliste que les nationalistes, alors même qu’il prétend défendre l’Union Européenne dans cette crise des dettes souveraines qui nous touche de plein fouet. Français, encore un effort pour (re)devenir vraiment européens ! Car c’est au niveau de l’Europe que pourra venir le salut et nulle part ailleurs. Il n’y gagnera aucun électeur supplémentaire, mais contribuera au contraire à l’europhobie ambiante.
Ni la France ouverte sur le monde entier des prétendus « socialistes » ni la France fermée de la droite ne doivent devenir notre avenir. C’est à la « France européenne » que nous nous adressons, c’est à l’Europe toute entière.
Thomas Ferrier
Secrétaire général du PSUNE
12:18 Publié dans Editoriaux, Histoire, Programme du Parti des Européens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jeanne d'arc, nicolas sarkozy, front national, europa, athéna, nationaliste, européiste, thomas ferrier, psune |