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22/10/2017

Elections en Tchéquie : une droite renforcée, une gauche moribonde, un euroscepticisme en hausse

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Tchéquie,ANO2011,Babis,SPOLes élections législatives tchèques qui se sont déroulées les 20 et 21 octobre 2017 ont permis la victoire d’Andrej Babis, à la tête du mouvement ANO 2011, un candidat milliardaire représentant la droite libérale et qui a fait campagne notamment sur le refus d’accueillir des migrants. Babis, comparé par certains à un Berlusconi tchèque, a obtenu 29,64% des voix (+ 11 points) et 78 sièges (+31). Il n’a certes pas obtenu la majorité absolue, qui est de 101 sièges (sur 200) mais il est en mesure de bâtir une coalition autour de son mouvement.

Le parti civique démocratique (ODS), dirigé par Petr Fiala et connu pour ses positions plutôt eurosceptiques et conservatrices, avec 11,32% des voix (+ 3,6 points) et 25 sièges (+9), pourrait donner une majorité parlementaire à Babis dans le cadre d’une coalition, sachant que ce dernier a indiqué en revanche qu’aucune alliance avec l’extrême-droite, à savoir le Parti de la liberté et de la démocratie directe (SPD) de Tokio Okomura. Dans ce contexte, Babis s’opposera nécessairement au président français Macron et maintiendra certainement le soutien de son pays au groupe dit de Visegrad.

La volonté de renouvellement des électeurs s’est également exprimée par le succès du parti nationaliste SPD, qui obtient 10,64% et 22 sièges pour sa première élection législative, confortant les résultats des élections européennes. L’existence de ce parti, qui ne participera certes pas à une coalition au pouvoir, ne peut qu’encourager Babis à maintenir une ligne dure sur les questions migratoires. Les Pirates tchèques (Pirati), phénomène transnational aux succès en dents de scie, ayant quasiment disparu d’Allemagne après quelques succès mais ayant en revanche réussi en Islande à peser sur la politique nationale, entrent au parlement avec 10,8% des voix (+8,1 points) et 22 sièges.

L’émergence de ces nouveaux partis, en plus du succès de l’ANO de Babis, se fait au détriment des partis traditionnels. Les communistes, qui étaient encore bien représentés, tombent à 7,76% des voix (- 7,15 points) et 15 sièges (-18). Les sociaux-démocrates du CSSD avec 7,27% des voix (- 13,09 points) et 15 sièges (-35) sont littéralement laminés. Ces deux partis de gauche réunis perdent en tout près de 20 points, ce qui est considérable. La peur du laxisme migratoire prêté à la gauche a été déterminante pour expliquer son effondrement électoral.

Mais la droite classique, représentée par les démocrates-chrétiens et le mouvement TOP 09, ne s’en sort guère mieux. Le KDU-CSL (chrétien-démocrate) n’obtient que 5,8% (-0,8 points) et 10 sièges (-4) tandis que TOP 09 obtient 5,31% (-6,7 points) et 7 sièges (-19).

Enfin le mouvement modéré des « Maires et indépendantes », s’appuyant sur son enracinement local, obtient 5,18% des voix et fait rentrer au parlement 6 députés.

Les petites formations politiques sont également victimes du succès d’ANO et autres des formations émergentes. Avec 1,46% des voix (- 1,74), les Verts (Zeleni) perdent tout rôle politique, de même que le Parti des droits civiques, de gauche modérée, qui doit se contenter de 0,36% des voix (- 1,15). Ils subissent tous le rejet de leurs thématiques dans un contexte de forte angoisse identitaire.

Avec l’émergence du SPO, les autres partis de droite radicale, qui étaient nombreux à se présenter, sont marginalisés. Le mouvement Svobodni (« Parti des citoyens libres »), eurosceptique, tombe à 1,56% des voix (- 0,91). En revanche le mouvement Rozumni, eurosceptique, obtient 0,72% (+ 0,45). Enfin le mouvement des Réalistes (Realisti), là encore eurosceptique et anti-immigration, obtient 0,71% des voix.

Les formations encore plus dures, comme l’ultra-radical DSSS (Parti des travailleurs et de la justice sociale) avec 0,2% des voix (- 0,66), l’Ordre de la nation (RN-VU) avec 0,17%, comme le Bloc contre l’islamisation (0,1%) ou comme les Républicains de Miroslav Sladek (SPR-RSCMS) avec 0,19% des voix, sont maintenues à des scores dérisoires, sans parler du Front national tchèque (117 voix en tout) ou de « La nation ensemble » (300 voix). Mais toutes illustrent néanmoins la volonté tchèque de se préserver du globalisme.

25,7% des électeurs thèques ont voté pour des formations nationalistes ou souverainistes opposés à l’Union européenne comme à l’arrivée de migrants, ce qui est considérable. Certains des partis proposant une offre eurosceptique seront certainement associés au nouveau gouvernement autour de la figure d’Andrej Babis (ANO), qui est la seconde plus grande fortune du pays. Ce dernier n’entend pas se faire dicter sa politique par quiconque, et certainement pas par Bruxelles. Babis ne tombera certes pas dans l’euroscepticisme, pas davantage que Viktor Orban en Hongrie n’y a cédé, mais va accroître le pôle de résistance d’Europe médiane. Le succès autrichien de Sebastian Kurz devrait renforcer également ce pôle.

Il serait peut-être que les dirigeants d’Europe occidentale, et par conséquence les responsables de Bruxelles, comprennent que la politique qu’ils proposent est impopulaire et contraire à l’intérêt véritable des Européens. L’unité européenne ne sera possible qu’en trouvant un terrain d’entente, c’est-à-dire en refusant explicitement les « valeurs » du globalisme.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

26/10/2013

Tchéquie : une victoire sociale-démocrate à la Pyrrhus ?

11520706-vecteur-drapeau-de-republique-tcheque.jpgVendredi et samedi se déroulaient les élections législatives tchèques anticipées, suite à la démission du gouvernement de centre-droit il y a quelques mois, empêtré dans des problèmes de corruption, et alors que l’ancien président Vaclav Klaus, issu du même parti ODS, a quitté ses fonctions avec une impopularité record.

Le parti social-démocrate tchèque (CSSD) remporte ses élections avec 20,45% des voix, soit une baisse de deux points environ par rapport à 2010. C’est donc un succès très relatif, même si son principal adversaire, le Parti Démocrate (ODS) réalise un score extrêmement bas, avec seulement 7,72% des voix, contre un peu plus de 20% il y a trois ans. Il n’est désormais plus le premier parti de droite.

Les conservateurs du mouvement TOP09, qui faisait également partie de la coalition sortante, et malgré l’opinion positive de nombreux électeurs pour Karel Schwarzenberg, sont sanctionnés avec 12% des voix contre 16,7% en 2010. Cette baisse est naturellement plus modérée que celle de l’ODS, mais elle témoigne d’un véritable rejet par les électeurs du gouvernement précédent. Le nouveau président de « gauche » Milos Zeman, dont les partisans (les Zemanovici) n’ont obtenu que 1,5% des voix, n’est pas non plus gagnant.

Ce sont de nouvelles formations politiques qui, sorties du néant, réussissent désormais une entrée fracassante au parlement. Des mouvements qu’on qualifiera hâtivement de « populistes » ont pris la place de la droite traditionnelle. Il y a notamment le mouvement démocrate de Tomio Okamura, d’origine tchèque et japonaise, qui obtient 6,88% des voix, et surtout la liste ANO 2011 du slovaque Andrej Babis, tribun de la plèbe à la rhétorique reconnue, avec 18,71% des voix, se plaçant second derrière la gauche.

Autre gagnant de ce scrutin, le parti communiste (KSCaM), issu de l’ancienne époque soviétique. Il réalise 14,91% des voix, en progression de plus de trois points. Il progresse notamment au détriment de la sociale-démocratie et limite également le départ d’un électorat ouvrier et populaire vers les vestiges de la droite nationaliste.

Alors que les Républicains ont disparu de la scène politique (le « Parti National » n’obtenant que 0,1% des voix aux élections précédentes) et que le Parti Ouvrier (Delnicka Strana), mouvement nationaliste radical, a été interdit, les partis souverainistes ne profitent pas de cet espace libre. La liste Hlavu Vzhuru (« Tenez la tête haute »), issue de la base du mouvement Suverinat, et soutenue par l’ancien président Vaclav Klaus, et qui avait obtenu plus de 2,5% des voix en 2010, s’effondre avec seulement 0,42% des voix, l’autre liste souverainiste (Suver.-Strana) n’obtient que 0,27% des voix. Le courant eurosceptique traditionnel est donc considérablement affaibli, même si le mouvement des Libres Citoyens (Strana Svobodnych Obcanu) obtient 2,42% des voix sur un programme de démocratie directe, avec proposition d’un référendum sur le maintien de la Tchéquie au sein de l’Union Européenne.

Dernier mouvement à passer la barre fatidique des 5%, ouvrant à des députés, l’union démocrate-chrétienne. Elle obtient 6,78% des voix et complète ainsi le tableau.

Les partisans d’un « socialisme national » à la tchèque, forme spécifique de sociale-démocratie, échouent à revivifier ce vieux courant national, brisé par cinquante de communisme. Ils n’obtiennent que 0,07%. Les monarchistes sont également réduits à un score extrêmement marginal (0,17%). Les Pirates obtiennent 2,63% ce qui démontre qu’un mouvement européen transnational est capable de s’organiser et de se présenter dans presque tous les pays de l’Union Européenne. Leur score n’est pas insignifiant même s’il sera difficile de capitaliser par la suite. Enfin, les Verts (Strana zelenych), beaucoup moins gauchistes qu’en France ou en Allemagne, restent à la marge avec 3,09% des voix.

Avec l’émergence de deux nouvelles formations politiques menées par des personnalités appréciées de nombreux électeurs, les deux partis principaux ne sont pas capables d’obtenir une coalition tenable. La plus logique reste l’alliance des communistes et des sociaux-démocrates dans une coalition de gauche plurielle, mais elle ne sera pas majoritaire. De même, une droite plurielle menée par TOP09 paraît extrêmement difficile à mettre en œuvre, du fait de l’effondrement total de l’ODS.

La Tchéquie ce soir est donc probablement une fois de plus ingouvernable, car de nombreux partis rentrent au parlement, en tout sept, deux de « gauche », trois de « droite » et deux inclassables. On retrouve par certains aspects un phénomène « Beppe Grillo » avec de nouveaux venus en politique, aux origines tranchant avec le tchèque de la rue. Elle peut au mieux espérer une coalition de « gauche » minoritaire, soutenue par exemple par ANO 2011, ou organiser une grande coalition d’où l’ODS serait probablement exclu.

Dans cette Europe en crise, l’électorat est fortement perturbé et ne sait plus à quel sein se vouer. Il peut tomber dans les bras de démagogues professionnels ou bien dans ceux de nationalistes obtus et d’europhobes de principe. Le résultat c’est l’effacement des différences entre la « gauche » et la droite.

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

29/05/2010

Elections législatives tchèques 2010: les résultats

Résultats à 99.97% du dépouillement:

Union chrétienne et démocratique (Křesťanská a demokratická unie): 4.39% (éliminée)

Parti démocrate citoyen (Občanská demokratická strana, ODS, le parti de Vaclav Klaus): 20.21% (a priori, vainqueur en cas de coalition de droite)

Parti communiste de Bohême et Moravie (Komunistická strana Čech a Moravy): 11.27%

Parti social démocrate tchèque (Česká strana sociálně demokratická, CSSD, parti annoncé comme gagnant probable des élections): 22.09% (1er parti en nombre de voix mais grand perdant de l'élection)

Centre Européen: 0%

Parti des droits civiques (Zemanovci): 4.33% (éliminé)

TOP 09 (Tradice Odpovědnost Prosperita 09, droite conservatrice): 16.69% (autre grand vainqueur et allié de poids de l'ODS en cas de coalition)

Parti vert (Strana zelených): 2.44%

Affaires publiques (Věci veřejné, VV, mouvement de centre droit de John Radek): 10.88%

Prospérité nationale (Narodni Prosperita, droite nationale): 0%

Union pour la république - Parti Républicain Tchécoslovaque (Sdružení pro republiku - Republikánská strana Československa, SPR-RSC, mouvement nationaliste de Miroslav Sladek): 0.03%

Delnicka strana socialni spravedlnosti (DSSS) [mouvement eurosceptique]: 1.14%

Au final, droite + centre-droit: 47.78% des voix (a priori, en nombre de députés, ils auront la majorité), gauche + extrême-gauche: 33.36%.
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Contre tous les pronostics, la gauche sociale-démocrate a perdu les élections législatives de 2010. La droite, dont l'ODS conservatrice et eurosceptique de Vaclav Klaus, triomphe même si divisée en trois formations. L'extrême-droite, avec 0.03% des voix (contre 0.1% aux législatives précédentes), incarnée une fois de plus par Miroslav Sladek, est laminée.

Thomas Ferrier (SG-PSUNE)