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07/02/2016

Les raisons du refus de l'adhésion turque à l'Union Européenne

Europe.pngTurquie.jpgDeux promesses inconsidérées avaient été faites à la Turquie. En 1963, De Gaulle et Adenauer, agréablement surpris par les résultats de la « révolution kémaliste », avaient indiqué que la Turquie pourrait faire partie de la CEE à peine née (1957) qui se résumait alors à l’idée d’un marché commun, sans aucun attribut politique, ce à quoi De Gaulle était farouchement opposé. En 2005, au prix d’une négociation douteuse, où l’Autriche leva son veto en échange de la promesse d’une adhésion accélérée de la Croatie, des pourparlers d’adhésion avec la Turquie furent ouverts, alors même qu’une telle proposition n’avait pas été faite à des pays réellement européens, comme la Serbie ou l’Albanie par exemple. C’était évidemment absurde.

La Turquie en effet a une indéniable dimension eurasiatique, que n’a pas la Russie contrairement à ce que beaucoup croient, et ne saurait être qualifiée d’européenne, même si elle a en elle une part d’européanité, illustrée notamment par les Turcs Blancs (beyaz Türkler) d’où fut issu Atatürk en personne. Le peuplement anatolien d’origine, pré-indo-européen et pré-sémitique, semble avoir résisté à deux millénaires de vagues indo-européennes (Hittites, Arméniens, Phrygiens, Grecs, Perses et Latins) et caucasiennes (Lazes, Circassiens) mais aussi à la vague altaïque des Turcs Oghuz, peu nombreux et qui se fondirent dans la population native tout en lui imposant la langue turque et l’islam, et aussi en partie au brassage interne de l’empire ottoman (avec des populations européennes et non-européennes).

Si la Turquie est partiellement européenne pour ces raisons, sa culture et son histoire politique de ces cinq derniers millénaires se sont établies contre la civilisation européenne. La Turquie, sous les traits de l’empire ottoman, a pu assiéger Vienne à deux reprises, sans oublier ce qu’elle a fait subir à plusieurs peuples européens, dont Grecs, Serbes et Albanais, sans parler de sa conquête de Constantinople, et de la mort héroïque de Constantin XI Dragasès. Cette histoire ancienne ne saurait être tenue pour négligeable, malgré l’alliance contre nature entre François Ier et Soliman, une tache honteuse sur le règne de ce grand roi de France. Je songe encore à la bataille de Missolonghi où de courageux Grecs offrirent leur vie pour leur patrie et pour l’Europe entière.

Alors bien sûr il y a le mirage kémaliste. On oublie bien souvent que Kemal Atatürk a établi son régime sur une victoire contre les Grecs et ainsi l’exil de 500.000 Grecs vers la Grèce indépendante en 1920, et sur la répression de tout ce qui n’était pas turco-musulman. Atatürk sur un plan personnel détestait la religion établie qu’avait adopté son peuple à la sortie de l’Asie Centrale dix siècles auparavant. Il réprouvait des principes qu’il considérait comme archaïques et méprisables. C’est ainsi que naquit la laïcité turque, mais une laïcité qui faisait de l’islam la religion nationale de la Turquie, pour peu que cet islam se réforme dans le sens imposé par Atatürk, à savoir avec un Allah rebaptisé Tanri, un Coran écrit en turc, sans califat, sans voile pour les femmes, sans fez pour les hommes, en prenant comme référence le droit civil suisse.

Mais Atatürk, aussi fascinant et déterminé qu’il ait pu être, n’a pas gouverné 20 ans. Il est mort en 1938 à la veille de la seconde guerre mondiale. On ignore d’ailleurs quel camp il aurait choisi. Sa révolution fut inachevée et Inönü déjà d’en atténuer les effets. Un consensus mou s’établit alors. Les islamistes radicaux étaient écartés du pouvoir à l’instar de ce qui arriva à Erbackan dans les années 90. Mais même au sein du nationalisme laïc du MHP, une forme d’islamo-nationalisme grandissait. C’est sur les paysans anatoliens (« Kara Türkler ») et sur cette synthèse d’islam et de nationalisme turc que devait s’établir l’AKP, au nom de promesses mensongères faites à la bourgeoisie turque, à peine sortie d’un gouvernement de coalition critiqué pour corruption et dont seul le MHP et le CHP réussir à survivre difficilement. Le développement économique et le processus d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne permirent à Erdogan de s’imposer et de briser un par un ses adversaires.

En 2008, l’armée et les institutions « kémalistes » ont tenté d’interdire l’AKP pour viol de la constitution. Cela s’est joué à un membre de la Cour Suprême près. L’AKP survécut et désormais Erdogan écrasa brutalement tous ces adversaires, par le biais de grands procès liées à une obscure affaire où une organisation secrète, « Ergenekon », aurait conspiré contre le gouvernement. Des journalistes et des hauts gradés de l’armée furent arrêtés. Erdogan liquida ainsi l’héritage de Mustafa Kemal d’un trait de plume.

La réislamisation de la société turque sous son impulsion est une réalité. La politique répressive à l’égard des Kurdes, qui a amené le gouvernement turc à des relations bien troubles avec l’EI en Irak et en Syrie, en est une autre. La provocation vis-à-vis de la Russie, avec ce chasseur abattu, en est encore une autre. On voit bien que l’AKP d’Erdogan, qui a même réussi à marginaliser l’ancien président plus modéré, et pourtant issu de ses rangs, Abdullah Gül, domine la société et même quand il titube comme en début d’année 2015, il arrive à rebondir quelques mois après au prix d’une nouvelle guerre en pays kurde et à l’issue d’attentats criminels aux origines obscures, ralliant 4 ou 5 points d’électeurs MHP lui permettant de retrouver cette majorité parlementaire tant espérée pour qu’Erdogan puisse se tailler un costume de super-président. Le scandale n’est pas que la Turquie se dote de manière souveraine du gouvernement qu’elle souhaite et qu’elle se colore à nouveau de vert. C’est son affaire.

Le scandale est que l’Union Européenne n’en tienne pas compte, en arrêtant ce processus d’adhésion contre-nature. Or que fait-elle sous l’impulsion d’Angela Merkel, et ce en raison de migrants prétendument syriens qui déferlent sur l’Allemagne (et le reste de l’Europe occidentale), parce que la Turquie facilite en réalité leur départ vers notre continent ? Elle rouvre les pourparlers d’adhésion, ouvrant un nouveau chapitre, alors même qu’Ankara continue de ne pas reconnaître la Chypre grecque et continue son occupation illégale (depuis 1974) du nord-est de l’île. Elle offre plusieurs milliards d’euros à Erdogan pour qu’il garde les migrants sur son territoire. Elle prône de manière suicidaire la suppression des visas turcs pour l’espace Schengen, alors qu’on sait que de nombreux faux passeports syriens et turcs pullulent.

Notre position est très claire et en rupture avec cette ligne politique aberrante. Il s’agit de doter l’UE de véritables frontières et que ces dernières soient respectées par la Turquie, de décréter la fin de l’occupation de Chypre, et surtout de mettre fin au plus tôt au processus d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, ouvert de manière inconsidérée par des gouvernements sans mandat. La Turquie n’est pas européenne, même si elle a une part d’Europe en elle, et certainement pas parce qu’elle a conservé la Thrace (3% de son territoire, 5% de sa population) qui aurait dû lui être reprise en 1913 puis dans le cadre du traité de Sèvres (1920). Cette position dure ne m’empêche pas de souhaiter pour le bien du peuple turc lui-même la chute du gouvernement AKP et la mise en avant d’un néo-kémalisme. Mais les signes actuels donnent peu d’espoir d’un tel renouveau à brève ou moyenne échéance. Et cela ne m’empêche pas de souligner l’amitié que l’Europe entendra préserver avec la Turquie si cette dernière parvient à se libérer de cette régression idéologique qui préside actuellement à ses destinées.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

01/11/2015

Turquie : succès logique de l’AKP d’Erdogan

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Elections,Turquie,novembre 2015,AKP,DHP,MHP,CHP,ErdoganLes sondages annonçaient unanimement que le pari de Recep Erdogan serait une fois de plus perdu. Samedi dans la journée, j’ai eu pourtant une autre intuition. Je sentais que les sondages seraient démentis et que l’opinion turque se ferait encore avoir par leur autocrate. Je me souvenais aussi de ce meeting de Strasbourg où Erdogan avait donné des leçons à toute l’Europe alors que jamais ni la France ni l’Allemagne n’auraient dû l’autoriser à s’exprimer devant sa diaspora afin de mobiliser les électeurs turcs d’Europe. On peut deviner d’ailleurs que ceux-ci auront massivement répondu à son appel.

Erdogan avait comme objectif numéro 1 de briser le parti HDP d’où sa campagne politique et militaire au Kurdistan et ce tout en prétendant lutter contre Daech, responsable d’un terrible attentat à Ankara (95 morts et 246 blessés). Il a échoué de peu car le HDP a obtenu 10,6% des voix et 59 sièges.

Toutefois, l’AKP obtient 49.1% des voix et 316 sièges sur 550 (57.5% des députés) progressant ainsi de plus de 8.3 points. Il dispose désormais de la majorité absolue, néanmoins insuffisante pour modifier la constitution, pour une fois de plus gouverner. Beaucoup d’électeurs turcs, dans un contexte anxiogène, ont eu peur de se retrouver sans gouvernement une fois de plus. Le CHP étant trop éloigné dans les sondages de l’AKP, il ne pouvait apparaître comme en situation de gouverner. Seule une alliance CHP-MHP, donc sur une ligne nationaliste, pouvait en effet peser en face de l’AKP.

Le CHP avec 25.% des voix (+0.4) et 134 sièges maintient ses positions, comptant sur un socle électoral stable. Ses électeurs traditionnels n’ont pas été dupes des manipulations du pouvoir pour se maintenir à tout prix. Mais c’était insuffisant pour pouvoir renverser les grandes tendances. Au-dessus de 40% des voix, l’AKP est de fait incontournable. Il bénéficie aussi de la réislamisation progressive de la société turque, l’œuvre de déconstruction de l’héritage kémaliste par le subtil Erdogan.

La raison principale de ce succès de l’AKP tient surtout à l’attitude de certains électeurs. Ceux du Saadet (islam conservateur) ont préféré le vote utile, le Saadet n’obtenant plus que 0.6% des voix (-1.4). C’est le MHP nationaliste qui perd le plus à ce jeu, avec seulement 11.9% des voix (-4.4) et 41 sièges. L’attitude d’Erdogan à l’égard des Kurdes a pesé nettement dans ce résultat. De même, le HDP a limité la casse mais a perdu 2.5 points. La stratégie de l’AKP a donc été doublement gagnante, affaiblissant le HDP, accusé de tous les maux, mais aussi le MHP. Les nationalistes les plus islamisants auront en effet choisi Erdogan au lieu de Bahçeli.

Les autres partis politiques font une simple figuration. Le BBP (national-islamiste) obtient 0.6% des voix seulement (il était absent des élections précédentes). Les organisations d’extrême-gauche sont balayées (0,9%) comme les mouvements démocratiques (0.3%) et comme le mouvement nationaliste Millet (« Parti de la nation ») qui obtient… 0% des voix.

L’Union Européenne, et les principaux dirigeants de ses Etats membres, est responsable de cette situation en cautionnant depuis des années les dérives autocratiques du pouvoir turc alors même qu’elle prétend les dénoncer. En demandant l’aide à la Turquie pour lutter contre les flux migratoires, au prix d’une relance des pourparlers d’adhésion à l’Union Européenne, ce dont une écrasante majorité d’Européens ne veut pas, Angela Merkel a offert à Erdogan le plus beau des cadeaux, sa caution. Il est logique qu’il en soit donc récompensé dans les urnes.

Thomas FERRIER (LBTF/PSUNE)

07/06/2015

La Turquie refuse à Erdogan sa super-présidence

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turk.jpegLes électeurs turcs ont rejeté Super-Erdogan, ce « héros » auto-proclamé de la Turquie islamique et néo-ottomane, nouveau calife en son luxueux palais. Depuis la fin du mandat d’Abdullah Gül, son vieux complice désormais marginalisé, et son élection, Recep Erdogan n’a cessé de jouer les autocrates et encore récemment fêtait devant ses troupes militantes la victoire de Constantinople en 1453.

Avec 40.93% des voix, et 256 députés (sur un total de 550), l’AKP réalise une contre-performance même si ce parti reste le premier du pays, perdant plus de huit points par rapport à 2011 et 72 sièges. Il est désormais bien loin de la majorité absolue et bien davantage encore du nombre de sièges nécessaires pour faire voter une révision constitutionnelle accentuant le caractère présidentiel du nouveau régime qu’il souhaite mettre en place, mais que 75% des Turcs selon les derniers sondages, et même 60% de ses propres électeurs, refusent.

Avec 25.08% des voix et 132 sièges, le mouvement kémaliste CHP ne progresse guère en nombre de voix. Le CHP échoue une fois de plus à représenter une véritable alternative aux yeux des électeurs, la réislamisation en cours de la Turquie que l’AKP a fortement encouragée depuis dix ans lui étant nettement défavorable, y compris à Istanbul et à Ankara.

Avec 16.38% des voix (+3.37) et 82 sièges (+29), démentant ainsi tous les sondages, les nationalistes du MHP réussissent en revanche un très bon score, même s’ils ne retrouvent pas leur résultat de 1999 (18%). Ils bénéficient de la perte de crédits d’Erdogan et de l’échec de la ligne néo-ottomane du premier ministre Davutoglu. A côté d’eux, les nationaux-islamistes du BTP avec 0.38% sont nettement marginalisés.

Le vainqueur indiscutable de ce scrutin est le DHP, ce parti démocrate représentant surtout les Kurdes mais aussi les minorités. Avec 13.1% et 80 sièges (+50), il fait une entrée fracassante au parlement et réussit surtout à empêcher l’AKP de bénéficier de la prime, car ses sièges auraient été au premier parti du pays en cas de score inférieur à 10%. Une part importance de l’échec de l’AKP s’explique par un vote massif en faveur du DHP dans le Kurdistan et même en dehors (10.6% à Istanbul, 11.5% à Izmir).

Enfin, le parti islamiste Saadet en revanche reste très faible avec 2.06% des voix (+1.06) même s’il progresse très légèrement. Les autres partis sont très faibles, à l’instar du parti de gauche radicale Vatan Partisi (0.33%), du DP nationaliste (0.15%), du Turk Parti (0.12%) ou encore des libéraux-démocrates (0.05%).

Ces résultats vont contraindre l’AKP à mettre en place une coalition qui limitera considérablement sa marge de manœuvre. On pourrait aussi imaginer une grande coalition contre lui au parlement, mais l’incompatibilité doctrinale totale entre le MHP (nationalisme turc) et le DHP (pro-Kurdes) rend cette hypothèse peu vraisemblable. Une grande coalition AKP/CHP est de même totalement inconcevable. Une coalition MHP/AKP, alors que le MHP est opposé à l’adhésion à l’UE du pays, est en revanche imaginable, de même qu’un gouvernement AKP minoritaire.

Du point de vue des Européens opposés au processus d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, ces résultats électoraux ne sont pas nécessairement une bonne nouvelle. La dérive autoritariste d’Erdogan était un argument en or pour y mettre fin et en tout cas pour faire traîner les choses au maximum. Avec la montée du DHP, qui prône davantage de démocratie et de droits, cet alibi est affaibli. En revanche, une coalition AKP/MHP serait très positive car les nationalistes turcs sont de farouches opposants à l’adhésion à l’UE. De plus, mouvement d’extrême-droite lié au Bozkurt (« loups gris »), sa réputation en Europe occidentale est plutôt négative.

L’AKP a en tout cas connu son premier revers significatif, même si ce parti est loin d’être à terre. Perdre huit points en quatre ans alors qu’il est le parti sortant n’est pas lamentable. Et puis certains électeurs ont voulu mettre un frein aux ambitions du chef de l’Etat ou ont été révulsés par quelques scandales de corruption. Il y a enfin la croisade intérieure que mène Erdogan contre le mouvement Fetullah Gülen, après s’en être pris à l’opposition laïque au sein de l’armée et de la presse. Mais Erdogan découvre désormais que le peuple ne le suit plus aveuglément.

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

 

nota bene: la présence de la bannière européenne au-dessus de cet article indique qu'il intéresse les questions européennes. Néanmoins, à nos yeux, la Turquie n'a pas et n'aura jamais vocation à rejoindre la construction d'une Europe politique.

(Mise à jour le 08/06/2015)

06/11/2011

La Turquie néo-islamiste et l’Europe

800px-Flag_of_Turkey_svg.pngLa question turque a failli à deux reprises être réglée pour les Européens. En 1913, lors d’une des guerres balkaniques, l’empire ottoman avait quasiment perdu toutes ses positions en Thrace. La coalition des Serbes, Bulgares et Grecs, avec une aide occidentale et russe, était parvenue aux portes d’Istambul, qui s’apprêtait à redevenir Byzance. Mais nous étions entrés dans l’ère des nationalismes, et l’avidité bulgare causa la perte de tous. Au lieu de maintenir l’unité des alliés jusqu’à la victoire, l’anticipant par aveuglement nationaliste, la Bulgarie rompt l’alliance sacrée, permettant par ce sursis à l’armée ottomane de se restructurer et de contrer l’offensive, conservant ainsi la Thrace avec Andrinople (devenue Edirne) et Constantinople.

En 1920, alors que l’empire ottoman a perdu la première guerre mondiale face aux alliés, le traité de Sèvres impose à la Turquie des règles très contraignantes. Si elle conserve la rive européenne d’Istambul, qui sera toutefois placée sous mandat international, elle perd le reste de la Thrace ainsi que la région autour de Smyrne, qui appartiendra à la Grèce. La Cilicie devait être contrôlée par l’Italie, l’Arménie devait récupérer une partie de l’Anatolie orientale, enfin le peuple kurde aurait son état. Dépecée, la Turquie devait donc servir de zone tampon entre l’Europe et l’Asie musulmane.

C’est face à cette mort programmée décidée par des puissances européennes usées et ruinées par quatre ans de guerre, que Mustapha Kemal leva son glaive pour reprendre ce qu’il estimait appartenir à son peuple. Il mit fin violemment à la présence multimillénaire des Grecs en Anatolie, les deux pays procédant à des échanges de population après l’échec militaire des Grecs. L’Europe laissa faire. Elle avait bien d’autres soucis, entre le péril bolchevik naissant à l’est du continent et l’effondrement économique de l’ouest. En pleine reconstruction, démoralisée, elle resta impuissante face au sort des Grecs. Kemal, devenu Atatürk, avait rejoint le panthéon des grands hommes de l’histoire. Ce sauveur laïc, qui méprisait profondément l’islam ottoman, qu’il osa qualifier de « doctrine immorale », et qui mourut à cause de son amour du sang de Bacchus, voulut forger une nouvelle Turquie, moderne, occidentale. Dans un ultime défi à l’islam, il proclama ainsi cette phrase célèbre, « Adieu l’Orient ».

Kemal fit de l’antique Ancyre sa capitale Ankara. Elle était proche de l’ancienne cité d’Hattousa, capitale de l’empire hittite de souche indo-européenne. Kemal affirma que le peuple turc était européen, héritier de la matrice commune aux autres peuples du continent. C’est à cette Turquie là que le général De Gaulle pensait en 1963 quand il évoqua l’idée d’adhésion du pays à la CEE. Si Inönu, après la mort précoce du héros en 1938, sut dans un continent en guerre, maintenir une neutralité bienveillante, l’héritage de Kemal n’allait pas vraiment lui survivre.

Aujourd’hui, Erdogan a vaincu Atatürk. Et c’est le plus grand enseignement de ces dernières années. Désormais, alors que l’adhésion du pays à l’Union Européenne, selon le processus entamé en 2005, semble au point mort, ce qui ne chagrine pas outre mesure le premier ministre autoritaire, la presse européenne commence à ouvrir les yeux sur la réalité de la nouvelle Turquie de Gül, d’Erdogan et de Davutoglu. Même si le PS français et la SPD allemande, traditionnellement turcophiles, voulaient ranimer le processus ralenti par Merkel et Sarkozy, elles auraient du mal à expliquer l’adhésion d’un pays qui opprime la presse, arrête les journalistes sous de faux prétextes et des militaires en évoquant un énigmatique complot contre le gouvernement.

La journaliste Martine Gozlan (Marianne), dans un excellent ouvrage qui vient de sortir intitulé « L’imposture turque », démonte le nouveau régime et prouve la réislamisation en cours. Kurdes opprimés, Alevis persécutés, femmes voilées, opposants inquiétés, la Turquie d’Erdogan est au final bien moins démocratique que la Russie de Poutine. Et surtout elle n’hésite plus à menacer l’Union Européenne et ses membres. Davutoglu s’en est ainsi pris aux pays européens, les accusant de soutenir la rébellion kurde. L’AKP a également dénoncé les recherches de ressources énergétiques de la Chypre grecque, menaçant l’UE de gel des relations diplomatiques si Chypre accédait l’an prochain à la présidence de l’Union Européenne, comme elle doit le faire conformément aux traités. Enfin l’AKP s’en prend à Israël, expulsant son ambassadeur et cessant toute collaboration stratégique.

Erdogan souhaite désormais avoir de son côté la rue arabe, et devient le modèle des islamistes (Frères Musulmans en Egypte, CNT en Libye, Ennahda en Tunisie) prétendument « modérés ». Une vague néo-ottomane s’abat sur le Moyen-Orient et sur l’Afrique du nord. Face à cette vague, contre laquelle seule la Syrie de Bachar El Assad, avec des moyens violents qui choquent à juste titre les Européens, s’oppose, et d’ailleurs Erdogan a menacé la Syrie de représailles, ce qui est significatif, semble déferler. L’Europe qui rêvait d’une démocratie arabe, déchante. Elle en subit de nombreux flux migratoires en retour, vengeance d’outre-tombe de Kadhafi. Le représentant de la Russie à l’OTAN Dmitri Rogozine l’a dit, le choix est entre des dictateurs et les islamistes. En s’opposant aux premiers, l’UE a fait donc le choix des seconds.

Face à cette réislamisation qui désole les vrais amis de la Turquie, les turcs des élites (beyaz Türkler ou « turcs blancs »), et que déplore avec justesse Martine Gozlan, nous européens devons montrer les crocs. Le Monde section géopolitique du 6 novembre 2011, fait le point sur les limites du modèle turc, dénonçant les graves atteintes aux droits de l’homme en cours. Andrea Perrone dans la revue italienne Rinascita datée du 21 septembre 2011 explique que désormais la Turquie s’éloigne explicitement de l’Europe, envisageant une domination sur la Méditerranée orientale. Dans Le Monde du 4 novembre, Frédéric Lemaître a évoqué quant à lui une Allemagne célébrant « ses travailleurs invités turcs ». Une fois de plus, invité à Berlin, Recep Erdogan a multiplié les attaques contre l’Allemagne, refusant l’intégration proposée aux immigrés turcs, qu’il avait même qualifiée de « crime contre l’humanité ». On se demande pourquoi Merkel s’entête à inviter ce sinistre individu. En réalité, la CDU a tort, à la différence d’Edmund Stoiber (CSU) et de ceux qui perpétuent sa ligne, de tomber dans le piège de l’intégration. Elle s’était opposée à Schröder en 2000 lorsque celui-ci a souhaité introduire le droit du sol en Allemagne. Elle a aujourd’hui cédé, comme le RPR l’a fait à la suite du PS après 1988.

Face à une Turquie qui se réislamise, face à un gouvernement turc qui devient arrogant et agressif, qui cache à peine sa haine de l’Europe et d’Israël, face à un premier ministre qui tombe dans les bras du pantin de Khameneï, le triste Ahmadenijad, bourreau de la révolution verte de Téhéran, l’Europe doit se ressaisir. Elle doit apporter un soutien sans faille à Chypre, exigeant l’évacuation de l’île par la Turquie. Elle doit dénoncer sans relâche les arrestations de journalistes, de militaires, d’opposants. Nous ne devons pas rester passifs devant un second Iran en gestation. Si la Turquie renonce à l’européanisation mise en place par Atatürk, si elle affirme « Adieu l’occident », nous devons en prendre acte et réagir en conséquence.

La première réaction, et elle coûterait peu cher au président Sarkozy, et renforcerait sa crédibilité désormais très altérée, serait de mettre fin de manière unilatérale aux pourparlers d’adhésion, de manière à engendrer un salutaire électrochoc en Turquie même. La seconde réaction, celle de la chancelière Merkel, serait de revenir à la ligne de la CDU d’avant 2000 quant à la question turque en Allemagne. La troisième réaction serait de tendre la main à la Russie de manière décidée, et ainsi de rompre avec l’américanotropisme de certains de nos dirigeants.

Et alors que la Grèce va économiquement au plus mal, disons le haut et fort. Souvenons-nous de Missologghi. Souvenons-nous de Lord Byron ! Ne faisons aucune concession à Erdogan, qui nous remercie dès que nous cédons par des remarques acides. Ce n’est pas seulement l’intérêt des Européens, c’est aussi celui des Turcs, mais 50% des électeurs turcs ne l’ont pas encore compris.

Thomas Ferrier
Secrétaire général du PSUNE

07/08/2011

La Turquie et l’Union Européenne : état des lieux en août 2011

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erdogan-1.jpgAprès le troisième succès électoral de l’AKP turc de Recep Erdogan, réunissant près de 50% des voix aux élections législatives, qu’en est-il de la question de l’adhésion turque à l’Union Européenne, principale revendication du parti lorsqu’il s’est imposé la première fois ?

Nous, euro-socialistes, avons toujours considéré que le pro-européisme d’Erdogan n’était qu’une façade pour dissimuler un calendrier islamiste de moins en moins caché d’ailleurs, et une stratégie pour affaiblir le principal contre-pouvoir turc, et défenseur de l’héritage kémaliste, l’armée. Bien sûr, dans un état démocratique digne de ce nom, il n’est pas normal que l’armée puisse déterminer la politique de la nation, et bien évidemment qu’elle intervienne pour démettre un gouvernement qui lui déplairait. Mais la démocratie est un combat de tous les jours, résulte toujours d’une démopédie efficiente, et ne se décrète pas. Rome ne s’est pas faite en un jour.

Lorsque Mustafa Kemal fonda l’état turc moderne, il savait que le pays n’était pas encore prêt pour la démocratie, de même que le maréchal Pilsudski en Pologne avait été contraint de tenir le pays avec une certaine poigne à une époque où certains autoritarismes populaires voulaient s’imposer. Il avait analysé le principal obstacle à sa politique d’européanisation, qui restait néanmoins nationaliste, à savoir l’islamisme. Il avait cependant été contraint de tempérer son hostilité à l’islam par réalisme politique, dans un pays très majoritairement musulman et qui liait son identité nationale à cette religion. Pour Kemal, islam et démocratie étaient incompatibles, et la démocratie ne résulterait que de la victoire des idées nationales en version européanisées sur cette tradition qui lui paraissait étrangère.

Ainsi Kemal Atatürk voulut-il enraciner la tradition nationale turque dans le passé anatolien pré-islamique, fondant sa capitale sur les ruines de l’antique Ancyre (devenue Ankara) au cœur de la Cappadoce, et pas très loin d’Hattusa, l’ancienne capitale de l’empire hittite, en même temps que dans la turcité centre-asiatique et païenne, valorisée aujourd’hui encore par une partie du MHP, le parti nationaliste des « loups gris » (Bozkurtlar). Cette révolution morale, que Reza Shah tentera d’imiter en Iran et plus tard Zaher Shah en Afghanistan, impliquait de longues années de travail politique pour qu’enfin la démocratie émerge. Vouloir hâter la démocratie alors que le peuple n’est pas encore prêt, en revanche, c’est au final amener une nouvelle autocratie au pouvoir. En Iran, il y a eu Khomeiny. En Turquie, il y a Erdogan.

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13/06/2011

Nouvelle victoire de l’AKP !

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AKP_Logo.pngA l’issue du scrutin législatif de dimanche, le parti du président Abdullah Gül et du premier ministre Recep Erdogan a été reconduit aux affaires pour la deuxième fois consécutive, après une première victoire au forceps en 2002, face à des partis gouvernementaux accusés de corruption et d’incapacité à gérer les conséquences d’un tremblement de terre meurtrier, en l’occurrence une alliance entre une gauche nationale (DSP) et une droite nationale (MHP). En 2002, l’AKP, issu du parti islamiste Fazilet, lui-même scission du Refah d’Erbackan, avec 34.3% des voix, atteignait les plus hautes instances de l’Etat turc. Menacé d’interdiction et de dissolution par l’armée et la cour constitutionnelle, l’AKP confirma en 2007 sa légitimité populaire en obtenant 46.7% des voix, désavouant ainsi la réaction kémaliste, le CHP n’obtenant que 20.85% des voix, amenant son président à démissionner.

Les manœuvres de l’AKP pour rester aux affaires, et pour mettre une sourdine aux accusations, selon moi fondées, d’agenda islamiste caché, conforme à la stratégie de la taqija, ont été de différents ordres, relayés par une société de pensée islamiste, le Fethullah Gülen, sorte de franc-maçonnerie musulmane.

La première méthode a été de mettre en avant le complot Ergenekon, un rassemblement de kémalistes et de nationalistes décidé à faire tomber l’AKP. Ergenekon désigne la terre mythologique d’origine du peuple turc, là où il a fait la rencontre de la louve grise Asana, qui le conduisit en Anatolie. Par le biais de la justice, de nombreux journalistes et militaires de l’opposition ont été neutralisés et condamnés, au mépris visiblement des règles juridiques en vigueur dans les pays européens. Désormais, les velléités d’action de l’armée contre le gouvernement de l’AKP sont brisées.

La seconde méthode a été de se servir du processus d’adhésion à l’Union Européenne pour faire passer des réformes qui, au nom d’un alignement sur les conventions européennes, servaient l’intérêt du parti, toujours dans l’optique d’affaiblir les résistances kémalistes.

La troisième méthode pourrait avoir été de déconsidérer les dirigeants des partis d’opposition. En effet, peu de temps avant le scrutin, des vidéos à caractère pornographique mettant en scène plusieurs dirigeants du parti nationaliste MHP ont été révélées, amenant ces responsables à démissionner. Or, on sait qu’Erdogan espérait que le MHP n’atteigne pas 10% des suffrages, son élimination de toute représentation au parlement permettant à l’AKP de disposer du nombre de députés nécessaires pour changer la constitution.

L’AKP n’a pas complètement réussi son pari, puisque avec 326 députés sur 550, il échoue à obtenir les 2/3 des députés, et qu’avec 49.8% des voix, il rate de peu la majorité absolue. Il progresse néanmoins de plus de trois points en quatre ans, ce qui témoigne de la popularité du premier ministre et atteste aussi de la réislamisation de la société turque. Les républicains du CHP avec 25.9% des voix progressent de près de cinq points, ce qui est malgré tout un succès pour son nouveau président, qui avait mis le combat laïc en sourdine tout en accentuant son caractère socialiste.

Les nationalistes du MHP, héritiers d’Alparslan Türkes, survivent au scandale et en obtenant 13% des voix, et 53 députés, conservent presque intact leur capital électoral. Alors qu’en 1999 ils avaient atteint leur plus haut score, avec 18% des voix, mais qu’en 2002 ils avaient éliminé du parlement, ils avaient retrouvé un niveau convenable en 2007 avec 14.29% des voix. Leur légère régression s’explique par la candidature de plusieurs mouvements nationalistes dissidents, comme le MMP (« mouvement nationaliste et conservateur ») et ses 0,09% ou le MP (« parti national ») et ses 0,14%, mais surtout comme le parti national-islamiste BBP (0,73%), absent des élections en 2007. Les manœuvres dont le MHP a été victime ont donc pour l’essentiel échoué.

Si le rassemblement d’indépendants en faveur des populations kurdes, avec 6.64% et 36 députés, a bien résisté et s’est même conforté, il pourrait surtout être décisif si Erdogan, au prix de quelques concessions, avait besoin de députés supplémentaires pour faire passer ses réformes.

Les autres partis politiques, et notamment démocratiques et/ou socialistes, sont balayés. Le mode de scrutin proportionnel, alors qu’il favorise normalement les petits partis, neutralisé par cette barre fatidique des 10%, engendre en Turquie un phénomène de vote utile. Le CHP et le MHP en ont notamment bénéficié afin de mettre en place au parlement une opposition réelle à l’AKP. Les mouvements de type conservateur et/ou islamiste sont également fragilisés, en raison d’un vote utile en faveur du parti gouvernemental. Le Saadet Partisi n’obtient que 1,24% des voix, l’ « HEPAR » 0,28%. Le DSP, parti important avant 2002, tombe à 0,25% et est donc totalement marginalisé, tout comme l’extrême-gauche, réduite 0,21% des voix, les démocrates (DP) à 0,65% ou les libéraux du LDP (0,04%).

Cette victoire de l’AKP d’Erdogan n’est pas une bonne nouvelle pour les vrais européistes, naturellement opposés au processus d’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, même si ce dernier est actuellement au point mort. Il suffirait que le PS gagne en France et la SPD en Allemagne pour que les résistances en place disparaissent et que le processus mortifère reprenne. Dans tous les cas, Erdogan a réussi à se servir du dit processus pour renforcer son pouvoir sur la Turquie. De fait, les accusations d’autoritarisme qui lui sont reprochées paraissent fondées. Mais il est possible que la question de cette adhésion prenne fin si les manifestations d’autocratie du parti au pouvoir sont trop criantes et mettent fin au processus, et notamment si les atteintes aux droits des citoyens sont attestées de manière indiscutable.

Par sa victoire, l’AKP démontre en tout cas que sa démarche a réussi. Qui aurait pu croire il y a dix ans qu’une telle évolution de la Turquie aurait lieu. Recep Erdogan est d’ailleurs apparu vainqueur, auprès de son épouse et de sa fille voilées, devant les media. Est-ce de cette « Turquie », qui bafoue tous les principes de Kemal Atatürk, dont nous voulons comme membre de l’UE ?

Thomas Ferrier
Secrétaire général du PSUNE

06/06/2010

Comment une ONG islamiste a piégé Israël

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erdogan.jpgQuoi qu'on puisse penser de l'embargo économique mis en place par l'état d'Israël à la suite de la victoire électorale dans la bande de Gaza du Hamas, parti relevant de la mouvance islamiste et opposant résolu à l'idée même d'un état juif à côté d'un état palestinien, les évènements de cette dernière semaine ont démontré les difficultés qu'avait le gouvernement israélien pour assurer la sécurité de ses territoires dans un contexte de franche hostilité d'une partie de plus en plus importante de l'opinion internationale.

La flottille « anti-sioniste » composée de six navires, un septième, le Rachel-Corrie, ayant pris un certain retard par rapport aux autres, n'était pas simplement une expédition humanitaire destinée à fournir à la population gazaouie des éléments vitaux, médicaments et/ou nourriture, mais avait comme but avoué de briser le blocus mis en place par l'Etat hébreu, et donc, au nom du prétendu droit d'ingérence, faire céder un état souverain dont la politique déplaisait. En outre, une association turque, d'obédience islamique, l'IHH (Insani Yardim Vakfi, « fondation pour les droits humains, les libertés et l'action humanitaire »), était du voyage et en vérité, de l'aveu même de son dirigeant, Bülent Yildirim, le principal organisateur, avec une délégation de plus de 350 Turcs. C'est la raison pour laquelle les neuf victimes des commandos israéliens étaient toutes membres de cette organisation et tous turcs ou d'origine turque.

Dans cette affaire, les services de renseignements israéliens et l'armée ont sous-évalué le potentiel de résistance des passagers du Mavi-Marmara, ce qui est logique car il s'agissait de militants radicaux et non de « gentils humanitaires », dont la mission était de provoquer une riposte inadéquate de Tsahal, et donner une fois de plus à Israël le mauvais rôle. Cet objectif a été rempli davantage encore que ne l'auraient souhaité les organisateurs, au prix malheureusement de plusieurs vies humaines. En effet, la condamnation de l'action de l'armée israélienne a été universelle, seuls les Etats-Unis réagissant de manière plus feutrée.

Du point de vue européaniste qui est le nôtre, que peut-on retenir de cet évènement tragique ?

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28/02/2010

Les islamistes turcs veulent modifier leur constitution

AFP - 28/02/2010 | Le parti au pouvoir en Turquie envisage de présenter d'ici fin mars une révision constitutionnelle au Parlement, a déclaré le premier ministre turc au moment où son pays traverse une crise provoquée par un complot présumé visant son gouvernement en 2003. "Il ne s'agira pas de réviser de fond en comble la Constitution, mais nous envisageons d'amender certains articles", notamment celui sur l'interdiction des partis politiques et le fonctionnement de la justice, a indiqué Recep Tayyip Erdogan, lors d'une conférence de presse.

La Constitution turque, élaborée dans le sillage du coup d’État militaire de 1980, a toujours été contestée. "Nous procéderons rapidement afin d'en discuter avec les partis politiques" représentés à l'Assemblée nationale, a-t-il souligné, précisant que ces amendements s'inscrivaient dans les efforts de la Turquie de s'aligner sur les normes européennes de démocratie.

La Constitution turque a été profondément amendée, notamment entre 2001 et 2004, pour permettre à la Turquie de satisfaire les conditions nécessaires à l’ouverture des négociations avec l’Union européenne.

Une révision constitutionnelle a été l'un des premiers objectifs du gouvernement du parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste), après sa large victoire législative de 2007.

Source (Forum du PSUNE)

En clair, il s'agit d'empêcher la cour constitutionnelle d'interdire l'AKP si cette dernière prend des mesures pro-islamistes... TF

05/02/2010

L'armée turque a perdu sa mainmise sur le pouvoir

... et la Turquie a perdu sa laïcité.

03/02/2010 | Par Selcan Hacaoglu (CP) | BASE NAVALE D'AKSAZ, Turquie — L'armée turque, longtemps considérée comme l'épine dorsale du régime laïc mis en place par Ataturk, est en pleine zone de turbulences: louée pour ses missions à l'étranger, elle a vu son image ternie par les allégations de complot en vue de renverser le gouvernement issu de la mouvance islamiste.

L'élite militaire des "Pachas", ainsi nommée en référence au titre honorifique utilisé depuis l'époque de l'Empire ottoman, ne serait plus intouchable, à en juger par les peines de prison prononcées contre certains d'entre eux.

L'armée turque, qui a renversé quatre gouvernements depuis 1960, était en effet considérée comme la détentrice réelle du pouvoir dans la République strictement laïque fondée par Mustafa Kemal Ataturk sur les décombres de l'Empire ottoman.

Une petite révolution est donc en cours dans le pays, depuis que le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan s'en est pris au pouvoir des militaires pour satisfaire aux demandes de l'Union européenne. Dans l'optique d'appuyer la candidature de son pays à l'UE, M. Erdogan a récemment proposé une série de nouvelles mesures en ce sens.

LIRE LA SUITE (GOOGLE HOSTED NEWS/CANADIAN PRESS)