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26/05/2013

Réflexions sur la lecture chrétienne du geste de Venner

mtr_logo.gifDans un article précédent, j’ai estimé nécessaire de rendre hommage à l’historien Dominique Venner, pour son geste sacrificiel de romain, qui rappelait celui du général P. Decius Mus, évoqué par Tite-Live. Hommage d’un païen à un autre païen, fidèle à la longue mémoire européenne et aux dieux de nos ancêtres.

Nombreuses sont les figures chrétiennes, d’une mouvance à laquelle les media ont voulu associer Venner, qui ont su honorer la mémoire de cet homme, malgré la différence de foi les séparant. En revanche, certains chrétiens n’ont pas pu s’empêcher de crier au sacrilège, et même à la profanation, tolérant pourtant que Notre-Dame soit devenu davantage un lieu touristique qu’un lieu de culte ou d’expression de son patriotisme, comparant Venner à une vulgaire pussy riot, un certain Yves Daoudal allant même à qualifier le mort de « satanique ».

Il y a lieu en effet de s’interroger sur ces convertis « born again », ces nouveaux chrétiens qui, abandonnant leurs convictions premières, ont le zèle de ceux qui veulent se faire pardonner leurs égarements passés. Rappelons à ce propos que « Frigide Barjot », qui n’est pourtant pas une fanatique, a elle-même « découvert la foi », au-delà de son éducation chrétienne, il y a quelques années, en faisant « des caisses » à ce sujet.

Le patriotisme implique qu’on doive faire primer l’amour de son pays, de son peuple, de sa civilisation avant toute conception religieuse. C’est en tout cas ainsi qu’en Europe le phénomène religieux a pris ses traits spécifiques. Un patriote est prêt à risquer l’enfer s’il le fait par dévouement pour le pays de ses pères, et c’est quelque chose d’infiniment respectable. Avant d’être chrétien ou même païen.

L’acte de Venner, qu’on partage les idées qui étaient les siennes ou qu’on les rejette, était indiscutablement un acte patriotique, de cette grande patrie qui pour lui était l’Europe, de cette petite patrie qu’était la France, un sacrifice dans un lieu symbolique pour réveiller les consciences endormies, pour à sa manière sonner le tocsin d’une Europe qui succombe à ce qu’il qualifia de « dormition ». Un chant des Sirènes conduit en effet l’Europe au bord du précipice ou dans les bras d’une Scylla verte.

De nombreux ouvrages ont révélé la réalité bien sombre de la christianisation de l’Europe, qui s’est accompagnée de nombreuses horreurs afin que les païens acceptent de courber l’échine devant une foi étrangère faisant de leurs ancêtres des damnés, punis par le seul crime de ne pas avoir connu un obscur judéen mort quelques siècles auparavant dans une contrée lointaine. Cette réalité est fondamentalement niée ou simplement ignorée de la plupart des européens chrétiens d’aujourd’hui. Elle est pourtant assumée par ces gens qui tentent de salir la mémoire de Dominique Venner au nom de leur foi aveugle que l’écrivain H.P. Lovecraft décrivait comme la « superstition syrienne imposée par Constantin ».

Mais quel est le plus grand reproche que Venner a pu faire à leur religion, et qu’ils n’acceptent pas ? Venner a mis en exergue le caractère universaliste du christianisme, estimant que l’absence d’une religion identitaire en Europe nous a démunis face à l’idéologie mondialiste, alors que par comparaison l’hindouisme, religion ethnique de l’Inde, est d’un grand secours pour un pays qui a su résister et survivre à tous les conquérants. Pour lui, ce qui était le plus proche des Vedas de l’Inde ancienne, de cette sagesse originelle et sacrée de nos ancêtres, c’était l’Iliade et l’Odyssée. C’est chez Homère qu’il a trouvé l’espoir d’une renaissance et compris sans doute que jamais l’Europe ne mourrait.

L’empereur Julien voulait interdire aux chrétiens d’enseigner les textes homériques, estimant qu’ils n’étaient pas capables de les comprendre. Et de même, certains n’ont pas compris quel était le message que l’acte de Venner impliquait. Il a su vaincre ce qui constitue la plus grande force de l’Eglise, la peur de la mort. La mort, il l’a affrontée bien en face, sans sourciller et sans hésiter, et a vaincu cette peur. Cela demande un courage incommensurable lorsqu’on est un esprit sain dans un corps sain. En triomphant d’elle, comme les Européens des anciens temps, c’est en cela qu’il a rejeté la conception chrétienne de la vie.

Chroniques de la décadence européenne - 26/05/2013

DU « MARIAGE POUR TOUS »

romeburning.jpgUne nouvelle manifestation d’opposition au mariage homosexuel se déroulait aujourd’hui. Moins importante que les précédentes, elle témoigne d’une indiscutable démobilisation d’une partie des opposants. Elle était prévue et dans une certaine mesure elle a eu lieu. C’était inévitable, à partir du moment où plus aucun dispositif institutionnel ne pouvait empêcher l’application de cette loi.

A l’issue de ce mouvement de contestation arrivant à son terme, puisque de l’aveu des ténors de l’UMP comme de la personnalité non représentative de cette contestation, la créature médiatique « Frigide Barjot », ce sera la dernière manifestation. Quel bilan provisoire peut-on en tirer de toute cette affaire ?

Du côté du gouvernement, on n’a pas tremblé afin de tenir la promesse faite par le candidat Hollande à une « communauté » sexuelle marginale, quelques milliers d’individus étant concernés, mais sans doute bien représentés au PS. La loi commune a pourtant pour but l’intérêt de tous et n’a pas à être modifiée pour plaire à une extrême minorité. En vérité, la seule chose que le président en exercice peut faire, c’est de récompenser les minorités qui l’ont soutenu, qu’elles soient sexuelles ou ethniques. Il n’a aucun moyen en revanche de contrer la crise économique que nous connaissons et qui s’explique par l’échec total du modèle libéral, un modèle qui arrive à épuisement, pris dans ses contradictions.

Le gouvernement a été aidé en ce sens par une droite tiède si ce n’est timide, incapable de parler d’une seule voix, se divisant entre ceux qui voudraient se limiter à mettre en place la même politique que la « gauche » (François Fillon) mais à sa place, et ceux qui voudraient proposer une alternative plus marquée, selon la démarche de l’ancien président Sarkozy (Jean-François Copé et Guillaume Peltier). La droite molle a déjà renoncé à remettre en question cette loi si elle devait arriver au pouvoir en 2017. La droite « forte », qui sait qu’elle devra se résoudre au même renoncement, comme l’a fait le Parti Populaire en Espagne, est en revanche prête à assumer en paroles et dans la rue son refus. Il faut bien éviter la fuite des électeurs conservateurs vers l’extrême-droite et le Front National, dont la dirigeante a été pourtant particulièrement discrète sur cette question, Marine Le Pen étant indiscutablement gay-friendly, tout comme Virginie Merle (« Frigide Barjot »), à la différence notable de sa nièce.

Il a aussi été aidé, en plus des sénateurs et des députés de droite venus en renfort de la fausse « gauche », par un conseil constitutionnel particulièrement complaisant, qui a adapté son calendrier à celui voulu par le président de la république, au point de rendre sa décision favorable le jour international de « lutte contre l’homophobie ». On savait déjà que Jean-Louis Debré ne serait pas zélé sur cette question, et il l’avait d’ailleurs annoncé, et on se doutait bien qu’un politicien âgé comme Giscard d’Estaing suivrait le mouvement, incapable qu’il avait été du temps du pouvoir à s’opposer au « parti de la décadence ».

Enfin, François Hollande a été considérablement aidé par Virginie Merle, épouse Tellenne, personnage fantasque que les media ont mis en exergue et qui a ainsi pu se retrouver propulsée à la tête d’un mouvement dont elle ne partageait en rien les finalités. En effet, partisane officielle de l’union civile pour les homosexuels, c'est-à-dire en vérité du « mariage civil », se limitant à refuser un droit d’adoption que l’union civile autoriserait en réalité aussi, elle n’était pas à même d’opposer un front du refus sérieux à la politique gouvernementale. Au contraire, elle a plutôt cherché à orienter le mouvement vers une voie sans issue, n’hésitant pas à jeter l’anathème sur le « Printemps français » et à dénoncer des extrémistes pour la plupart imaginaires. Elle a fini par s’écarter lorsque ses provocations multiples, et sa déclaration honteuse sur Dominique Venner, qu’elle ne connaissait pas, l’ont fait mal voir de gens agacés et désormais moins disposés à la tolérer parmi leurs rangs.

Sa mise en avant, tout comme celle des évêques et des représentants les plus marqués de l’ultra-cléricalisme le plus réactionnaire, ont permis de détourner une saine colère populaire vers une voie de garage. Or il y avait d’excellentes raisons, sans avoir nulle besoin de se référer au christianisme, de refuser le « mariage pour tous », qui est une insulte perpétuelle à la tradition européenne, héritière du génie grec, romain et nordique. C’est bien pourquoi un historien païen n’a pas hésité à se sacrifier au nom de notre civilisation il y a quelques jours à Notre-Dame. Ce geste héroïque a indigné de nombreux chrétiens, et en particulier les traditionnalistes, qui n’ont pas été en mesure de le comprendre. J’y reviendrai dans un prochain article.

Quant à la conclusion de cette affaire, à savoir la promulgation de la loi à la va vite par un gouvernement aux abois, Hollande ayant mis moins d’une journée pour signer le décret d’application, une fois le verdict du Conseil Constitutionnel rendu, elle invite à une réflexion plus générale sur le concept de loi.

Le véritable courage politique ne sera pas de se limiter à l’abrogation en 2017. La droite « forte » et le néo-FN de Marine Le Pen ont annoncé qu’ils l’abrogeraient, tout en précisant que ceux qui se seront mariés entre 2013 et 2017 le resteront. On sait ce qu’il faut penser d’un tel engagement. Une fois au pouvoir, ils n’en feront rien.

La seule position crédible dans le cadre national serait bien de prôner l’abrogation avec effet rétroactif de cette loi. Mais il n’existe pas de « solution nationale », ni sur cette question ni sur une autre. La France n’est d’ailleurs pas la seule en Europe à avoir mis en place un « mariage » homosexuel. Elle ne fait que rejoindre les pays scandinaves, le Benelux, la péninsule ibérique, et sera prochainement suivie du Royaume-Uni. Seule une solution européenne, dans le cadre de la mise en place d’un état civil européen, pourra y remédier. En définissant à l’échelle de l’Europe le mariage civil comme l’union d’un homme et d’une femme dans le cadre d’un nouvel Etat qui s’appellera l’Europe, la question sera réglée. Et cette loi PS rejoindra les oubliettes de l’histoire, en même temps que la constitution française. Une constitution européenne la remplacera, bâtie sur des principes sains, conforme au génie de nos ancêtres.

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

21/05/2013

Europa en deuil

Les raisons d’une mort volontaire

Je suis sain de corps et d’esprit, et suis comblé d’amour par ma femme et mes enfants. J’aime la vie et n’attend rien au-delà, sinon la perpétuation de ma race et de mon esprit. Pourtant, au soir de cette vie, devant des périls immenses pour ma patrie française et européenne, je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. J’offre ce qui me reste de vie dans une intention de protestation et de fondation. Je choisis un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre Dame de Paris que je respecte et admire, elle qui fut édifiée par le génie de mes aïeux sur des lieux de cultes plus anciens, rappelant nos origines immémoriales.

Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. Je m’insurge contre les poisons de l’âme et contre les désirs individuels envahissants qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations.

Le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. À défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes.

Je demande pardon par avance à tous ceux que ma mort fera souffrir, et d’abord à ma femme, à mes enfants et petits-enfants, ainsi qu’à mes amis et fidèles. Mais, une fois estompé le choc de la douleur, je ne doute pas que les uns et les autres comprendront le sens de mon geste et transcenderont leur peine en fierté. Je souhaite que ceux-là se concertent pour durer. Ils trouveront dans mes écrits récents la préfiguration et l’explication de mon geste.

Dominique VENNER (1935-2013)

Mort d’un titan européen !

dominique venner,suicide,21 mai 2013,thomas ferrier,hommageDominique Venner dîne ce soir en Elysion. Il s’est sacrifié sur l’autel de Minerve en ce jour de Mars, ce mardi 21 mai, pour offrir aux Européens la victoire, tel le général romain dédiant sa vie aux dieux lors de ce rite sacré qu’on appelait devotio.

Son geste ne peut pas être compris des sycophantes qui trônent à la télévision et de cette caste de politiciens arrivistes sans honneur et sans conviction. Il est mort en romain, tel Sénèque s’ouvrant les veines pour protéger les siens contre l’ire d’un tyran. Ce Néron moderne, qui est le Système à assassiner le peuple européen, il l’a combattu toute sa vie et de là où il est, aux côtés des héros de notre terre, il le combat toujours.

J’ai rencontré Dominique Venner deux fois dans ma vie, et la seconde fois, il y a quelques mois, me mit face à un européen authentique. Son paganisme, il le vivait par ses actes et par ses mots. Les éphémères que nous sommes ne peuvent plus comprendre l’esprit qui a pu animer un Léonidas ou un Scipion. Mais en rencontrant Venner, l’homme moderne est face à un homme de la tradition, face à un résistant contre toutes les décadences, contre toutes les trahisons.

L’homme est mort mais son âme est immortelle. Il aura été l’homme qui aura dit non à l’extinction de l’Europe, non à ce long suicide de la psychê européenne qui nous emmène jusqu’au bord du gouffre. Et pendant que ce soir, sur cette place de la Bastille où de vrais hommes ont combattu pour la liberté et pour la république, trônent ceux qui se réjouissent d’avoir tourné le dos à l’Europe éternelle, Dominique gagne le royaume de Zeus, invaincu.

Son combat pour l’Europe européenne, il l’aura mené jusqu’au bout, jusqu’à l’ultime. Europa ne l’oubliera pas. Et nous ne l’oublierons pas.

Nous n’oublierons pas l’historien remarquable, l’auteur de « Histoire et traditions des Européens », du plus récent « Choc de l’histoire », de ce « Dictionnaire de la collaboration » où il n’hésita pas à rappeler le passé collaborationniste de gauche du père d’un ancien premier ministre PS.

Nous n’oublierons pas l’homme cultivé, plein de sagesse, d’une noblesse sans égal, mais un homme abordable, chaleureux et de conviction. Il fut un pilier, celui d’une Europe qui ne renoncera jamais à demeurer ce qu’elle est et à éblouir le monde. Si Arès avait dû sur terre s’incarner, il aurait été un Dominique Venner.

Il servit Mars, dans son combat pour une civilisation qui ne se mettra jamais à genoux puis dans son action politique pour que naisse la Nation Europe ! Puis il se mit au service de Minerve, et de Dame Clio, et par sa plume sure, par son talent, il nous rappela nos ancêtres, la vision qui fut la leur et pourquoi ils sont morts.

Dominique nous a quittés. Pour que la victoire soit, même s’il ne la verra pas en parcourant la terre des vivants, il a choisi sa mort. Tous les hommes libres d’Europe, tous ceux qui chérissent notre civilisation immémoriale, née du génie de ces Boréens que Dominique évoquait avec nostalgie, née de la Grèce d’Homère, dont l’Iliade était son livre de chevet, et de la Rome de Brutus l’ancien, pleurent en ce jour.

C’est un européen parmi les meilleurs qui vogue sur la barque de Charon. Son nom sera à jamais en notre cœur. Et sa statue, un jour, siègera devant cette cathédrale dans laquelle il coupa le fil des Parques, par un geste conquérant.

Il y a deux millénaires, ce n’était pas cette vierge qu’on y honorait mais Athéna Parthénos, la Minerve gallo-romaine, Brigantia. En face du temple de Mars Camulus, où désormais se trouve la Préfecture de Police par une ironie de l’histoire. Au cœur même de Lutèce, dans la cité des Parisii, il s’est éteint mais ce faisant il a allumé une flamme qui, elle, ne s’éteindra pas.

dominique venner,suicide,21 mai 2013,thomas ferrier,hommagePour que sa mort n’ait pas été vaine, les Européens que nous sommes avons hérité d’un devoir, celui de faire vivre et de faire revivre l’Europe, celui de combattre jusqu’à notre dernière goutte de sang pour que l’Europe unie soit, pour que l’Europe renaisse. Tel est son message.

Dominique Venner n’était pas un souverainiste ni un réactionnaire. Il était un véritable révolutionnaire, un authentique patriote de l’Europe unie, et surtout un homme d’une grande valeur, un kalos kagathos.

Salut à toi, combattant de l’Europe !
 
Thomas FERRIER

20/05/2013

Hollande, l'homme pour qui les mots n’ont pas de sens

 
pictoroutier_c7.jpgJeudi 16 mai, à l’émission « C’est dans l’air » d’Yves Calvi, le politologue Dominique Reynié, commentant l’annonce faite par Hollande d’instaurer avec les pays de la zone euro un gouvernement économique qui se réunirait tous les mois autour d'un président et qui notamment débattrait des principales décisions de politique économique à prendre par les Etats-membres, harmoniserait la fiscalité, commencerait à faire acte de convergence sur le plan social, note que c’est un pas important vers le fédéralisme qui allait être opéré. Il se fondait également sur la promesse de réaliser une union politique européenne dans les deux ans.

Bruno Le Maire a trouvé que le discours sonnait faux. Ce n’est pas cela. Précisément, chez Hollande, les mots n’ont pas de sens. N’a-t-il, au début de son discours, expliqué qu’il oeuvrait avec succès depuis un an pour la souveraineté de la France ? Ne continue-t-il pas, en matière économique, de proposer aux Français des propositions aussi mesquines que détaillées, s’éloignant des solutions retenues par tous nos voisins ? Comment cela serait-il compatible avec davantage de fédéralisme ? Au moins son prédécesseur Nicolas Sarkozy osait-il parler de souveraineté partagée, ce qui était à la fois cohérent et honnête, même s’il n’est pas allé assez tôt et assez loin dans ce domaine : il est bien dommage qu’il n’ait pas converti la proposition faite en août 2011, en pleine crise de la zone euro, avec Angela Merkel .

D’ailleurs Hollande voit la France comme un trait d’union entre une Europe du Nord et une Europe du Sud. Or s’il faut un trait d’union, s’il faut jouer les pays du Sud contre les pays du Nord, c’est qu’il n’y a pas d’Europe.

Que faut-il comprendre quand notre président répond, à tout propos, qu’il décidera ? Nous sommes, en théorie, en démocratie, même si notre régime est présidentiel. Le président ne vote pas les lois. Par ailleurs, s’il voulait vraiment ouvrir une perspective européenne, il parlerait au moins de décisions partagées. Peut-être les mots n’ont-ils pas de sens et veut-il dire par là qu’il décidera tout seul pour ne rien décider, qu’il laissera ses ministres se complaire dans la cacophonie pour ensuite s’en féliciter.

Une seule chose est sûre. Le président est heureux dans son job. Il est fier de lui. Mais chacun sait que les heureux au travail sont les incapables.

Il y a quand même un point sur lequel les mots creux qui succèdent aux mots creux finissent par inquiéter. Cette absence de référence à la démocratie dans le discours se retrouve, notamment, quand il parle de l’Europe. Il envisage un gouvernement économique avec un président nommé. Il considère que la France est honorée par son dialogue avec le collège des commissaires. Où est la représentation populaire dans tout cela ?

Mais on peut encore une fois se rassurer car les mots n’ont toujours pas de sens. Il n’y a aucune chance pour que l’Allemagne s’intéresse à des propositions aussi mal formulées, aussi peu empreintes de démocratie. Le journal Ouest-France cite Michael Stübgen, membre de la CDU d’Angela Merkel et porte-parole des affaires européennes au Bundestag, lequel les critique sans ménagement : « il s'agit d'une tentative, avec de grands discours européens, de faire diversion face aux efforts insuffisants de réformes au niveau national ».

En mettant la condition absurde d’une harmonisation sociale par le haut, Hollande sait qu’il apporte une fin de non-recevoir à la main que les autres lui tendent. Paradoxalement, il ne voit dans sa prétendue « gouvernance économique » qu’un moyen pour les états de renforcer leur souveraineté, de se dégager des contraintes communes, celles de la Banque centrale et celles de la commission, ce qui ferait presque passer, par comparaison, Manuel Barroso pour un sage. Ce faisant, il feint d’ignorer que ces contraintes ont été acceptées ou voulues par les états en question. De fait il voit la zone Euro comme une manne dans laquelle chacun pourrait puiser, sans qu’aucune règle ne soit imposée à personne. C’est la raison pour laquelle la zone Euro devrait, selon lui, être dotée d'une capacité budgétaire et pouvoir lever des emprunts.

Le journal Die Welt l’a bien compris : « Hollande continue à ne pas montrer le moindre appétit pour la réduction des dépenses de l'État». De son côté, le site du Spiegel ironise, quand il entend Hollande «se féliciter de quelques uns de ses succès … en grande pompe monarchique». Les Anglais ne sont pas plus tendres avec lui. Le Guardian, qui compare sa prestation au célèbre « En attendant Godot » de Beckett, retient qu’ « il existe de forts doutes sur sa capacité à nager contre les courants qui le tirent vers le fond ».

Quand Hollande parle d’offensive, d’initiative européenne, de sortir l’Europe de sa langueur, cela ne veut simplement rien dire.
 
Peter Eisner (PSUNE/LBTF)

13/05/2013

Retour sur les élections législatives bulgares (J+1)

 A 99,6% environ des suffrages dépouillés, nous connaissons désormais le résultat quasi définitif des élections législatives bulgares de ce dimanche.

Avec 30,74%, le GERB remporte les élections législatives, avec un score honorable mais largement insuffisant pour pouvoir bâtir une majorité stable au parlement, sauf en cas de grande coalition. Il devance le Parti Socialiste Bulgare (ex-communiste), qui obtient néanmoins 27,06% des voix, soit à peine plus de trois points d’écart d’avec son adversaire de droite. Il est fort peu probable dans l’état actuel de l’opinion publique et compte tenu d’une opposition ferme entre les deux partis principaux qu’une alliance voie le jour.

Le parti représentant la population turcophone, le Mouvement pour les Droits et les Libertés (DPS), connaît également un beau succès avec 10,46% des voix, ce qui constitue et de loin son meilleur score. Il a ratissé large au sein de cette communauté mais aussi probablement auprès d’une partie des électeurs roms.

Enfin, le mouvement Ataka de Volen Siderov a plutôt bien résisté, malgré le score exécrable de son leader aux dernières élections présidentielles, n’ayant pas obtenu 4% des voix. Avec 7,4% des voix, il ne réalise pas son score maximal mais est à nouveau en progression électorale, une progression qui aurait été plus nette sans la concurrence du Front National pour le Salut de la Bulgarie (NFSB), qui échoue de peu à rentrer au parlement, avec 3,75% des voix. Les autres formations nationalistes, en particulier le VMRO (1,9%), le Parti National-Démocrate de Dimitar Stoyanov (0,09%), l’Unité Nationale Patriotique (0,1%) ou le Mouvement pour l’Unité Nationale (0,06%) sont nettement dominées. En tout, la droite nationaliste obtient 13,4% environ des suffrages.

Les autres mouvements conservateurs, comme l’Union des Forces Démocratiques (1,39%), l’Union Chrétienne Sociale (0,05%), Ordre, droit et justice [PSZ] (1,7%) ou le Parti Chrétien Démocrate (0,1%) sont marginalisés, tout comme les centristes du CSD (1,53%), l’Alliance Libérale (0,25%).

A gauche, les écologistes se contentent de 0,74% des voix, la Ligue communiste 0,17% et Gauche bulgare 0,17%. Le PSB a fait le plein de son camp, bénéficiant d’un fort utile destiné à triompher du GERB. Même si le pari n’est pas rempli, ce bon résultat annonce une future déconvenue pour le GERB si ce dernier n’arrive pas à créer une majorité parlementaire, ce qui semble le cas. Ataka a d’ailleurs fait savoir qu’elle n’avait pas l’intention de rejoindre une coalition.

12/05/2013

Elections législatives bulgares : le GERB triomphe de la nausée

BULGARIE

élections législatives bulgares,ataka,gerb,psb,bulgarie,thomas ferrierC’est dans une Bulgarie désespérée que les électeurs se sont rendus ce dimanche aux urnes mais sans conviction. A 17h30 à Sofia, seulement 41,3% des électeurs avaient fait le déplacement. Encore une fois, en Europe centrale, le parti de l’abstention est le grand vainqueur. Il l’est d’autant plus que la corruption endémique de la classe politique bulgare a fait des ravages dans l’opinion.

En l’absence même de résultats préliminaires, nous devons pour le moment nous contenter des différents sondages sortis des urnes. La hiérarchie entre les partis politiques semble à peu près déterminée à cette heure.

Le GERB, parti de droite libérale et conservatrice, et actuellement au pouvoir à Sofia, semblerait demeurer le premier parti du pays, avec entre 30,4% et 34% des voix, loin devant le PSB (socialistes bulgares), qui n’obtiendrait qu’entre 25,3% et 28,7%.

Le mouvement de défense de la minorité turque connaît également un résultat plus qu’honorable avec près de 10% des voix, et même 10,9% dans le sondage le plus favorable. Il a su ratisser et même assécher le vote de sa communauté, afin de peser au parlement comme troisième force du pays.

La droite nationaliste et eurosceptique, représentée par Ataka de Volen Siderov mais aussi par le Front National pour le Salut de la Bulgarie (NFSB) de Valeri Simeonov, s’en sort plutôt bien, alors que les sondages d’il y a encore un moins l’annonçaient comme l’une des grandes perdantes du scrutin. Mais les derniers scandales politiques lui ont permis de relever la tête.

Créditée d’entre 7,5 et 9%, Ataka réussit un score honorable, alors même que le parti était en perte de vitesse, depuis notamment le score extrêmement médiocre de Siderov aux dernières élections présidentielles, score qui avait amené, en plus de problèmes matrimoniaux, à une scission menée par son ancien beau-fils Dimitar Stoyanov, député européen et fondateur du « Parti National-Démocrate », structure totalement absente à ce scrutin. En revanche, le NFSB rate de peu l’entrée au parlement, avec 3,3% des voix environ. Il fait jeu égal avec le DSB (Démocrates pour une Bulgarie Forte), de droite conservatrice, et qui ne rentrera pas non plus au parlement, au grand dam du GERB, mais aussi avec le DBG (« Bulgarie des citoyens »).

Le VMRO (nationalistes macédoniens), avec environ 2,1% des voix, et le P3C (mouvement populiste « Ordre, loi et justice ») avec entre 1,5 et 2,1%, complètent la marche.

En résumé, la droite conservatrice, bien que divisée en plusieurs factions, domine au niveau électoral, mais seul le GERB entre au parlement et se retrouve ainsi sans alliés. Le PSB a échoué à proposer une alternative crédible au GERB mais pourrait compter sur l’appui de la communauté turque (DPS). Le pays risque donc d’être sans majorité parlementaire, ce qui pourrait conduire à de nouvelles élections. Les nationalistes, Ataka en tête, capitalisent quant à eux un peu moins de 15% des voix, ce qui est un score plutôt élevé. Siderov apparaît comme l’un des gagnants de ce scrutin, ayant réussi à digérer sa scission interne et contenir la concurrence du NFSB.

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

Mise à jour: à 22h50, à 86% du dépouillement, l'organisme NTSIOM nous donne les résultats provisoires suivants: GERB 32,04%, BSP 26,22%, DPS (turcs) 9,93%, ATAKA 8,5%, NFSB 4,11%. Cela signifie que, contrairement aux prévisions, les nationalistes du NFSB rentreraient également au parlement de Sofia.

L’Etat européen, une nécessité historique

dussouy_modifie-1.jpgIl faut remercier les éditions Tatamis pour la publication de l’ouvrage très stimulant de Gérard Dussouy, professeur émérite et géopoliticien, intitulé « Fonder un Etat européen », préfacé par l’européiste identitaire Dominique Venner.

Afin de ne pas heurter de manière trop directe une partie de son lectorat, Dussouy a choisi de sous-titrer son ouvrage de la mention « contre l’Europe de Bruxelles », une manière de se dissocier d’une construction européenne éminemment critiquable par bien des aspects mais dont on peut aussi espérer qu’elle aboutisse, adroitement subvertie par de sains principes, à cette République européenne fédérale que Gérard Dussouy appelle de ses vœux.

La représentation d’Europa par Eric Heidenkopf, dont le nom est déjà tout un symbole (« tête de païen »), qui sert d’illustration à l’ouvrage est en elle-même un programme. Elle a les traits d’une déité scandinave mais muni d’un casque d’hoplite, une lance et un bouclier sur lequel est figurée la chouette d’Athéna, telle qu’elle apparaissait sur la drachme athénienne et sur la pièce grecque d’un €uro. Lui prêter les traits de Minerve n’est pas innocent. C’est ainsi par exemple que Britannia fut représentée. Europa est donc de fait l’incarnation de la nation européenne, en même temps qu’elle représente la sagesse dont il faudrait que les Européens fassent preuve afin qu’ils s’unissent.

Dussouy a pleinement compris que le destin de l’Europe était dans son unité, dans la construction d’un véritable Etat européen. Il sait que notre avenir passe aussi par une politique ambitieuse vis-à-vis des Européens de l’Est, et notamment vis-à-vis de la Russie. Selon lui, « il est clair que l’avenir de l’Europe est à l’Est, surtout si l’on pense à une intégration à moyen terme de la Russie » (p 108). Audacieux, il ajoute même qu’ « il serait justifié d’envisager un déplacement de l’Europe vers le centre du continent ». Europolis n’a en effet de sens qu’au cœur du continent, entre l’Allemagne de l’Est, la Bohême-Moravie, l’Autriche et la Hongrie.

Pour lui, « l’Etat européen [est] la seule chance de survie politique (…) des peuples européens » (p 129). Cette analyse évidente à nos yeux, mais encore bien trop contestée aux yeux du plus grand nombre, surtout dans cette période de crise où les sirènes eurosceptiques sont à la mode, résulte d’un constat implacable. Dussouy ne tait aucun des maux qui rongent notre continent, la démographie véritablement en berne de nos pays, la submersion migratoire et islamique qui menace notre européanité, et l’incapacité de l’Union Européenne actuelle à proposer des solutions. Il n’est pas non plus dupe des « bons chiffres » de la natalité française, qui cache mal la part des domiens et des migrants aboutissant à ce résultat artificiel.

Prônant un « supranationalisme européen » (p 142), il ne voit pourtant pas l’Europe comme une nation ni même comme une nation en gestation, à l’image de l’Italie d’avant Cavour. Nous divergeons de lui sur ce point. A partir du moment où une nation regroupe ceux « nés d’une même lignée », l’Europe est bel et bien une nation, une nation sans Etat, ce à quoi Dussouy propose à juste titre de remédier. En revanche, sa condamnation d’ « Etats-Unis d’Europe », qui maintiendraient les anciens Etats dans leur géographie actuelle, est absolument justifiée. Sa « fédération de régions », ce que nous appelons euro-régions, est l’idéal, à partir du moment où on évite la balkanisation prônée par certains régionalistes.

La question de la langue commune est courageusement abordée. Dussouy prône le choix du latin (p 155), en référence à l’antique romanité. Je ne pense pas qu’on puisse le faire accepter aux Européens de langue germanique ou de langue slave, qui constituent la majorité des habitants de notre continent, et pas même aux Grecs modernes. Sans nier l’apport remarquable de la langue latine à notre civilisation, elle apparaîtrait comme un privilège accordé aux locuteurs de langue romane. Seul l’europaiōm, qui n’est autre qu’une version modernisée de la langue-mère des Européens, celle que les linguistes ont baptisée « proto-indo-européen », traiterait à égalité tous les grands groupes linguistiques de notre continent.

Dussouy, après avoir exposé les raisons de son refus d’une adhésion turque, ose enfin braver la bien- pensance en soutenant l’idée d’une intégration de la Russie à l’Europe unie, où elle a toute sa place. Il désavoue par ailleurs la théorie « eurasiste », présentée à juste titre comme un « leurre », et que prône un Douguine, soutenu par ses relais français islamotropes. Et l’auteur oppose un « patriotisme géographique » à la théorie fumeuse d’Habermas sur le « patriotisme constitutionnel » (p 166).

Sa conclusion est sans appel. C’est un appel au réveil européen, à sortir de la dormition que dénonce Venner. « La voie de salut (…) est dans la revendication et la réalisation de l’Etat européen fédéral et volontariste qui permettra aux Européens d’exister et de rester eux-mêmes. » (p 179)

L’avenir est donc bien cette alternative absolue entre l’Europe et la mort. Ευρώπη η θανάτος ! Dussouy nous invite à regarder en face cette réalité. C’est l’immense mérite de cet ouvrage brillamment argumenté et sans concession. Si nous divergeons d’avec l’auteur sur des points spécifiques et d’importance très relative (« nation » européenne, latin comme « langue commune »), le cœur de sa démarche est nôtre. Et à la différence de prétendus défenseurs d’une Europe unie qui tremblent à l’idée même que la Russie nous rejoigne, il sait que la clé de notre salut se trouve aussi à Moscou.

Enfin, s’il fustige l’Union Européenne, c’est pour ce qu’elle n’est pas, la matrice de la véritable Europe unie. Mais elle le deviendra, et grâce à des gens comme Gérard Dussouy. Malgré le ton pessimiste de l’ouvrage, à dessein, sa lecture offre en définitive un formidable message d’espoir et de courage politique. Lisez et faites lire Dussouy !

Thomas FERRIER (PSUNE)

Contre l’Europe de Bruxelles – Fonder un Etat européen, par Gérard Dussouy, Editions Tatamis, 180 pages, 14 € (port compris).

Esclavage et repentance ou la rançon exigée d'Hollande

esclavage,repentance,10 mai 2013,françois hollande,françafrique,hypermnésie,abraham lincoln,psune,thomas ferrierCe 10 mai 2013, le lendemain de la fête de l’Europe, le président de la République française tenait un discours de repentance dans lequel il fustigeait la France pour avoir participé à la traite négrière. Par une simplification historique abusive, François Hollande alimente ainsi une hypermnésie orientée, qui accable une fois encore l’Europe et l’Europe seule. Louis-Georges Tin, président du CRAN, ne s’y est pas trompé puisque le même jour il décidait de porter plainte contre la Caisse des Dépôts et Consignations, qu’il accuse de disposer de fonds issus d’un dédommagement que la France avait reçu de Haïti pour prix de son indépendance. Il chiffre à 21 milliards d’€, selon un calcul d’actualisation imaginaire, le préjudice subi et demande à ce que notre pays rembourse cette « dette ». Les chômeurs français apprécieront.

Le député européen écologiste Jean-Jacob Bicep réclame quant à lui la mise en place d’une journée européenne consacrée aux victimes de la colonisation et de l’esclavage affirmant sans rire que « toute l’Europe en a profité ». On voit mal en quoi l’Irlande, colonie des Britanniques, aurait profité de la colonisation alors qu’elle était elle-même colonisée, ni en quoi les Etats d’Europe centrale et orientale, qui pour la plupart n’ont obtenu leur indépendance qu’en 1918, ou encore l’Islande qui ne l’a été qu’en 1945, auraient été bénéficiaires d’une politique qui, par ailleurs, n’a jamais bien au contraire enrichi les pays qui se lancèrent dans l’aventure coloniale, leur attachant en réalité un boulet économique.

Pour des raisons morales, l’esclavage était inacceptable, même s’il n’a enrichi qu’une poignée de marchands, une infime partie du peuple français, nation de paysans jusqu’au milieu du XIXème siècle. Rappelons que le servage n’a été aboli en France qu’en 1789 et ne l'a été en Russie qu’en 1861. Or un serf européen n’est rien d’autre qu’un esclave, un servus. Enfin, les ouvriers français et européens, ceux qui ont été avec les capitaines d’industrie les principaux responsables de la richesse de l’Europe moderne, ont connu un sort au XIXème siècle qui n’était en rien enviable. Je pense notamment aux mineurs français qui se sont tués à la tâche pour améliorer le sort de leurs enfants.

De même, la colonisation fut une erreur monumentale, tant morale qu’économique, sur laquelle les peuples européens ne furent jamais démocratiquement consultés. Il ne faut jamais oublier le combat de George Clémenceau contre cette folie dans les années 1880, mais aussi ce mot lucide du journaliste Raymond Cartier à la fin des années 50 : « Le colonialisme a toujours été une charge en même temps qu’un profit, souvent une charge plus qu’un profit. » On ne peut pas dire que l’Europe s’est enrichie, pas même les pays colonisateurs, bien au contraire.

Revenons sur la question même de l’esclavage que François Hollande dénonce comme fondée sur « la couleur de la peau ». Cette assertion également doit être discutée.

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09/05/2013

Réponse à Pierre Cassen

france.jpgAvant de développer les arguments de la réponse, expliquons pourquoi il convient de savoir s’adresser à Pierre Cassen, comme à Eric Zemmour et à quelques autres amoureux sincères de la France. Tout simplement, parmi ceux qui dressent un diagnostic de décadence pour la partie du monde qui nous entoure et qui tentent de s’y opposer quand on leur en donne l’occasion, neuf sur dix pensent à peu près comme les observateurs cités. A l’inverse, la presque totalité de ceux qui se revendiquent de l’Europe nient cette décadence, tout en s’y complaisant. C’est aux premiers que le véritable Européen devra donc s’adresser et sa tâche ne sera pas facile. Il ne devra pas moquer la nostalgie qui les anime sans doute, car le modernisme n’est pas plus intelligent que le passéisme. Mais il devra montrer que, dans leur combat légitime, ils font fausse route.

Né pendant la dernière guerre, je suis à peu près de la génération de Pierre Cassen. J’ai connu, comme lui, l’époque où trouver du travail en France ne posait pas de problème, où les ouvriers étaient en position de défendre leurs intérêts face aux patrons. Dans ces années, ceux qui sortaient du peuple savaient qu‘ils auraient une vie plus facile que leurs parents ; l’école remplissait son rôle et l’ascenseur social fonctionnait.

Comme Pierre Cassen, je pense que non seulement nous devrions vivre aussi bien aujourd’hui, mais encore que nous devrions même vivre mieux, le progrès technologique aidant. Or c’est tout le contraire. Les jeunes ont bien du mal à entrer dans le monde du travail et ils ne peuvent même pas envisager la perspective d’une retraite décente. Les ouvriers sont à la merci des actionnaires ; dans le meilleur des cas, ils doivent se résigner à consentir d’énormes sacrifices pour garder leur travail. L’école est en ruines ; les inégalités sociales se creusent.

Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Il y a un élément soulevé par Pierre Cassen que je reprends volontiers. C’est l’immigration, voulue d’abord par les patrons pour casser les revendications sociales et sacralisée ensuite par les bourgeois bohèmes au nom de principes égalitaristes qu’ils ne s’appliquent pas à eux-mêmes. Je n’en reparlerai pas directement, puisque nous ne divergeons pas sur ce point.

L’autre élément avancé par Pierre Cassen, sur lequel je suis en revanche en total désaccord, est la responsabilité de la construction européenne. Je lui concède volontiers que la façon dont cette construction a été envisagée, aussi technocratique que mondialiste, n’est pas à donner en exemple. Pour autant, il se trompe radicalement lorsqu’il croit pouvoir retrouver une situation semblable à celle qu’il a connue dans sa jeunesse en revenant à la souveraineté nationale.

On pourrait lui objecter que cette souveraineté n’a été remise en cause qu’en apparence, l’Union européenne d’aujourd’hui n’étant qu’un club de dirigeants nationaux, lesquels se servent de l’Union pour faire accepter des mesures qu’ils ont décidées ensemble, mais qu’ils ne veulent pas assumer. Il restera que le fonctionnement de l’Union est un facteur de dissolution de la démocratie. N’insistons donc pas.

Ce que je veux montrer est plus radical. Dès lors que nous respecterons le cadre national français, même sans reprendre des stratégies dictées par la nostalgie et en s’adaptant au contraire à la modernité, nous n’aurons aucune chance de retrouver l’âge d’or escompté et serons condamnés à poursuivre la descente aux enfers que nous vivons. Il y a eu, en effet, des changements radicaux depuis un demi-siècle, contre lesquels aucune politique nationale ne pourra jamais lutter.

Le premier point concerne les biens. Nous avons assisté à un essor sans précédent des technologies. La nouveauté est que la production de certains objets de consommation demande des investissements désormais colossaux, donc un marché à une échelle largement supérieure à celle d’une nation comme la France. Les premiers téléviseurs ont pu être entièrement fabriqués chez nous ; aujourd’hui lancer, sans concertation à un niveau plus élevé, la fabrication d’écrans plats en France est impensable. C’est encore moins possible pour un ordinateur : nous ne pourrions décider de faire ni écran, ni processeur, ni disque dur. Ne parlons pas du repérage par satellites ; d’ailleurs il n’y en a toujours qu‘un pour la planète.

L’exemple de l’aéronautique, où Airbus a connu le succès, ne contredit en rien ce qui vient d’être dit. La société productrice n’est pas française. Elle échappe au champ d’exercice de la démocratie nationale. D’ailleurs les sociétés dites encore françaises ne produisent plus majoritairement en France.

Dans le même temps, les distances se sont raccourcies ; les marchandises voyagent dans des navires aux dimensions gigantesques.

Nous n’avons plus le choix qu’entre un marché plus vaste ou directement le marché mondial. Faute d’avoir su choisir pleinement la première alternative, nous sommes condamnés à la seconde.

Le second point concerne les hommes. Pour eux aussi, les distances se sont raccourcies. On voyage dans des avions toujours plus gros et plus nombreux. On communique par le réseau. Nous ne pouvons plus envisager notre modèle social indépendamment de celui des autres. Or les conditions du travail dans certains pays sont encore loin de ce que restent les nôtres.

Vouloir préserver notre modèle suppose donc que nous nous isolions, comme nous n’avions pas besoin de le faire dans le passé. Or nous nous le sommes interdit, en signant des chartes et des accords internationaux, dont nous ne voyions pas les conséquences. Il faudrait revenir là-dessus aussi. A défaut, il ne servira à rien de se plaindre d’une immigration non maîtrisée.

Hélas, dans l’intervalle, le poids que représente la France dans le monde s’est réduit considérablement. Economiquement, nous ne sommes rien face à la Chine. Militairement, nous ne pouvons mener de guerre que contre de petits groupes, comme au Mali. Tous seuls, nous ne pouvons pas nous soustraire aux règles dans lesquelles nous nous sommes laissés enfermer.

Nous n’avons plus le choix qu’entre un ordre politique plus vaste ou directement l’ordre mondial. Faute d’avoir su choisir pleinement la première alternative, nous sommes condamnés à la seconde.

Ainsi, en se plaçant dans le cadre national, Pierre Cassen ne peut-il rien nous proposer d’autre que ce que nous connaissons déjà. Il a raison de critiquer l’Union européenne, mais il a oublié de noter qu’elle n’est ni unie ni européenne. C’est en devenant l’une et l’autre qu’elle pourra nous sauver, car elle est seule capable de reproduire à l’échelle pertinente ce qu’a connu la France il y a quelques décennies ou plutôt la vision idéalisée que nous en avons conservée.

Peter Eisner (PSUNE/LBTF)