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30/10/2014

Elections ukrainiennes 2014 : la sortie des sortants.

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Ukraine,élections parlementaires,2014,Porochenko,Arseniuk,SvobodaEn deux ans, le phénomène Euro-Maïdan et la fuite du président sortant Yanoukovitch ont modifié en profondeur la situation politique de l’Ukraine. Le tandem président/premier ministre, Porochenko/Arseniuk, à peine constitué, des élections anticipées qui se sont déroulées ce dimanche ont bouleversé la répartition des sièges à la Rada.

A 99,7% du dépouillement, les résultats quasi définitifs sont désormais connus et s’ils confortent l’équipe en place, ils mettent surtout fin à l’époque politique précédente.

En 2012, le Parti des Régions, qui a boycotté cette élection, l’emportait avec 30% des voix, offrant à l’ancien président Yanoukovitch une majorité confortable. Le parti de Ioutchenko, « Notre Ukraine », président antérieur, n’avait obtenu que 1,1% des voix. Le mouvement Batkivchina d’Ioulia Timochenko était le premier parti d’opposition avec 25,6% des voix. A droite et à gauche s’opposaient le parti nationaliste Svoboda (10.5% des voix) et les communistes du KPU (13,2% des voix). En 2012, le Parti Radical d’Oleg Lyachko devait se contenter d’1,1% et d’un siège unique. Enfin UDAR, le mouvement démocrate de Vitali Klitchko obtenait 14% des voix, devenant le troisième parti du pays.

Cette opposition, une fois le président Yanoukovitch renversé, a été balayée par les électeurs ukrainiens. Sous la forme du Bloc d’Opposition, faux nez du Parti des Régions, ce mouvement n’a obtenu que 9,4%, ce qui est néanmoins un score pas si mauvais, en sachant que les régions rebelles de l’est du pays et la Crimée n’ont pas voté. Batkivchina, le parti de Timochenko, n’obtient en 2014 que 5,7% des voix, soit seulement 0,7% de plus que la barre requise de 5% pour avoir des élus au scrutin proportionnel. Klitchko a quant à lui complètement disparu.

Le Front Populaire (ou « National ») du premier ministre Arseniuk est devenu en revanche le premier parti du pays, avec 22,2% des voix environ. Il devance d’une courte tête le Bloc du président Petro Porochenko, qui obtient 21,8% des voix. Autant dire que ces deux partis ont vocation à s’entendre. A priori, Arseniuk ouvrirait également la coalition au Parti Radical d’Oleg Lyachko, qui a obtenu 7,5% des voix, contre à peine 1% deux ans auparavant. Ce mouvement nationaliste modéré, pro-européen, connaît une progression significative.

Les communistes du KPU sont balayés, avec seulement 3,9% des voix. Ils perdent ainsi toute représentation nationale. Les électeurs ukrainiens ont peu apprécié les nostalgies soviétiques qui ont pu s’exprimer notamment dans l’est du pays.

Nouveau venu, le mouvement chrétien-démocrate Samopomitch (« Aide par soi-même ») avec 11% des voix remplace avantageusement UDAR. Il pourrait rejoindre la coalition qui tente de se mettre en place à l’issue du résultat. La gauche « sociale-démocrate » en revanche a disparu.

C’est au niveau du camp nationaliste que les cartes ont été redistribuées. Le succès du Parti Radical a asphyxié électoralement Svoboda, « Liberté », qui passe de 10,5% des voix en 2012 à 4,7% des voix en 2014, perdant toute représentation proportionnelle. Svoboda parvient néanmoins à sauver six députés au scrutin majoritaire, fort de quelques fiefs que le parti a su conserver. De même le Secteur Droit (Pravyi Sektor) de Dmytro Yaroch n’obtient que 1,8% des voix mais réussit au scrutin majoritaire à faire élire son dirigeant avec plus de 29% dans un district de Dniepropetrovsk. Les autres nationalistes, nationaux-démocrates du NDPU (0,07%) ou nationalistes du KUN (0,05%), sont largement marginalisés. Le recul significatif de Svoboda montre en tout cas que ce mouvement s’est usé dans les affrontements contre l’ancien pouvoir.

Au final, les vainqueurs de Maïdan remportent largement l’élection, mais le Parti des Régions n’a pas vraiment disparu même s’il est très affaibli. On a vu qu’en deux ans les cartes avaient été redistribuées. Porochenko et Arseniuk sont néanmoins attendus au tournant par les électeurs ukrainiens qui ont tendance à brûler le jour ceux qu’ils ont encensés le jour précédent. L’opposition traditionnelle au pouvoir pro-russe est en revanche laminée, à l’image du mouvement de Timochenko. De nouveaux venus émergent et les remplacent.

En tout cas, l’alibi russe selon lequel l’Ukraine a été victime d’un coup d’état fasciste tombe, en constatant que les partis nationalistes « durs » se sont effondrés.

 

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

03/11/2012

Analyse en video des élections ukrainiennes


Elections ukrainiennes Les résultats - 31 oct 2012 par PSUNE-NEUSP

31/10/2012

Elections ukrainiennes 2012, une victoire en demi-teinte pour Yanoukovitch.

emblem.gifAprès deux jours, depuis la publication des premières estimations, les résultats définitifs des élections législatives ukrainiennes qui se sont déroulées dimanche dernier ne sont toujours pas officiellement connus. Néanmoins, les grandes tendances sont connues et petit à petit les scores s’affinent.

A 97% des suffrages, l’ordre des partis politiques ne devrait pas changer. Le « Parti des Régions » du président en exercice est premier avec un peu plus de 30% des voix environ, dépassant le parti « Patrie » de Ioulia Timochenko, actuellement en prison, qui obtient néanmoins environ 25,5% des voix. L’ancien sportif Vitaliy Klitchek, à la tête de l’Alliance Démocratique Ukrainienne pour la Réforme (UDAR), obtient un score très honorable avec près de 14% des voix, devançant les communistes ukrainiens, alliés du gouvernement PR, qui obtiennent moins de 13,3% des voix.

Enfin, la grande surprise du scrutin est le score élevé du parti nationaliste « Liberté » (Svoboda), allié du FN français et à la fois eurosceptique et atlantiste. Ce mouvement, issu à l’origine d’une formation radicale, le Parti Social-National d’Ukraine, et dont le symbole était la rune du loup, mais devenu depuis l’Union Pan-ukrainienne « Liberté », et dont le logo est désormais une main à trois doigts, façon stylisé de représenter l’emblème du pays, était annoncé au mieux à 6% des voix dans les sondages. Il obtient au final près de 10,5% des voix et réussit ainsi à faire rentrer 35 députés au parlement.

Enfin, le parti "Notre Ukraine" de l'ancien président Ioutchenko connaît une sévère déconvenue avec un score de 1,1% environ, tout comme le mouvement de Nataliy Korolevski "Ukraine, en avant", qui n'obtient que 1,6% des voix. Les autres partis en lisse demeurent à un niveau insignifiant, à l'instar de l'Assemblée Nationale Ukrainienne (c'est à dire l'UNA), mouvement nationaliste historique, qui obtient 0,08% et a été complètement phagocyté par Svoboda.

En nombre de sièges, le Parti des Régions et son allié communiste obtiendraient 223 sièges sur 450, mais devraient pouvoir gouverner avec le renfort d’élus indépendants et/ou sans étiquette. L’opposition démocratique obtient en revanche 177 sièges. Les indépendants et sans étiquette sont enfin 43. Ils auront un rôle décisif, de même que les deux élus du Parti du Peuple, pour offrir à Yanoukovitch la majorité à l’assemblée.

Même si l’opposition dénonce des manœuvres électorales et des fraudes dans la partie est du pays, le score du Parti des Régions n’est pas surprenant. Il matérialise l’opposition de fond entre l’ouest et l’est du pays. En Crimée et dans les régions les plus proches de la Russie, « régionaux » et communistes obtiennent jusqu’à 80% des voix. Dans l’ouest et le centre, c’est en revanche le parti de Timochenko qui s’impose, mais avec un score moins brillant. Enfin, à l’ouest, sauf exception, Svoboda est le premier ou le deuxième parti, avec une pointe à 38% dans la région de Lvov, et il est également premier parmi le vote des ukrainiens de l’étranger (23,7%). Plus faible au centre du pays, il obtient néanmoins plus de 17% des voix à Kiev, en raison de l’immigration extra-européenne naissante dans la capitale et qui irrite de nombreux électeurs.

Si la capitale Kiev et la ville la plus occidentale Lvov représentent l’opposition démocratique et/ou nationaliste au président, Kharkov, Donetsk, Odessa ou Dniepropetrovsk sont largement favorables à ce dernier. Il est toutefois indéniable que dans ces régions, le PR a un contrôle important de la population et on peut penser que ses scores là bas résultent d’une contrainte beaucoup plus forte. En outre, le PR obtient plus de 20% des voix à Kiev, et bénéficie donc d’une meilleure répartition territoriale que ses adversaires. Sa victoire est donc logique.

Toutefois, en pourcentage, l’opposition devance le Parti des Régions, qui bénéficie de l’élection par un autre mode de scrutin de la moitié des députés. Sans cela, il aurait été clairement battu. On ne peut donc pas considérer ce vote comme une victoire personnelle. Il faut aussi convenir du fait que Timochenko n’est pas si populaire, même si son sort en détention inquiète à juste titre les chancelleries occidentales.

Enfin, la crise géopolitique de l’Ukraine continue, tiraillé entre un Ukraine indépendant et eurotrope, mais aussi malheureusement russophobe, à l’ouest, et un Ukraine russotrope à l’est et au sud, rassurant son partenaire oriental quant à la pérennité de la base russe de Sébastopol.

En vérité, l’Ukraine est prise entre deux feux, alors qu’il lui faudrait concilier à la fois l’amitié avec la Russie mais aussi avec le reste de l’Europe, et défendre la réconciliation entre les deux en représentant un pont diplomatique. L’Ukraine cessera cette division politique et géographique mortifère si l’UE sait s’émanciper de la tutelle américaine et s’allier d’une manière franche et fraternelle avec la Russie pour forger l’Europe puissante de demain.

Thomas FERRIER (LBTF/PSUNE)