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08/05/2015

Victoire écrasante de David Cameron aux élections britanniques

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tories.jpgTous les media annonçaient une réélection difficile pour David Cameron, au coude à coude avec son adversaire travailliste Ed Miliband. On imaginait alors un Royaume-Uni ingouvernable, avec une droite prise en otage par UKIP, et donc une coalition multicolore à la tête du pays.

Les résultats, bien loin des sondages, sont sans appel. Avec 36.9% des voix (+0.8) et 331 sièges (+24), les Conservateurs sont les grands vainqueurs du scrutin et réussissent à dépasser la majorité absolue (326) de cinq sièges. Ils n’auront pas besoin d’alliés pour gouverner le pays pendant cinq ans. Même s’ils ne progressent pas en voix d’une manière significative, leur victoire est homogène sur une grande partie du pays. Avec 30.4% des voix (+1.4), le Labour est battu, alors même qu’il progresse en voix et en pourcentage. Il n’obtient toutefois que 232 sièges (-26). Il a certes récupéré les voix de Libéraux-Démocrates déçus mais de manière insuffisante pour faire la différence.

Les Libdem de Nick Clegg sont en revanche les grands perdants de ce scrutin, tombant à 7.9% des voix et à 8 sièges (-49). C’est une véritable déculottée qu’a subi ce parti libéral pro-européen. Il paie là le prix d’une alliance contre nature de cinq ans avec la droite conservatrice aux relents eurosceptiques. Incapable de marquer sa différence, associé à une politique d’austérité qu’il a dû avaler, le parti est sévèrement puni dans les urnes.

Avec 12.6% des voix (+9.5%), le mouvement UKIP de Nigel Farage progresse nettement entre 2010 et 2015 mais est très loin des 27% des voix obtenus aux élections européennes. Dans un tel contexte, c’est une sérieuse déconvenue, aggravée par l’échec personnel de Farage, UKIP devant se contenter d’un seul élu à l’arrachée. Ce dernier, qui s’était engagé à démissionner de la présidence du parti en cas de défaite, s’est exécuté, même s’il n’exclut pas un retour dans quelques mois à la tête d’une formation marquée par son charisme. Dans ses 12.6% des voix, on trouve des électeurs conservateurs soutenant une ligne très eurosceptique mais aussi toute la droite nationale. Le BNP (1.9% en 2010) est laminé et doit se contenter d’un millier d’électeurs. Les English Democrats en ont un peu plus de 6000. Tout cela est dérisoire.

Si les Conservateurs progressent malgré cette fuite d’électeurs droitiers vers UKIP, c’est qu’ils récupèrent une part essentielle de l’électorat Libdem. Ceux-ci ont finalement préféré reconduire le gouvernement précédent, au prix de la survie de leur mouvement, plutôt que de mettre le Labour au pouvoir. Les attaques de Cameron contre une gauche accusée de s’inspirer du « contre-modèle » français ont pu faire mouche. En outre, environ 3% des électeurs britanniques se sont décidés au dernier moment, par un réflexe de vote utile et pour donner une majorité au pays, à soutenir le premier ministre sortant.

Autre vainqueur et non des moindres de ce scrutin, le mouvement indépendantiste écossais SNP. Il obtient 56 des 59 sièges pour l’Ecosse et atteint exactement 50% des voix, ce qui est en fait et de loin le premier parti de la province. Les Libdem et le Labour ont été sérieusement punis. Au final, les conservateurs disposent de deux sièges et le Labour d’un seul. Néanmoins, ce succès du SNP ne lui permettra pas de peser sur le Labour, dont il aurait été un partenaire indispensable. Là encore, des électeurs ont pu craindre son influence et ont alors choisi les Tories de Cameron.

Les nationalistes gallois (Plaid Cymru) obtiennent 3 sièges et 12.1% dans leur province. Ils progressent très légèrement en voix dans un contexte de vote utile. En revanche, les nationalistes de Cornouailles, à savoir le Mabyon Kernow, restent à un niveau très faible, entre 1.1 et 4.1% des voix selon les cantons. En Irlande du Nord, les électeurs étaient également très partagés. Les unionistes obtinrent 8 sièges quand le Sinn Fein n’en a obtenu que 3. Les premiers ont obtenu 25.7% des voix et les seconds 24.5%. Une nouvelle formation émerge, l’UUP, formation alliée avec les Tories avec 16% des voix. Le SDLP (la gauche nord-irlandaise) obtient 3 sièges.

Enfin, les Verts (Greens) progressent nettement, passant de 1% à 3.8% en cinq ans, et réussissant à faire rentrer un élu à la Chambre des Communes. Ils ont pu à la marge freiner le résultat du Labour.

david cameron,ukip,labour,tories,victoire,snpDavid Cameron, qui s’était engagé à tenir un référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union Européenne, et qui le fera probablement en 2017, sort très renforcé. Il le doit au relatif échec d’UKIP mais aussi à l’effondrement de son allié libéral-démocrate. Même si sa progression est très faible, elle est suffisante et elle a permis de faire basculer le scrutin dans de nombreuses circonscriptions en sa faveur, y compris dans le fief de Farage. La gauche, qui reste généralement forte en terre non-anglaise, conserve son bastion gallois et la région autour de Londres, en raison notamment du vote des ex-immigrés, mais perd l’Ecosse. Cette dernière aura d’ailleurs un poids sans doute déterminant dans le résultat du futur référendum. En effet, elle est beaucoup plus pro-européenne que le reste du pays et pourrait le menacer d’une sécession si le Royaume-Uni choisissait une voie trop anglocentrée.

En tout cas, voici Cameron aux affaires jusqu’en 2019-2020. Il continuera de mener sa politique d’austérité et à naviguer sur un fil avec l’Union Européenne, qui a déjà annoncé, par le biais de Juncker, qu’elle n’accepterait pas de limitations à la liberté de circuler, une des raisons pourtant du vote eurosceptique au Royaume-Uni en l’absence d’un positionnement « identitaire » européen et d’un refus clair des flux passés et présents venus du Commonwealth. L’europhobie croissante de l’opinion britannique, attisée par une presse aux ordres de la City, n’est pas une fatalité. Mais ce n’est pas avec l’Union Européenne actuelle, enlisée dans sa médiocrité et aboyant les ordres des USA, et appelant au laxisme migratoire, comme le Vatican d’ailleurs, qui fera évoluer les mentalités en sa faveur.

 

Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)

17/02/2013

Hollande nous éloigne de l’Europe !

eurogrece.jpgIci le pronom « nous » ne s’adresse pas aux seuls Français, mais à tous les Européens bien sûr. L’europhobie ne date pas d’hier. Il y a quelques années, Elie Barnavi notait que tous les dirigeants politiques européens, sans exception, détestaient l’Europe, ce qui ne manquait pas de le surprendre, lui qui, tout en ayant opté pour le destin d’Israël, continue à s’intéresser de près à l’avenir de notre continent. En France, cela fait pas mal d’années aussi que toute la classe politique est europhobe, y compris un « centre » qui n'avait pourtant juré que par l’Europe à une époque. Cela fait longtemps encore que technocratie européenne fait beaucoup de mal à l’idée européenne ; mais ce n’est que très normal puisque le « gouvernement » de l’union n’est qu’un club de dirigeants nationaux.

Dans ce décor sinistre, un élément nouveau est apparu il y a quelques mois. Ce n’est pas la sortie de David Cameron ; sa position est connue depuis longtemps, comme celle du Royaume uni. Cet élément est le changement politique en France, avec l’arrivée au pouvoir de François Hollande et du parti socialiste.

Un élu est toujours un peu prisonnier de ses électeurs. C’est d’ailleurs a priori une bonne chose, du moins s’il s’agit bien de l’ensemble de ses électeurs. Dans le cas qui nous occupe, l’électorat de François Hollande à la présidentielle était suffisamment varié pour représenter, même imparfaitement, le pays. Ce qui pose problème est que le président n’est prisonnier que de la petite frange constituée par les groupes l’ayant très massivement soutenu. Dans cette analyse, j’écarte les états-majors, les responsables verts à qui l’on a généreusement offert des sièges ou la présidente du FN à qui les médias font des sourires en remerciement de son choix public. Je parle des électeurs. On ne peut pas dire que la politique actuelle rende justice aux fonctionnaires, aux écologistes sincères ou aux rares ouvriers attirés par Jean-Luc Mélenchon. Cette politique est tout entière orientée vers deux catégories d’électeurs : les bourgeois bohêmes libertaires et les immigrés ou issus de l’immigration en provenance des anciennes colonies. Leur vote a été aussi massif que déterminant.

Les premiers, les bourgeois bohêmes, ont été récompensés par le mariage homosexuel et tout ce qui ira avec, jusqu’à la procréation pour autrui.

Les seconds l’ont été, du moins dans la vision du pouvoir socialiste, par un laxisme judiciaire, partant de l’idée, insultante dans son principe, qu’un enfant d’immigré a plus à craindre la justice qu’un autre. On a relancé le vote des étrangers, autres que les ressortissants de l’Union, aux élections municipales. Surtout on ne veut pas toucher à un assistanat économiquement désastreux, dans le même genre de vision qu’en matière de justice. On comprend déjà que la politique française sera tournée vers ses anciennes colonies plutôt que vers l’Europe. Ce faisant, les socialistes rejoignent les priorités des souverainistes les plus radicaux : reconstruire l’Empire plutôt que construire l’Europe.

Ce tropisme s’aggrave d’un fait qui concerne la personne du président. Apparemment François Hollande a dû longtemps rêver d’exercer la fonction. Quand il a vu sa précédente compagne toucher presque le but, il a dû vraiment y croire. D’ailleurs il s’est lancé assez tôt, à un moment où ses chances paraissaient faibles. Aujourd’hui en poste, il prend des postures sans équivoque. On avait raillé l’ambition infantile de Sarkozy, après l’affairisme de Chirac et le cynisme de Mitterand. Au moins François Hollande aime-t-il la flatterie. N’a-t-il pas dit que sa visite éclair au Mali était le plus beau jour de sa vie de président ? Dans ces conditions, comment pourrait-il accepter de transférer un bout de son petit pouvoir au profit d’une concertation européenne ? D’autant plus que cette concertation impliquerait des économies sur le train de vie de l’état, donc sur toutes les aides qui font d’une partie des résidents ses obligés.

De l’autre côté du Rhin, l’Allemagne s’inquiète, à juste titre et par un égoïsme bien placé, de la situation désastreuse de la France, de son déficit, de la tendance à la récession qui l’accompagne, du déséquilibre de son commerce extérieur : il s’agit de l’un de ses clients. Depuis que le Général De Gaulle a été accueilli par le chancelier Konrad Adenauer avec des pancartes « Ein Bundestag für Europa », l’Allemagne a tendu la main à la France pour plus d’intégration européenne. En 2012 Angela Merkel et surtout Wolfgang Schaüble ont proposé une sorte de gouvernement économique européen. Entendons-nous bien ! il ne s’agissait pas d’une avancée structurelle, juste d’une convergence politique entre états, dans un cadre, la zone €uro, qui échappe au contrôle du Parlement européen. Mais, une fois de plus, la France de Hollande n’a pas saisi cette main.

Il y a quelque temps encore, on entendait parler d’une gouvernance la zone €uro, d’une union à plusieurs vitesses. On donnait clairement la priorité à l’approfondissement de la construction européenne sur élargissement. Aujourd’hui l’Allemagne semble avoir compris qu’elle ne pouvait plus rien espérer de la France. Aussi tout se passe comme si elle avait décidé de se défendre seule, en renonçant à l’idée européenne. Elle cède à David Cameron, accueille positivement un projet d’une zone de libre échange avec les Etats-Unis.

Que va-t-il se passer dans les mois et les années qui viennent ? En France, le tissu industriel, faute de compétitivité, va achever de se déliter, la dette va croître, la récession va s’installer et surtout le chômage va prendre une ampleur insoupçonnée. Cela n’arrangera pas les affaires de l’Espagne et de l’Italie et le mal va finir par atteindre l’Allemagne. Au moins les Allemands auront-il la possibilité de revenir au Deutsche Mark et tiendront-ils un peu plus longtemps que les autres. A moins que, tout simplement, ils ne fassent alliance avec la Russie pour former une Mittel-Ost-Europa.

Pour éviter ce scénario catastrophe, la France aurait dû faire deux choses. D’une part répondre positivement à l’Allemagne quand cette dernière était encore dans de bonnes dispositions. D’autre part et en même temps, elle aurait dû remettre de l’ordre chez elle. Il aurait fallu augmenter la TVA principale à quelques 25%, tout en diminuant de façon significative les impôts sur les entreprises, en revoyant encore le code du travail pour plus de flexibilité, en recentrant le service public, en simplifiant drastiquement les instances locales et réduisant leurs exécutifs, en revoyant les aides dans leur ensemble pour éviter les cumuls et en supprimant les pompes aspirantes de l’immigration illégale assistée. Pour cela il suffit de prendre exemple sur les pays voisins. Or jamais le pouvoir socialiste ne pourra proposer de telles réformes.

Les états actuels ne peuvent plus résister isolément à la pression des pays émergents ou déjà émergés. Nous avons tous l’incendie dans notre dos. Nous avions commencé la traversée du fleuve qui doit nous mener à l’intégration totale de l’Europe. Alors que nous n’étions pas parvenus bien loin, depuis quelques mois, nous reculons vers la rive d’où nous sommes partis. Peut-être allons-nous au moins sentir plus fort le brasier et prendrons-nous, enfin, les mesures qui s’imposent.

Peter EISNER (LBTF/PSUNE)