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14/04/2013

Mariage pour tous et démocratie pour personne

aphrodite-ares-cupid.jpgLa Grèce et Rome étaient des civilisations particulièrement tolérantes vis-à-vis des pratiques sexuelles de leurs citoyens. Sappho était grecque, tout comme les habitants de l’île de Lesbos. Harmodios et Aristogiton, connus pour avoir combattu pour la liberté d’Athènes face aux Pisistratides, étaient honorés par toute la cité bien qu’ils aient été amants. Mais à Athènes comme à Rome, le mariage concernait un homme et une femme, unis pour fonder une famille et avoir des enfants. Harmodios et Aristogiton étaient eux-mêmes mariés de leur côté, avec des enfants, et Sappho est morte, selon la tradition, par amour pour un homme.

Au cœur de la Rome décadente du Ier siècle après J.C, le poète Juvénal raillait les mœurs homosexuelles mais jamais il n’aurait imaginé un « mariage gay », que personne n’aurait envisagé non plus d’ailleurs, sauf éventuellement quelque empereur ayant abusé de vin. On prête toutefois à Néron l’intention d’avoir voulu épouser un autre homme, Néron incarnant aux yeux des Romains le mauvais empereur par excellence. C’est dire si cette idée aurait paru aberrante aux yeux des Romains, comme des Grecs, même ceux préférant la compagnie de ceux de même sexe.

Dans l’Europe décadente du XXIème siècle, en revanche, tout est imaginable. On est passé de l’interdiction de l’homosexualité à sa légalisation, en France en 1981, et désormais à sa valorisation médiatique. Les communistes français, qui auparavant considéraient l’homosexualité comme un « vice bourgeois », sévèrement condamné en Union Soviétique, sont devenus ses défenseurs acharnés.

Huit pays européens ont déjà autorisé le mariage gay, pudiquement rebaptisé « mariage pour tous » par le gouvernement Hollande/Ayrault, à savoir les pays scandinaves (Danemark, Norvège, Suède et Islande), sous influence d’un protestantisme libéral qui n’a pas grand rapport avec l’esprit des Vikings, les pays du Benelux (Pays-Bas et Belgique en tout cas) et enfin les deux pays ibériques (Espagne et Portugal). Au Royaume-Uni comme en France, le mariage gay est en cours de validation par les institutions nationales. Si le parlement polonais a refusé de le reconnaître, l’idée avance là où la fausse « gauche » pseudo-socialiste s’impose. Dans le programme du démocrate italien Bersani, chez les Verts allemands, la question est posée. En Slovénie, un projet de loi en ce domaine semble bien avancé.

La situation française est donc conforme à celle de nos voisins. La victoire du président « socialiste » Hollande annonçait inévitablement le mariage gay. Ceux qui déplorent cette idée auraient dû réfléchir à deux fois avant de voter par dépit pour ce candidat, à la seule fin de chasser le précédent, qu’ils commencent à regretter. Nous avons évité le vote des étrangers extra-communautaires, pour l’instant, et les tendres sentiments d’Hollande vis-à-vis de la Turquie ne semble pas freiner le choix de plus en plus évident d’un tropisme asiatique chez les dirigeants turcs. On ne pouvait pas échapper à toutes les folies contenues dans un programme présidentiel que très peu de gens ont de toute façon lu.

Ainsi, le président Hollande entend respecter une promesse de campagne, promesse faite à un lobby extrêmement minoritaire, minorité au sein d’une minorité, souhaitant imiter les institutions matrimoniales traditionnelles. Il n’y était pourtant contraint par aucun mandat impératif, et ne s’est pas gêné pour abandonner de nombreuses autres promesses, nettement plus importantes aux yeux de l’opinion majoritaire. Ainsi, son programme l’autorise-t-il, sous prétexte d’avoir été élu sur un contre-sens et des promesses mensongères, à faire comme bon lui semble et à ne surtout pas poser la question au peuple. Avec un parlement à ses ordres, selon un mode de scrutin qui n’a rien de véritablement démocratique, et avec un sénat qui ne représente pas le peuple mais ses élus, rien ne pouvait l’en empêcher.

Pour quelques milliers de personnes rêvant de se marier pour divorcer un ou deux ans après, il faudrait changer la loi commune, une loi millénaire, une loi estimée par toutes les civilisations européennes du passé, une loi reconnue comme bonne par toutes les religions, car aucune ne reconnaît l’idée même d’un « mariage homosexuel », pas plus le zoroastrisme, l’hindouisme et les « antiques » paganismes d’Europe que les trois monothéismes abrahamiques. Et ce changement « de civilisation », pour reprendre les propos de Christine Taubira, il suffit d’un président et de deux assemblées pour le décider, en se gardant bien de consulter par référendum le peuple, référendum qu’ils savent pertinemment qu’ils perdraient.

De la même façon que la nationalité française a été dévoyée, le mariage à la française est désormais dévoyé, comme chez de plus en plus de nos voisins européens. Il ne peut donc être sauvé. Il ne sert à rien de vouloir manifester dans la rue contre une loi qu’on n’est pas en mesure d’empêcher. Mais ce qui a été décidé par la contrainte, ce qui a été décidé dans l’opacité d’assemblées devenues de plus en plus impopulaires, n’a que la valeur et la légitimité qu’on voudra bien leur accorder.

La droite et l’extrême-droite prétendent que si en 2017 l’une ou l’autre sont aux affaires, elles annuleront ce mariage « pour tous ». La droite espagnole l’avait aussi promis et y a renoncé. En effet, à partir du moment où cette annulation n’est pas rétroactive, le fait étant accompli, l’intérêt d’abroger cette loi perd beaucoup de son sens. Et c’est bien pour cette raison que la droite française, et y compris le FN, ne s’aventurera pas en 2017 à la supprimer.

Comme la nationalité française, le mariage « à la française » est mort. Il n’y a pas lieu de le sauver puisqu’on ne pourra pas revenir en arrière de son dévoiement. En revanche, dans le cadre de la République Européenne, un mariage européen sera mis en place. Il répondra à une définition objective du mariage, conforme à la tradition européenne la plus ancienne, unissant un citoyen à une citoyenne, comme dans la démocratie athénienne. Les égarements nationaux d’une époque de décadence morale relèveront d’un passé dont on aura fait table rase, au sein d’une Europe unie et puissante. L’âge de Périclès et celui d’Auguste furent ceux d’une renaissance de la morale civique, la fin des innovations aberrantes et des dérives personnelles. L’âge de l’Europe unie ne sera pas différent.

Il y a de multiples raisons de considérer le « mariage pour tous » comme une mesure démagogique d’un gouvernement illégitime et aux abois voulant flatter une extrême minorité de partisans des centres urbains, cédant ainsi à un coupable communautarisme alimenté par l’individualisme obsessionnel d’une « gauche » qui a trahi tous ses idéaux et vendu l’intérêt général en se mettant au service de lobbies ethniques, confessionnels ou sexuels.

C’est l’intérêt général et le bien commun qui devraient dicter la conduite de nos dirigeants, de nos élus, comme de ceux qui manifestent contre cette loi d’ailleurs. S’opposer au « mariage pour tous », cela ne devrait pas être la conséquence d’une foi religieuse aveugle, chrétienne ou musulmane, ni d’une idéologie réactionnaire. C’est l’expression du bon sens, la fidélité à une tradition ancestrale plurimillénaire, la soumission aux lois de la nature et de la biologie, qui justifie en elle-même de dire non à cette loi.

Mais la France n’est pas le premier pays d’Europe à mettre en œuvre cette absurdité. Elle a été précédée par d’autres pays européens, sans que les conséquences soient spécialement dramatiques, et elle sera suivie par d’autres. Et puis, à un moment donné, les Européens se réveilleront et sortiront de cette décadente dormition. Ils verront qu’ils ont évité un précipice vers lequel leur classe politique corrompue les avait dangereusement amenés, et toutes les sottises et les folies d’une époque de déclin seront oubliées. Hollande ne laissera aucune trace estimable dans l’histoire future de l’Europe, et tout comme ses prédécesseurs et ses quelques successeurs, on l’associera à une époque où l’Europe s’était perdue, avant qu’elle ne finisse par se resaisir.

Avec la table rase juridique, tout redeviendra possible et le mariage aura à nouveau du sens, comme le mot « nationalité », mais au sein d’un autre pays qui s’appellera tout simplement l’Europe. A ceux qui s’époumonent inutilement dans la rue, noircissant leur mouvement par des excès de langage et par des actions perçues comme violentes, il existe une autre réponse, et cette réponse c’est l’Europe. Que nous importent les lois votées par des régimes au bord de l’abîme. Elles disparaîtront avec eux.

Thomas FERRIER (PSUNE)