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08/05/2010

La zone Euro et la Grèce

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tiok551t.gifLes événements récents liés à la crise grecque ont soulevé des interrogations sur la pérennité de l’Euro. Ce n’est pas un hasard si dimanche 2 mai, deux interventions brillantes, l’une de Marine Le Pen sur ITV et l’autre de Jean-Luc Mélenchon sur BFM, se sont succédé sur la télévision numérique pour aborder le sujet. Le lendemain l’émission d’Yves Calvi sur Arte revenait utilement sur le sujet. Elle y revenait encore vendredi 7, succédant à une interview de Nicolas Dupont-Aignan. Essayons d’y voir un peu clair, sans a priori, en dépassant le cadre du problème grec et en commençant même par considérer le cas de la France.

En préambule nous devons insister sur deux points.

D’abord il n’y a pas en Europe de gouvernance économique, même partielle. Au moment de l’adoption de l’Euro et de la définition de la zone monétaire concernée, on a bien imposé des critères de convergence. Déjà, cependant, l’admission de la Grèce a été prononcée en pleine connaissance du fait que les indicateurs qu’elle présentait étaient faussés. Surtout, depuis lors, les divers pays concernés ont pu faire librement usage de la monnaie commune, mauvais usage plutôt que bon pour certains.

Ensuite, à la question de savoir si l’Euro est bénéfique ou non pour tel pays, il ne peut pas être répondu dans l’absolu. Il convient en effet de savoir quelle politique ce pays entend mener pour se prononcer.


Regardons donc un pays comme la France en le comparant à l’Allemagne. Depuis quelques années la situation française se distingue de celle de sa voisine, sur un certain nombre de points, dont les suivants :
- un décalage de plus en plus important entre l’intention politique et la gouvernance réelle, entre les règlements et leur application,
- une immigration qui ne va pas dans le sens de l’amélioration de la compétitivité technologique, même si c’est le patronat qui l’a initiée et qui l’alimente,
- des prestations sociales aveuglément ouvertes, sujettes à des abus que l’on prend grand soin d’ignorer quand on ne les institutionnalise pas,
- une économie parallèle, touchant de nombreux quartiers, qui échappe à l’assiette de l’impôt, indépendamment des dégâts qu’elle provoque,
- un système éducatif aussi coûteux qu’inefficace, ignorant les besoins des entreprises, même au niveau le plus élémentaire,
- des syndicats peu représentatifs, mais faisant systématiquement obstacle à la modernisation, défendant des acquis sociaux qui n’existent souvent plus que sur le papier,
- un patronat qui s’éloigne de plus en plus de l’entreprenariat industriel sur le sol national et qui préfère investir à l’étranger.
Cette situation est surtout due à l’action des gouvernements dits de « gauche », mais les gouvernements de « droite » se sont montrés incapables d’infléchir les orientations autrement qu’en paroles. Par manque de courage et de lucidité, les uns et les autres ont conduit à la situation que l’on connaît aujourd’hui.

En conséquence, la compétitivité de la France par rapport à l’Allemagne s’est lentement dégradée depuis la création de l’Euro et elle continue de le faire. Le phénomène aurait été plus visible encore si l’Allemagne n’avait pas eu à digérer sa réunification.

Cela étant posé, nous pouvons parler de l’Euro.

Avec l’Euro, la politique laxiste d’un pays comme la France a été facilitée d’une part et a pu échapper à la sanction immédiate de l’autre. Elle a été facilitée parce que l’appartenance à la zone Euro a permis d’emprunter à un coût très bas, et donc de laisser filer la dette sans douleur apparente. Elle a aussi échappé pour le moment à la sanction, parce que l’Euro, monnaie stable et forte jusqu’il y a peu, a limité le coût des importations. Si les téléviseurs coréens, si le pétrole et les automobiles ne sont pas plus chers, c’est grâce à l’Euro. Mais elle a perdu sa compétitivité dans les échanges de façon dramatique.

Sans l’Euro, la France aurait plusieurs fois dévalué, retrouvant chaque fois sa compétitivité dans les échanges; malheureusement, dans le même temps, sa population se serait singulièrement appauvrie.

Quitter l’Euro aujourd’hui obligerait la France à se recaler sur le schéma précédent, dévaluant brutalement, ayant à payer des intérêts plus élevés pour sa gigantesque dette, s’appauvrissant considérablement mais devenant un peu plus compétitive au final.

Rester dans l’Euro, sans changer de politique, fera apparaître de plus en plus clairement le retard de compétitivité. L’industrie se délocalisera de plus en plus vite, les déficits se creuseront, la dette explosera. La France se trouvera dans une situation de faillite. Il est même probable qu’elle finira par être écartée de la zone si elle ne s’en écarte pas elle-même.

Relisons maintenant les positions de nos politiciens sur le sujet. Pour ceux des partis de gouvernement, quitter la zone Euro est une option totalement exclue. Dans ces conditions ils exposent la France à la faillite dont nous venons de parler. C’est surtout vrai pour les partis de « gauche ». La « droite » essaie, malgré tout, de redresser la situation, retardant au moins l’échéance fatale, faute de mieux.

Si la France tient à poursuivre dans une politique laxiste, mieux vaudrait qu’elle quitte la zone Euro dès que possible. Plus elle attendra plus la chute sera brutale. C’est ce que, sans être aussi catégorique, propose notamment Jean-Luc Mélenchon. Certes il défend l’enseignement professionnel, mais sans parler de l’instruction de base sans laquelle rien n’a de sens. Certes il propose plutôt que le laxisme s’étende à toute la zone Euro, mais, comme c’est impossible, d’autant plus qu’il récuse toute supranationalité, cela revient au même. Malgré quelques pirouettes, il est parfaitement cohérent. Il assume en effet complètement l’appauvrissement du pays, proposant comme modèle l’Amérique latine en général et le Venezuela de Chavez en particulier. De fait si de tels pays avaient aujourd’hui l’Euro, ils seraient étranglés. Les Français veulent-ils cependant vivre selon ce modèle ?

A l’inverse, si la France veut redresser la barre, rompre avec tous les principes qui l’ont conduit à la politique laxiste d’aujourd’hui, elle peut très bien rester dans la zone Euro. C’est même son intérêt le plus évident. On ne comprend alors pas Marine Le Pen, qui d’une part dénonce très vivement le laxisme des gouvernements successifs et préconise d’autre part la sortie de la zone Euro ou, du moins, met tous nos déboires sur le compte de cette monnaie. Elle confond l’Euro et le mondialisme, alors que l’Euro, bien utilisé, protège du mondialisme.
Nicolas Dupont-Aignan soutient à peu près les mêmes thèses, commettant les mêmes confusions.

Elargissons maintenant notre réflexion en la plaçant dans un contexte européen.

La situation catastrophique de la Grèce ne présente pas exactement les mêmes caractères que celle de la France, mais l’idée générale est la même. Le laxisme et la tricherie atteignent des proportions bien plus grandes que chez nous. La crise y est plus spectaculaire et l’urgente plus aiguë. Pour autant la situation économique y est plutôt moins malsain. Des pays comme le Portugal, l’Espagne et l’Italie sont dans une situation intermédiaire entre celle de la France et celle de la Grèce. Parmi les grands pays de la zone Euro, seule l’Allemagne et les pays du Nord font un bon usage de la monnaie, compte tenu des principes qui ont présidé à sa mise en place, qui sont l’indépendance par rapport au pouvoir politique et le dogme d’une monnaie forte.

Pour les autres pays, de la France à la Grèce, s’il n’y a pas de changement de politique, l’appartenance à la zone Euro est compromise. C’est en fait l’Euro qui va imploser. Déjà les Allemands ont envisagé de revenir au Mark. En fait ils n’abandonneront pas l’Euro. A la limite ils le recréeront avec quelques autres pays autour d’eux.

Un scénario catastrophe verrait la Grèce incapable de payer ses dettes et quitter la zone Euro dans la douleur. Le Portugal et l’Espagne seraient alors attaqués. Si l’Espagne, dont les importations viennent pour 20% de France, plonge, c’est la France qui sombrera à son tour. Pour finir, au centre d’une Europe dévaluée qui constituait 60 à 70% de son marché, l’industrie allemande elle-même va se trouver en grande difficulté. Ainsi tout le monde va-t-il souffrir.

Il ne reste donc qu’une solution pour sortir l’Europe de l’abîme qui la guette : bien utiliser l’Euro. Mais une Europe économique n’est pas possible sans Europe politique. L’assurance maladie, le traitement du chômage, la question des retraites, toutes ces questions sont-elles exclues du champ politique ? Il faut donc une gouvernance politique de l’Europe. C’est le projet du PSUNE.

Il faut bien comprendre qu’il y a deux modèles pour notre avenir.

Il y a le modèle libéral mondialiste sans l’euro, qui a été choisi par l’Angleterre. Il n’y a plus de classe moyenne. Il n’y a que des travailleurs misérables, étrangers à Londres qui s’entassent dans des locaux exigus et Anglais en province qui vivotent, et des riches, dont les 300.000 travailleurs de la cité qui sont à leur aise dans le centre de Londres.

Il y a le modèle socialiste européen avec l’euro, celui de l’Allemagne, même si elle ne le représente que d’une manière très imparfaite. Le pays souffre, les salaires s’effritent, mais ils restent élevés, surtout l’économie tient grâce au haut niveau technologique de l’industrie.

Il est étonnant de voir Sarkozy et l’UMP tenter de faire rejoindre par la France le second modèle alors que la gauche, sans toujours le savoir, a choisi le premier. L’ennui est que la droite n’a plus la légitimité politique.

Il est tout aussi étonnant d’entendre certains commentateurs regretter que l’Europe ne comprenne pas la Turquie plutôt que la Grèce. Ils n’ont rien compris. La Turquie est aujourd’hui un modèle antinomique de l’Europe. D’ailleurs elle ne s’en sort, avec son modèle propre, que parce qu’elle est à l’extérieur de zone Euro.

Maintenant il y aurait une solution a priori capable d’assurer l’avenir d’une zone Euro sur le long terme. Ce serait la Mitteleuropa, alliance de l’Allemagne et de la Russie, avec les pays du Nord autour. La disparité économique n’est pas rédhibitoire ; il suffirait d’une frontière intérieure. En revanche le poids des slaves serait trop grand et l’Allemagne ne pourra pas l’accepter.

La seule solution est donc la Grande Europe. Au moins l’Allemagne y sera au centre. Aujourd’hui 82% des Français seraient favorables à une armée européenne. Ce sont les dirigeants, la classe politique toutes formations confondues, une prétendue élite qui s’y opposent. Or l’armée exprime par excellence la souveraineté d’un pays. Les Européens de base, si la question leur était correctement posée, seraient favorables à l’intégration européenne. Il ne reste plus qu’à leur poser la bonne question. C’est l’intention du PSUNE.

Peter Eisner (PSUNE/LBTF)

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