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13/03/2012

Législatives slovaques : une élection au cœur de la crise

Fico.jpgLes élections parlementaires slovaques qui se sont déroulées samedi dernier se plaçaient dans le cadre de la crise des dettes souveraines. Elles résultent d’une décision contrainte de la coalition de droite sortante dans le cadre de la mise en place d’un fonds européen que le parlement de Bratislava devait voter. La gauche sociale-démocrate (SMER) incarnée par son dirigeant Robert Fico (photo) avait exigé des élections anticipées si elle apportait son soutien au dit FESF, ce qu’elle avait obtenu.

Le résultat est sans appel. La coalition de droite, réunissant plusieurs partis libéraux et conservateurs, a été laminée, alors que le SMER a réalisé un score historique de plus de 44% des voix, 44.41% pour être précis, lui permettant de gouverner seul. Il progresse de 9.62% en deux ans, et 21 sièges de plus (pour un total de 83 sièges / 150). Le principal parti de droite, l’Union démocratique et chrétienne (SDKU-DS), dont le premier ministre sortant était le représentant, n’a obtenu que 6,09% des voix contre 15.42% des voix il y a deux (-9.33 points). C’est un désaveu total et une sanction électorale sans appel. Le parti « Liberté et solidarité », associé à la coalition sortante, est pareillement sanctionné en n’obtenant que 5.88% des voix contre 12.14% en 2010 (-6.26 points). En revanche, le Mouvement Démocratique Chrétien (KDH), progresse légèrement avec 8.82% des voix contre 8.52% en 2010 (+0.3 points). Des trois partis vainqueurs de 2010, il est le seul à résister à cette vague d’alternance.

Deux autres victimes de ces élections sont à signaler. Il s’agissait d’anciens alliés de la coalition de gauche de Robert Fico au pouvoir avant 2010. Ces partis populistes et/ou nationalistes avaient résisté à la victoire de la démocratie chrétienne mais n’ont pas pu renouveler cet exploit face à la montée de la gauche. Le HZDS de Meciar n’obtient que 0.93% des voix contre 4.32% des voix il y a deux, confirmant ainsi son déclin. Il paye le prix de son échec de 2010, car en Slovaquie il faut 5% des voix pour faire rentrer des députés de son parti au parlement. Le SNS (Parti national slovaque), allié du FN français, perd quant à lui sa représentation nationale car, avec 4.55% des voix contre 5.07% en 2010, il tombe en dessous du même seuil. Il est notamment victime de la progression d’un petit parti nationaliste, le LSNS, qui avec 1.58% des voix contre 1.33% en 2010, progresse légèrement au détriment du SNS. Ce dernier paye sans doute son alliance précédente avec le SMER, qui rendait compliqué son positionnement politique. Sa campagne, axée notamment sur la lutte contre l’islamisation, thème un peu hétérodoxe dans un pays d’Europe centrale, et contre la minorité hongroise, n’a pas convaincu. Toutefois, les partis défendant les minorités ont plutôt régressé électoralement d’environ 1.5 points (4.28% pour le MKP-SMK, 6.89% pour le MOST-HID).

La surprise électorale provient de nouvelles formations politiques, comme la coalition Ol’ano, qui défend les « gens ordinaires » et les « personnalités indépendantes », qui connaît un net succès en obtenant 8.55% des voix, et comme le mouvement 99% qui obtient 1.58% des voix.

Enfin, le KSS (communistes) avec 0.72% des voix, contre 0.83% en 2010, continue de perdre année après année son capital de sympathie, victime essentiellement de la ligne politique du SMER-SD, une ligne socialiste assez affirmée, mais dans un cadre européen et en conservant les réformes libérales des coalitions le précédant.

Dans une Union Européenne où la droite est nettement dominante, en attente d’un résultat éventuellement contraire en France en 2012 puis en Allemagne en 2013, cette victoire de la gauche sociale-démocrate, avec la figure controversée de Robert Fico à sa tête, est comme le signe d’une perturbation profonde des électorats en période de crise budgétaire. Le principe poujadiste du « sortons les sortants » s’applique à nouveau dans un tel contexte. Cette victoire présage-t-elle d’un virage à « gauche » de l’opinion publique européenne ? Ou bien s’agit-il au contraire d’un vote circonstanciel, d’une façon peut-être aussi de donner tort au voisin hongrois, dont la droite parlementaire, incarnée par le Fidesz, avec sur son côté le parti nationaliste Jobbik, est dominante ?

Les prochaines élections présidentielles françaises pourraient répondre à cette question. En revanche, les élections grecques devraient amener la gauche classique (PASOK) à connaître une sévère défaite, au profit non seulement de la droite et de l’extrême-droite mais des « gauches » radicalisées. Enfin les élections autrichiennes, qui se profilent à l’horizon, devraient amener la gauche SPÖ à s’imposer et à fonder une nouvelle grande coalition, car les nationalistes du FPÖ (et du BZÖ) ont le vent en poupe, tout particulièrement Heinz-Christian Strache, qui a connu une légère baisse dans les sondages suite à plusieurs déclarations controversées mais qui retrouve à nouveau le plus haut niveau d’opinions favorables.

Thomas Ferrier
Secrétaire général du PSUNE