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06/04/2010

Révolution par les urnes et mode de scrutin

logo4c.pngUn mouvement qui aspire à une révolution « par les urnes », recherchant une légitimité populaire, démocratique, à son action, n'est pas maître du cadre politique dans lequel il entend inscrire son action, et notamment du mode de scrutin. Certes, il peut contester le système en place, lui reprochant de fausser le jeu démocratique, d'empêcher l'émergence de mouvements politiques novateurs, d'étouffer l'opposition. Mais il ne doit s'attendre à aucune fleur de la part des partis en place. Il lui appartient en conséquence de s'adapter à des circonstances dont il est la victime et qu'il ne peut pas modifier en sa faveur.

Le premier mode de scrutin est celui à l'anglaise, un seul tour et le premier dans chaque circonscription est élu. Ce système défavorise les petits partis, car le vote utile s'exerce immédiatement. Les libéraux démocrates britanniques, qui représentent 18% environ des suffrages selon les derniers sondages, disposent ainsi d'une place très limitée au sein du parlement. Les écologistes ou les nationalistes du BNP en sont totalement exclus. Aucune « révolution par les urnes » (revolutio urnis) n'est possible dans un tel cadre électoral. Le Labour, qui avait songé à réformer les institutions en introduisant une part de proportionnelle lorsqu'il était dans l'opposition, a renoncé immédiatement une fois au pouvoir. Notons que Nicolas Sarkozy souhaite adopter ce mode de scrutin pour faire élire les conseillers territoriaux en 2014, afin de limiter la victoire de la gauche et d'éliminer du jeu le FN.

Le second mode de scrutin est celui à la française, le scrutin majoritaire à deux tours. Il est appliqué aux présidentielles, où les deux meilleurs sont qualifiés pour le second tour, et aussi aux législatives, où il faut dépasser 12.5% des inscrits. Ce système verrouille encore davantage le jeu électoral que le système britannique. Ainsi, le Modem de Bayrou n'a réussi à faire rentrer que quatre députés au parlement et le FN, même à l'époque où il atteignait 15% des voix, au maximum un seul.

Le mode de scrutin le plus favorable à une revolutio urnis reste donc le système à la proportionnelle, généralement accompagné d'une barre minimale, qui est désormais de 3% en Grèce, 4% en Italie et en Suède, 5% en Allemagne, 7% en Russie et jusqu'à 10% en Turquie. En revanche, au niveau du parlement européen, les institutions de Bruxelles encouragent les états à pratiquer la proportionnelle la plus large possible, comme le fait l'Espagne par exemple et l'Italie au niveau des élections européennes. Même la France et le Royaume-Uni, si rétifs à ce mode de scrutin, l'appliquant aux européennes. Le FN, qui n'a aucun député national, dispose en revanche de trois députés européens. Le BNP, qui n'avait obtenu que 0.7% des voix aux dernières législatives, avec 6.5% des voix, fait rentrer à Strasbourg deux députés. Et dans le reste de l'Europe, des partis nouveaux, comme le Parti Pirate suédois, parviennent à obtenir des élus.

Ainsi, la seule élection qui en France permette d'obtenir des élus à partir d'un résultat de 6 à 7% par circonscription, c'est celle pour les représentants nationaux au parlement européen. Et c'est aussi le cas dans les autres pays du continent, avec des barres davantage accessibles encore. Les élections européennes en France ont d'ailleurs toujours permis la victoire de formations nouvelles, comme le FN en 1984 (11% des voix), le MPF de Philippe de Villiers (13% en 1999), Europe Ecologie (qui en 2009 a fait jeu égal avec le PS) ou encore la liste Tapie. Malheureusement, ce sont souvent des organisations souverainistes (UKip au Royaume-Uni, le LPR polonais en 2004... etc) ou pseudo-écologistes qui en profitent. Et si les européanistes-socialistes (euro-socialistes !) en profitaient eux aussi pour se faire connaître avec un programme bien plus révolutionnaire que le projet timide de Newropeans ?

Aux élections nationales, votez « national », même si ça ne servira à rien, quel que soit le parti, mais aux élections européennes, votez « européen » !

Thomas Ferrier (PSUNE/LBTF)

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