14/07/2019
La France et la Lettonie (1ère partie)
Quand les souverainistes et autres chauvino-mondialistes font face au poids de la réalité anthropologique et historique.
Possession des chevaliers prussiens de l’ordre de Livonie entre le XIIIème et le XVIème siècle, sous la couronne suédoise à partir de 1655, puis livrée à l’Empire Russe par le Traité de Nystad, pour être indépendante en novembre 1918 puis aliénée de nouveau sous le joug des Soviétiques en 1944 malgré une résistance acharnée jusqu’en 1953 et étant enfin libre et indépendante en 1991 et intégrée par la suite à l’Union Européenne en avril 2004, la Lettonie a démontré à travers son histoire sa pugnacité à résister et à rester elle-même sans jamais renier son caractère indubitablement européen et sa volonté de participer à l’idée européenne.
Depuis l’éclosion des partis ouvertement europhobes et chauvino-mondialistes tels que l’Union Populaire Républicaine avec son président François Asselineau, la montée de la démagogie et de la moquerie envers ce pays vu comme inexistant par beaucoup de français s’est fortement développée notamment dans la bouche de leurs sectateurs. La dérision exprimée par ces personnes envers la Lettonie a pour but de décrédibiliser la parenté de fait entre tous les Européens, unis par de multiples caractéristiques communes, ainsi que d'accréditer la thèse absurde exprimée par François Asselineau selon laquell les « Français sont bien plus proches des Tunisiens, des Marocains et des Maliens que des Lettons ». Dans cet article je m’efforcerais de présenter le fait que la Lettonie et la France ont bon nombre de points communs dans de multiples domaines permettant de déceler une parenté commune certaine ainsi que des codes civilisationnels incontestablement communs entre ces deux patries et les deux peuples qui la représentent et y vivent, afin d’un jour pouvoir habiter dans notre maison commune : l’Europe.
La Langue
Tout d’abord abordons le domaine de la linguistique, au premier abord; beaucoup diraient que la langue lettonne et française n’ont rien avoir entre elles et qu’aucun philologue sérieux n'a étudié ou comparé ces deux langues dans le but d’y déceler une parenté, au moins des similitudes. C'est pourtant une réponse bien naïve, en effet, car la langue lettone ainsi que la langue française sont d’abord par l’origine toutes deux des langues indo-européennes, ce qui veut dire qu’elles viennent d’une même langue commune a l’origine –le proto-indo-européen- et que les langues reposant sur cette origine ont des éléments lexicologiques, morphologiques et syntaxiques fortement semblables, ce qui est le cas pour le français et le letton bien que ces langues se trouvent ensuite dans des sous-branches, romane pour le français, balto-slave pour le letton. Ces deux langues utilisent aussi toutes deux le même alphabet qu’est l’alphabet latin, la base grammaticale est aussi la même car les deux langues sont bâties avec des phrases construites à partir de la relation sujet-verbe-objet mise à part le fait que la langue lettone ne comporte pas d’article; il en est de même pour les noms et les genres ainsi que pour la conjugaison malgré le fait qu’il y en ait que trois pour le letton. Enfin, les deux langues se développent dans les deux pays respectifs, en effet, le français est parlé par 20 800 lettons en 2010 et l’Union Européenne s’est engagée récemment au développement de l’apprentissage des langues baltiques en Europe de l’Ouest.
La Religion
Des racines jusqu’aux branches, une parenté et des similarités certaines s'expriment. La religion est un marqueur fondamental dans la reconnaissance d’une parenté commune et de caractéristiques sociologiques et religieuses semblables entre la Lettonie et la France pour exposer aux peu éclairés la réalité de la concordance -malgré des différences- du même socle anthropologique religieux commun. D’abord à l’origine par la religion cosmogonique indo-européenne qui est un moyen à l’époque des Indo-européens indivis d’expliquer la formation de l’univers et du monde. On remarque aors de fortes similitudes, par la suite, dans les moyens de pratiquer ce culte -essentiellement debout- ainsi que dans l’explication de la création entre les balto-nordiques et les gréco-romains, les balto-nordiques pensant comme les grecs notamment qu’au commencement n'existait qu'un abîme béant, le Ginnungagap rappelant le chaos primordial grec de la théogonie d’Hésiode.
Cette corrélation de l’explication de la création du monde entre les Européens eut par la suite la conséquence de faire apparaitre des cultes divers plus évolués mais semblables que sont les paganismes d’Europe. On ne peut réellement dire qu’il y a un paganisme proprement français, car les paganismes d’Europe se classent en familles selon les régions d’Europe, et donc sur le territoire actuel que nous appelons français il y eut - malgré la résurgence du paganisme dans ce pays - des paganismes. Malgré cela nous pouvons citer les nombreux rapprochements entre le paganisme celtique –paganisme gaulois majoritairement- et le paganisme letton de part déjà la mythologie notamment avec les dieux de la mythologie lituanienne Dievas dieu du ciel, du tonnerre et dieu suprême ainsi que Saulè déesse du soleil et des morts que l’on peut rapprocher des dieux de la mythologie gauloise Taranis et Belenos qui s’attribuent alors respectivement les fonctions des dieux lettons précédents, ainsi que de Lug pour la fonction de dieu suprême.
Mais ce n’est pas tout, en outre nous pouvons cité aussi Auseklis déesse de la beauté et de l’amour très utilisée dans le folklore letton et qui est semblable à la déesse Belisama, représentant la beauté, l’amour et la force féminine. Pērkons, dieu plus largement balte du tonnerre est à rapprocher aussi du Taranis gaulois. La déesse de la fertilité et de la chance qu’est Laima ainsi que le dieu Jumis accompagnée par Kārta et Dēkla peuvent être associés à Sucellos, dieu de l’agriculture et de la fertilité, connu pour être le dieu au maillet et au tonnelet. Nous ne nous attarderons pas sur l’application du schéma trifonctionnel de Georges Dumézil (1898-1986), père de la mythologie comparée, que l’on peut faire par rapport à la triade gauloise Toutatis-Taranis-Sucellos sans oublier Lug ainsi que la triade lettone Dievas-Pērkons-Jumis. Je ne m’attarderais pas non plus sur la conception de la vie après la mort ainsi que sur la place des démons dans la mythologie lettone, ceux-ci pouvant faire l’objet d’un article entier.
Cette similarité dans la pratique des cultes et de la désignation du divin continue avec l’apparition et le développement du christianisme dans les deux sociétés bien que plus tardif chez les baltes (aux environs du XIIIème siècle). Cependant l’église chrétienne majoritaire diffère, avec d’une part très majoritairement et sensiblement, l’église catholique pour la France en raison de sa proximité avec l’Eglise de Rome et la christianisation progressive, et s’accélérant après le sacre de Charlemagne en 800, bien que commencée à partir du IIème siècle notamment avec le prêcheur Irenaeus (Irénée) alors archiduc de Lugdunum, actuelle ville de Lyon. D’autres part la Lettonie connait les trois églises au sein de son pays mais avec une forte influence et place pour l’église luthérienne malgré le fait que la christianisation du territoire letton et plus généralement des territoires baltes fut faite antérieurement par l’église catholique. En effet, l’église luthérienne compte pour environ 40% des croyants malgré l’augmentation de l’athéisme –du fait de la période soviétique- et des migrations religieuses en direction de l’église orthodoxe de plus en plus nombreuses. La christianisation bien que construite de différentes façons et forgée par deux églises différentes est bien présente dans les deux pays en faisant partie intégrante de la culture et de la formation des deux sociétés.
Pour finir concernant la partie religieuse, je parlerais de la place de la laïcité dans les deux sociétés qui de manière surprenante connait une place similaire malgré des différences ainsi que le fait que les deux pays possèdent l’esprit et applique le principe du Concordat. En effet, concernant la laïcité, la France et la Lettonie l’applique toute les deux, pour la France avec la loi de 1905 ainsi qu’avec la constitutionnalisation du principe même de laïcité depuis 1946 garantissant la séparation de l’église et de l’état, la neutralité de l’état en matière religieuse, la non-rémunération par l’argent public du corps sacerdotal, la liberté d’exercer toute religion et entre autre ne pas en montrer les signes sur la voie publique. La France applique donc une laïcité stricte qui est aujourd’hui singulière de par sa radicalité.
La Lettonie elle, avec la constitution de 1922, proclame depuis une révision intervenue en 1991 la liberté religieuse et précise que l’État est séparé de l’Église. La loi sur les organisations religieuses de 1995 (modifiée en 1998 et 2002) stipule que l’État ne privilégie aucune religion et garantit la liberté religieuse pour les confessions principales. Ni la constitution, ni cette loi ne font référence au concept de religion « traditionnelle ». Cependant, nous pouvons noter quelques exceptions avec notre laïcisme français : d’abord le fait que l’Église catholique bénéficie d’un statut particulier qui résulte d’un accord conclu en 2000 (et ratifié en 2002) et de lois spéciales prises pour son application comprenant toutes sortes de privilèges sur les autres confessions, ensuite la possibilité d’un financement public des religions comprenant des subventions accordées pour la rénovation des lieux de culte; enfin la législation fiscale prévoit des exemptions (impôt sur les biens immobiliers, impôt sur les sociétés, TVA, droits de douane) pour les religions enregistrées. Les deux pays ont aussi sur leur sol un régime concordataire appliqué à certains territoires, l’Alsace et la Moselle pour la France du fait de la loi du 18 Germinal an X qui n’a pas été supprimée du fait que les deux territoires appartenaient ensuite à l’Allemagne en 1870. En Lettonie certaines municipalités appliquent un régime concordataire avec rémunération du personnel des sept religions reconnues par l’état ainsi que l’enseignement de la théologie dans les écoles encadrées par ces municipalités.
Vincent K. (Le Parti des Européens)
19:11 Publié dans Analyses, Histoire, Religion | Lien permanent | Commentaires (1) |