Les erreurs stratégiques de Nicolas Sarkozy.
25/10/2015
L’importance passée de Patrick Buisson aux côtés de l’ancien président de la république se démontre à l’aune des conséquences actuelles de son absence. Sans boussole stratégique, Nicolas Sarkozy est perdu et navigue à vue. Le coût politique de ces errements pourrait être désastreux pour les primaires et/ou pour l’élection présidentielle. Ne pouvant s’honorer d’un bilan politique satisfaisant d’ancien président, qui avait abouti à la victoire d’Hollande et non à sa réélection, il est relativement démuni. La stratégie de 2007 d’assèchement du FN semble au point mort. Sarkozy, tout comme Hollande, semble avoir accepté par principe l’idée que Marine Le Pen serait au second tour et sans doute en tête.
La première erreur de Sarkozy a été de se séparer de Buisson, suite aux écoutes « indélicates » de ce dernier, sans le remplacer par quelqu’un animé du même bon sens tactique mais sans les défauts de l’ancien journaliste de Minute. Guillaume Peltier (ex-FN, ex-MNR, ex-MPF) était de fait l’héritier naturel. Or il a été marginalisé suite au « coup de gueule » de Nathalie Kosciuszko-Morizet en faveur de son éviction car elle « n’aime pas les fascistes » (selon ses propos) fin 2014.
Si Nicolas Sarkozy veut échouer lamentablement aux primaires face à Juppé, décourageant tous les militants de la droite de l’UMP qui seraient tentés de le soutenir, il n’a qu’à continuer à écouter les conseils de NKM qui est à la droite ce que Macron est à la gauche, à savoir une pièce rapportée du camp adverse. Les centristes iront vers leur poulain naturel, Alain Juppé. Celui-ci est donc le grand gagnant des derniers mois.
L’erreur de Sarkozy est de défendre une ligne de second tour, où il devra effectivement rassembler au centre face à Marine Le Pen, alors qu’il n’est même pas encore au premier tour. Il part du principe qu’Hollande serait nécessairement éliminé dès le premier tour alors qu’une élection n’est jamais remportée avant d’avoir été jouée. C’est là encore une erreur stratégique majeure. Hollande en profite, favorisant de fait le FN en en faisant son principal adversaire, car il sait que sa seule chance d’être réélu en 2017 est de se retrouver en face de Marine Le Pen au second tour. Sarkozy lui facilite donc la tâche.
L’affaire Nadine Morano est un exemple encore plus désastreux de cette ligne suicidaire de Sarkozy. En lâchant mollement Morano, sous prétexte de propos mal rapportés par cette dernière de De Gaulle, propos maladroits dans la forme davantage que dans le fond, car en adéquation malgré tout avec ce que pense une partie importante des « Républicains », il a commis une erreur majeure. Il s’est fait inutilement une ennemie alors qu’elle le soutenait sur une ligne droitière et plébéienne favorable. Il a en outre montré une certaine faiblesse acceptant de se faire dicter sa conduite par le candidat de droite Richert aux élections régionales « Grand-Est » et ses colistiers, qui menaçaient de démissionner si Sarkozy maintenait Morano. Il a même été félicité par Manuel Valls et d’autres ténors du PS pour ce fait d’armes.
Dernière erreur en date ? Avoir accepté de participer avec Cambadélis (PS) à l’opération de déstabilisation de l’émission « Des paroles et des actes » à laquelle Marine Le Pen était conviée en « guest star ». Ce faisant, il a accrédité la dénonciation de ce fameux « UMPS » par le FN, de cette dénonciation d’une collusion de la gauche et de la droite pour faire taire le peuple. Tout ce qui encourage dans l’esprit des électeurs l’idée qu’au fond PS et LR (ex-UMP) c’est la même chose est au bénéfice du FN.
Un Sarkozy courageux aurait osé demander un débat en face à face à Marine Le Pen ce jeudi, au lieu de manœuvrer pour vider l’émission de son sens en coalition avec ses adversaires du PS. Le fait qu’il n’y ait pas pensé ou qu’il n’ait pas osé montre qu’il a peur de l’affronter. Cette frilosité trahit une incertitude criante quant à la bonne stratégie à adopter. En affrontant MLP, il se serait placé comme la seule forme d’opposition et aurait préparé dans les esprits le duel de second tour 2017, écartant la gauche du jeu car Hollande, en tant que président en exercice, n’aurait pas pu participer au débat.
Nicolas Sarkozy préfère laisser à Marine Le Pen le « monopole du réel ». Il est devenu inaudible en s’alignant sur les thèses conformistes d’Alain Juppé qui sera toujours plus légitime que lui sur ce terrain. Comment la droite de l’ex-UMP pourrait avoir encore confiance en lui ?
Pour se ressaisir et regagner le terrain perdu, pour devenir à nouveau un minimum crédible sur les thèses sécuritaires et identitaires, ce sera maintenant très compliqué. L’entêtement de la droite classique à s’aligner sur les thèses idéologiques de la gauche est suicidaire. C’est la raison principale d’ailleurs de la montée du FN depuis 1988.
Sarkozy au final sera peut-être quand même le candidat de la droite, car Juppé reste un homme politique usé et associé à l’époque chiraquienne, et peut-être même gagnera-t-il l’élection présidentielle tant Hollande est décrié par les Français, mais il est à craindre que Sarkozy II soit une fin de règne, rappelant le dernier mandat de Chirac (2002-2007). Après un Hollande s’effondrant dans les sondages à peine élu, Sarkozy serait élu par défaut et impopulaire avant même de gouverner. La France pourrait-elle s’en relever ?
Thomas FERRIER (PSUNE/LBTF)
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