Premières élections européennes en Croatie
15/04/2013
La Croatie rejoignant l’Union Européenne au 1er juillet 2013, les électeurs croates devaient élire pour un an leurs représentants au parlement de Strasbourg. Dans un contexte où le sentiment europhile a considérablement régressé lorsque la perspective d’adhésion est devenue réelle, ses élections permettent de tester l’opinion croate.
Et comme habituellement, le principal vainqueur est… l’abstention. 21% seulement des électeurs se sont déplacés pour une élection sans véritable enjeu et alors qu’ils savent qu’ils vont devoir revoter dans moins d’un an et dans le contexte des élections européennes générales, tous pays confondus. La mobilisation n’était donc pas du tout au rendez-vous.
A près de 97% du dépouillement à cette heure, les résultats quasi définitifs sont désormais connus et ne devraient plus évoluer qu’à la marge.
Avec 33% environ des voix, la coalition de centre-droit autour du HDZ de l’ancien président Tudjman est le vainqueur de ces élections, devançant avec un peu moins de 32% la coalition de centre-gauche, actuellement au pouvoir, autour du SDP (sociaux-démocrates). Autant dire que les deux grands partis se valent mais il faut noter toutefois le score plus que satisfaisant du principal mouvement d’opposition. L’information est toutefois à relativiser vue la faible participation.
Troisième et dernier parti à obtenir des élus, les travaillistes croates, proches de la gauche radicale, obtiennent environ 5,75% des voix, ce qui est un résultat plutôt correct, qui s’explique certainement par la déception d’une partie des électeurs de gauche dans le contexte d’une crise économique et politique qui affaiblit le SDP.
Avec un peu moins de 4% des voix, la coalition de paysans et de libéraux échoue à obtenir des élus. C’est aussi le cas de la coalition istrienne autour d’Ivan Jakovcic avec environ 3,8% des voix. Enfin le HDSSB, réunissant des conservateurs et des modérés, avec un peu plus de 3,1% des voix, échoue également. Ils ne sont pas tant victimes d’un vote utile en faveur du HDZ mais surtout d’un manque de mobilisation de leurs électeurs.
A droite, les autres formations connaissent un désaveu certain. Le HRAST (centre-droit) n’obtient que 2,5% des voix environ, le A-HSS (paysans dissidents) 0,9%, alors que les démocrates centristes n’obtiennent que 0,75% des voix. Les retraités plafonnent à 1,48%, alors que les différentes formations écologistes sont réduites au minimum (1,5% pour l’Action de Jeunesse, proche des Verts européens, 1,15% pour la Coalition des Verts).
Les nationalistes et eurosceptiques sont les principaux perdants de cette élection. Contrairement à ce qui se passe dans les autres états membres, la Croatie n’a pas eu à faire l’expérience de son intégration à l’Union Européenne, puisqu’elle attendait depuis plusieurs années à ses portes. Si l’adhésion suscite un enthousiasme très mitigé, l’europhobie reste minimale. Elle est essentiellement incarnée par plusieurs mouvements « du droit », issus de la filiation des « ustasi ». Cette division ne profite à aucun d’entre eux. Le HSP historique, loin des 6% obtenus il y a quelques années, tombe à 1,4% des voix, alors que le HCSP, scission qui présentait une dynamique certaine et tendait à rivaliser avec son ancien parti, mené par une figure du nationalisme européen en la personne de Tomislav Sunic, n’obtient qu’un insignifiant 0,7%. Les dissidents du A-HSP quant à eux doivent se contenter de 0,32% finissant avant-dernier de la vingtaine de listes présentes.
Enfin, l’extrême-gauche communiste, victime du vote en faveur des travaillistes, et d’une manière générale fort peu populaire en Croatie, se limite à un peu moins de 0,5% des suffrages.
Cette élection est donc à retenir par le taux absolument médiocre de la participation, qui atteint un record, mais aussi par la nette victoire dans ce contexte des deux principales coalitions (HDZ et SDP), qui raflent l’écrasante majorité des sièges de député européen, et atteignent ensemble les 65% des voix. Il est toutefois vraisemblable qu’en 2014, un an après l’adhésion, lors des nouvelles élections européennes, la participation soit bien supérieure, redistribuant alors les cartes.
Thomas FERRIER (PSUNE)
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