Catherine Ashton et Haïti
30/01/2010
La travailliste Catherine Ashton, haut-représentant de l'Union Européenne chargé des affaires internationales, qui a pris récemment la place de l'espagnol Javier Solana, est mise en cause depuis plusieurs jours en raison de son absence lors de la crise haïtienne. Elle était déja fortement critiquée du jour de sa nomination pour son manque criant de charisme, ce pourquoi en réalité elle a été choisie, et surtout pour son manque d'expérience. On lui a en outre reproché d'avoir fait partie d'une organisation financée par feue l'Union Soviétique. En vérité, Catherine Ashton a été nommée pour dédommager moralement les britanniques, vu que leur poulain Tony Blair avait été écarté, et à la suite du refus de David Miliband d'exercer cette fonction. Fallait-il offrir à un représentant d'Albion la place de « ministre des affaires étrangères » de l'Union Européenne, sachant que les deux grands partis de ce pays, le Labour et les Tories, partagent un certain euroscepticisme et sont surtout à la botte de Washington, à la différence des Libdems (Libéraux-Démocrates de centre droit) qui du moins en paroles sont favorables à une Europe fédérale.
David Cameron quant à lui n'a jamais caché sa profonde europhobie et a axé son discours aux dernières élections européennes sur ce thème, ce qui n'a pas empêché le parti ouvertement europhobe « UKip » d'empocher plus de 16% des suffrages. Son parti a même quitté le groupe populaire (PPE) au parlement européen, rejoignant une coalition hétéroclite où dominent néanmoins, outre les Tories, le PiS des frères Kaczynski et l'ODS du tchèque Vaclav Klaus. Toutefois, ses « amis » américains, ses mentors pourrait-on dire, lui en ont fait le reproche car son europhobie trop franche risque au final d'affaiblir le pouvoir de nuisance des Tories au parlement européen. En clair, cyniquement, les USA préfèrent les « ennemis européens de l'Europe » au sein des institutions de l'UE, où le sabotage pro-USA règne, qu'en dehors. Cameron a donc dû mettre de l'eau dans son vin, renoncer dans sa campagne nationale à l'idée d'un référendum sur le traité de Lisbonne, et se faire plus discret sur ce thème.
Revenons en à la crise haïtienne. On reproche à Mme Ashton son absence totale suite au tremblement de terre qui a ravagé la partie occidentale de l'île de Saint-Domingue, cette ancienne colonie française qui avait pris précocement son indépendance au début du XIXème siècle au prix d'honteux massacres de blancs. Elle ne serait même pas allée en personne à Haïti pour apporter son soutien moral aux sinistrés. Parallèlement, la France tente par une volonté néo-colonialiste qui n'échappera à personne de rivaliser avec les Américains, dont l'aide, en plus d'une intervention militaire humanitaire, est bien supérieure. Au PSUNE, nous considérons qu'Haïti fait pleinement partie de la sphère naturelle d'influence américaine et nous proposons que les Européens laissent les Américains gérer complètement cette crise, y compris financièrement. Cessons par des nostalgies coloniales inacceptables de vouloir nous immiscer dans le devenir de ce qui jadis fut sous tutelle européenne. Nous, nous ne reprochons donc pas à Catherine Ashton pour une fois son inaction.
Le fait est que cela pose un problème essentiel de voir ce poste clef de l'Union Européenne dirigé par une personne qui manque totalement d'expérience du terrain et de connaissance géopolitique de base, et dont on peut craindre qu'elle serve les intérêts du « Parti Américain » en Europe autrement que par ses seules insuffisances.
La tâche des Européens est de bâtir une véritable Europe indépendante mais qui n'ait pas vocation, à la différence des USA, de vouloir jouer les médecins et les pompiers du monde. L'Europe que nous appelons de nos vœux est au contraire une Europe eurocentrée, de l'Islande à la Russie, règlant ses problèmes et se gardant bien de vouloir régler ceux des autres, y compris dans le domaine écologique où l'aide globale sera apportée en réalité par une réponse européenne, par le bond technologique que seule l'Europe est capable de susciter, via les investissements dans le domaine de la recherche qu'elle pourra consentir.
Que l'Union Européenne combatte plutôt en son sein le chômage endémique, qu'elle cesse de saboter les services publics et de créer des appels d'air ingérables amenant des pauvres gens à croire à un mirage, l' « eldorado » européen. Et surtout qu'enfin elle rompe définitivement avec les Etats-Unis en exigeant notamment le démantèlement des bases américaines en Europe et l'abrogation du traité de l'Atlantique Nord, car ce n'est pas l'OTAN mais la future armée européenne qui devra assurer notre défense. Nous européens n'avons pas à être sous tutelle américaine quant aux questions de sécurité et d'armement !
Thomas FERRIER (PSUNE)
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